Comme l’Angleterre, l’Ecosse a renforcé, depuis lundi 15 février, ses mesures de quarantaine pour les passagers de vols internationaux. Celle-ci doit s’effectuer dans des hôtels et aux frais du passager, soit £1750 pour dix jours. Et si l’Angleterre n’impose ceci qu’aux passagers en provenance de certains pays, afin de limiter la propagation de nouveaux variants, ce n’est pas le cas de l’Ecosse qui impose cette mesure à tous les voyageurs (*), y compris, donc, à ceux venant de France.
Annoncée mardi 9 février, la mesure préoccupe certains Français d’Ecosse, rentrés pour “raisons impérieuses”. A l’instar d’Erika (**), dans l’Hexagone à cause d’un décès dans sa famille, qui a paniqué – “je ne peux pas me permettre de payer ces frais d’hôtel qui sont disproportionnés” – et a imaginé revenir en urgence en Ecosse. Avant de se raviser et de voir l’évolution des choses.
Actuellement en “furlough”, au chômage partiel, la jeune femme souhaiterait idéalement rentrer en avril, moment où son travail, “dans l’aviation”, pourrait reprendre. Et ne sait pas encore quoi faire, n’étant malgré tout pas sûre du tout de pouvoir bénéficier d’une “exemption” à la quarantaine. La Française s’inquiète aussi de passer trop de temps à l’extérieur du Royaume-Uni en raison de son “pre-settled status”.
Egalement en France pour “motif familial impérieux”, Julie pense elle rentrer en Ecosse à la fin du mois mais en passant éventuellement par l’Angleterre… Car l’Ecosse n’ayant pour le moment pas réussi à rallier Westminster à sa cause, la quarantaine à l’hôtel ne concerne pour l’heure que les personnes atterrissant directement en Ecosse. Et non les passagers arrivant d’un autre point du Royaume-Uni (tant qu’ils n’ont pas été dans un pays à “risques aigus”, ce qui n’est pas le cas de la France) qui peuvent encore “s’auto-isoler” à domicile.
Un état de fait qui pourrait ne pas durer. Ce dont a parfaitement conscience Julie qui envisage aussi – outre un vol en avion jusqu’à Londres puis un trajet en train jusqu’à Glasgow – de devoir faire une quarantaine en Angleterre chez un ami, si jamais les choses venaient à se compliquer.
Une situation loin d’être idéale, la jeune femme en convient… Mais Julie ne se voit pas non plus rester trop longtemps chez ses proches en France. Quant à la quarantaine à l’hôtel, il lui paraît peu imaginable de payer un tel montant, “exorbitant”. Et qu’elle juge injuste pour ceux qui ont des “cas de force majeure de nature familiale” qui ne font pas partie des “exemptions” des autorités écossaises.
Kévin, lui, se trouve en Ecosse. Et doit voyager outre-Manche, fin février, pour des tests en rapport avec ses études. Le jeune homme pensait ensuite retourner en Ecosse (au cas où son admission dans des écoles françaises lui soit refusée) mais, jugeant la chose désormais compliquée, il a abandonné l’idée et déménage maintenant carrément pour la France. Il dit regretter que le gouvernement écossais ne prenne davantage en compte certaines situations tout en comprenant aussi l’inquiétude liée aux variants. De son côté, Cécile avait prévu d’aller en France voir sa mère, qui a d’importants problèmes de santé. Mais y a renoncé, en fin de semaine dernière, devant la confusion régnant autour de la mesure… Et se dit bien sûr “en colère” d’une telle situation.
“La politique de l’Ecosse suit les recommandations de santé publique de quasiment tous les experts”, indique Assa Samaké-Roman, journaliste française à Edimbourg. Car si des restrictions ne sont pas imposées à tous les voyageurs, “trop de failles permettent aux gens venant de pays à risques de réussir à contourner cette mesure”.
Pour Assa Samaké-Roman, la question ne concerne donc pas tant le fait de devoir s’isoler que “le coût et l’impact” que cela peut avoir sur les ressortissants étrangers qui ont aussi besoin de voyager hors du pays pour aller voir leur famille. “Les gens ici ont la perspective de revoir leurs proches dans pas trop longtemps, ça motive à faire des sacrifices. Mais, pour nous, qui sommes immigrés, peut-on espérer revoir nos familles dans l’année ?” L’approche financière devrait être revue, estime la journaliste. “Autant la quarantaine est une décision de santé publique qu’on ne remet pas en question, autant faire payer 1700 livres aux gens sans chercher de solution pour que ce soit plus abordable est une décision politique qui met les immigrés en désavantage.”
L’Ecosse avait toutefois évoqué la mise en place d’un fond, le “Managed Isolation Welfare Fund”, pour ceux “qui n’auraient pas les moyens de payer”. Mais les détails n’ont pas encore été précisés.
————————————————
(*) A l’exception des personnes venues de la zone dite “CTA” (la “Common Travel Area”, qui comprend les autres nations du Royaume-Uni, l’Irlande, l’île de Man, les îles anglo-normandes
(**) Les noms des personnes n’ont pas été précisés afin de protéger leur anonymat