A l’heure où certains pays commencent à revoir leur copie face au port du masque par la population pour éviter la propagation du coronavirus, certaines particuliers ont déjà pris les devants et commencé la fabrication de protections faites maison. C’est le cas de Bérengère Chauvet et Helen Cadiou, qui se sont rencontrées par le biais de l’association d’entraide aux Français du Royaume-Uni. La première, bonne couturière, fabriquait déjà des masques en tissu depuis début mars qu’elle a d’abord distribué à son cercle proche. La seconde a relayé l’idée auprès de ses contacts britanniques en espérant que cela fasse effet boule de neige. Aujourd’hui, les deux Françaises installées dans la capitale anglaise aimeraient trouver une entreprise qui pourrait produire et distribuer ces masques afin de les mettre à disposition au plus grand nombre.
Bérengère Chauvet, qui vit à Londres depuis 16 ans, a été immédiatement été sensible à l’épidémie du coronavirus, puisque la Française est une personne à risque. “Je suis immuno-déprimée”, confirme-t-elle, “j’avais ainsi envie d’apporter ma pierre à l’édifice dans la lutte contre la propagation de ce coronavirus”. Voyant ce qui se passait de l’autre côté de la Manche, et alors qu’elle possédait d’une machine à coudre, elle a commencé début mars, via des tutoriels sur internet, à fabriquer des masques maison, lavables au savon et à l’eau chaude après chaque utilisation. “Je sais que cela ne protège pas comme un masque chirurgical destiné aux personnes en contact avec des malades, mais cela évite qu’un particulier potentiellement infecté ne diffuse ses projections quand il sort de chez lui”, explique-t-elle.
La Française s’est ainsi inspirée du modèle diffusé par le CHU de Grenoble. Bérengère Chauvet l’a amélioré en utilisant un fin fil de fer de jardinage sur l’arête du nez et un filtre changeable réalisé avec des sacs d’aspirateur.
Au début de l’épidémie, la Française en avait confectionné une dizaine, distribuée à des amies pour leur permettre de sortir faire leurs courses. “J’en ai aussi donné au personnel de la pharmacie de mon quartier”, avance Bérengère Chauvet. Grâce à Patricia Connell, déléguée consulaire et co-fondatrice d’une association d’entraide entre les Français du Royaume-Uni, elle a pu ensuite envoyer un mail à la liste électorale consulaire pour inciter celles et ceux qui le pouvaient à fabriquer aussi ce genre de masques. C’est alors qu’elle a été contacté par une école de couture qui avait déjà lancé une production pour en fournir dans son secteur. “Mais l’idée était surtout de créer un plus grand réseau pour une distribution à tous les particuliers”, avance la Française.
C’est ce qu’elle espère faire avec Helen Cadiou, que Bérengère Chauvet a “rencontré” par le biais de la structure d’aide. “Tout le monde en Europe s’est mis à fabriquer des masques maison et j’ai trouvé que l’idée était très bonne car je pars du principe que tout le monde peut être contagieux”, explique Helen Cadiou. Cette scientifique de formation, travaillant à l’University College of London, explique être très sensible à cette épidémie de coronavirus non seulement en tant que biologiste mais aussi parce que sa fille, interne en médecine, est en première ligne et est donc exposée à des malades toute la journée. “Le personnel est en train de se faire contaminer. Les instructions sont de ne porter des masques que si les patients ont été testés positifs. S’ils avaient assez de masques, ils en porteraient pour tous les patients. Mais ils n’en ont tout simplement pas”, fait-elle remarquer.
Pour aider Bérengère Chauvet, la Française a dans un premier temps transmis le modèle de fabrication du CHU de Grenoble à tous ses contacts britanniques. “Une personne nous a traduit le texte en anglais et j’ai ensuite envoyé un mail à mes connaissances dans la recherche, que ce soit en Angleterre ou en Ecosse”, explique Helen Cadiou. Elle est persuadée que plus la population sera alertée sur l’importance de porter des masques plus le gouvernement changera d’avis sur la question. “Comme dans le reste de l’Europe, il pense que les masques ne servent à rien pour la population, mais tout ce qui peut permettre d’éviter la propagation de l’épidémie est bon. Les gens peuvent changer la donne, on l’a d’ailleurs vu sur la question de la fermeture des écoles et universités. Les parents ont d’abord commencé à retirer leurs enfants des établissements, les étudiants étrangers voyant ce qui se passe ailleurs ont décidé de rentrer. C’est là que Boris Johnson a décidé de prendre des mesures”, estime-t-elle.
Les deux Françaises cherchent donc maintenant à produire à plus grande quantité et distribuer – pour éviter les envois par la poste – ce type de masques en tissu. “Si quelqu’un dans l’industrie du textile ou d’une école comme celle de St Martins à St Pancras peut entendre ce message, ce serait une très bonne nouvelle. Le Royaume-Uni a eu la chance d’avoir quelques jours de retard sur l’Italie, l’Espagne ou encore la France. Il a loupé un premier coche en ne prenant pas les dispositions nécessaires avant, mais là, il peut faire un peu la différence”, expose Helen Cadiou. “L’objectif serait que les masques soient gratuits, on en appelle donc à la bonne volonté”, ajoute Bérengère Chauvet.
Si de nombreux volontaires ont donc déjà proposé leur aide dans différentes régions du Royaume-Uni, une fondation – qui souhaite garder l’anonymat – a aussi offert des fonds pour les soutenir. Reste à trouver un site de production et un distributeur.