Il a bien connu Chagall, qu’il qualifiait même de “père spirituel”. Il a côtoyé Picasso bien qu’il dit avoir noué davantage de liens amicaux avec l’épouse du maître, Jacqueline. Il a fréquenté le génial Bernard Buffet ou encore Françoise Gilot. A presque 90 ans, André Brasilier est l’un des plus connus peintres “Fauviste” encore en vie. Une exposition lui est d’ailleurs consacrée du vendredi 19 octobre au vendredi 9 novembre à l’Opera Gallery London. Une soixantaine de ses tableaux seront ainsi visibles pour se rendre compte de l’empreinte contemporaine laissée par le Français dans le monde de la peinture au cours des deux derniers siècles.
Il a dit oui tout de suite quand Opera Gallery London lui a proposé de venir exposer à nouveaux ses toiles de l’autre côté de la Manche. “Je travaille avec eux depuis de nombreuses années, j’avais déjà fait une exposition avec eux il y a quatre ans à Londres”, confie André Brasilier. Il faut dire que le lien qu’il entretient avec la capitale anglaise remonte à sa mère, Alice Chaumont, qui fut diplômée du Royal College of Art de Londres.
L’artiste peintre de 89 ans est donc ravi de revenir à Londres jeudi 18 octobre pour le vernissage de son exposition, sobrement intitulée André Brasilier et où une soixantaine de ses créations seront présentées. “J’ai notamment sélectionné des œuvres récentes. Certaines sont très inspirées de ma femme, comme toujours”. Car oui, son épouse Chantal demeure son éternelle muse et quand il en parle, on sent l’amour passionné et passionnant que cet homme porte à sa compagne. “Elle joue un rôle capital dans ma vie et dans mon travail”, résume André Brasilier.
Ils se sont rencontrés en 1956 à Rome et depuis ils ne se sont jamais séparés. “J’en ai fait ma source d’inspiration permanente. Elle a un physique qui suscite l’admiration” mais pas seulement ajoute-t-il, “elle est une passionnée d’art, elle a un sens artistique exceptionnel et elle me donne toujours des conseils ainsi que des critiques précieuses”. S’il reste aussi admiratif de sa femme, chimiste de formation et qui aura travaillé dans les parfums, c’est parce que, malgré une brillante carrière, Chantal Brasilier a fait le choix d’abandonner son travail pour se consacrer à sa famille. Et pour cela, l’artiste-peintre lui en est reconnaissant. “La vie d’un artiste est un combat difficile. Je me considère comme un funambule qui marche sur un fil. Je remercie le Ciel d’avoir pu avoir une vie consacrée à ma passion. Et je suis reconnaissant à ma femme qui a élevé une famille, et c’est précieux”.
A bientôt 90 ans, André Brasilier embrasse aussi le temps avec passion. “Les date sont là, mais mon amour pour l’art est toujours aussi puissant. Je crois que c’est cela d’ailleurs qui m’aide à traverser le temps”. Né dans une famille d’artistes – son père, Jacques Brasilier était étroitement lié au mouvement symboliste -, il a su très jeune qu’il voulait lui aussi devenir artiste peintre. “C’est vers 10-12 ans que j’ai compris”. Très vite, un style s’impose chez lui. Pas de réalisme, mais du symbolisme. Des pas donc calqués sur celui de son père.
A 20 ans, il quitte Saumur, sa ville natale, pour Paris afin d’étudier à l’École Nationale Supérieure des Beaux-Arts. En 1952, il reçoit une bourse de la Fondation Florence Blumenthal et l’année suivante, à 23 ans, il remporte le Premier Grand Prix de Rome. Ce prix lui a ouvert les portes de l’Académie de France à Rome. Sa première exposition personnelle de peintures, centrée sur les thèmes musicaux qui apparaissent aussi souvent dans ses œuvres, a eu lieu à la galerie Drouet en 1959. Il participera aussi souvent à des expositions à Paris dans les années 1950 et 1960.
Ses sources d’inspiration sont multiples – dont sa femme, Chantal donc -, mais André Brasilier met aussi en avant son besoin de couleurs. “Elles jouent un rôle primordial pour moi. C’est le premier contact avec une œuvre d’art”. André Brasilier cite parmi ses influences Gaugin, Matisse, Ruault, Bacon, mais aussi Picasso ou encore Buffet. “J’éprouve le besoin de la couleur en permanence avec une passion particulière pour le bleu”. Autre source d’inspiration, les chevaux et la nature en général. Celui qui est né et a grandi à Saumur ne se lasse pas de reproduire avec son propre style sa vision de la campagne. “Les chevaux ont toujours été un modèle pour moi, c’est le spectacle de la vie, la liberté”.
André Brasilier reconnaît volontiers que son style a connu une évolution mais pas de révolution majeure. “Entre mes œuvres de mes 20 ans et celles de mes 90 ans, il y a toujours eu une constante qui ne s’est jamais transformée. J’ai gardé cette même cohérence”. Son travail en tous les cas est reconnu dans le monde entier, il a exposé en France, en Allemagne, au Japon, en Suisse, au Canada, aux États-Unis, en Russie, aux Pays-Bas, en Corée et à Hong Kong.
En 2017, André Brasilier était classé 424 parmi le Top 500 Artists dans la liste des ventes d’Artprice. La valeur de ses tableaux a même quintuplé ces dernières années. “Je suis ému bien évidemment quand j’apprends que certaines de mes toiles se vendent à des prix élevés. Même si je continue à être étonné. Mais je n’y pense pas vraiment”, confie-t-il modestement. Il répète simplement qu’il se dit reconnaissant d’avoir pu et de continuer à pouvoir vivre de sa passion.
Comme Picasso, André Brasilier est également le seul artiste à avoir eu une rétrospective au Musée L’Hermitage en Russie durant son vivant, en 2005. “Mon fils m’a d’ailleurs envoyé il y a quelques jours une photo d’une de mes toiles que j’avais offerte en 2005 à ce musée”, explique le Français. Une œuvre aujourd’hui placée entre deux autres grands maîtres de la peinture, Buffet et Soulages.