Niché dans une petite rue pittoresque de Hampstead, un théâtre pas comme les autres a pointé le bout de son nez il y a près de six mois : The Well Walk Theatre. Avec ses spectacles de marionnettes à l’univers enchanteur, ce lieu est rapidement devenu une adresse incontournable pour les familles et amateurs d’histoires intemporelles. Les gérants Zina Drouche, Dylan McNeil et Marina Turmo se cachent derrière cette aventure artistique hors du commun.
L’aventure commence avec Zina Drouche et Dylan McNeil, un couple français animé par une passion commune pour le théâtre et les arts visuels. « Quand nous sommes arrivés à Londres il y a 15 ans, je n’ai jamais retrouvé le même niveau de travail qu’à Paris alors je me suis dit que s’il fallait recommencer à zéro, je ferais autre chose », confie l’ancienne costumière pour une compagnie de théâtre à Paris.
En plus de cette effervescence artistique manquante, le couple explique que pour un quartier comme Hampstead, très familial, il n’y avait pas de lieu pour « faire rêver les enfants ». Zina Drouche décide alors de réaliser des spectacles de marionnettes improvisés dans leur salon pour leurs enfants et amis. « J’ai senti que j’avais quelque chose d’assez magique parce que la réaction des enfants était instantanée ». L’engouement était tel que les Français poursuivent l’expérience dans les rues et les boutiques du quartier. « À un moment, on s’est dit que plutôt que d’avoir ce théâtre itinérant, ça vaudrait le coup d’ouvrir le nôtre », explique Dylan McNeil.
En parallèle de cette idée grandissante, Zina Drouche rencontre Marina Turmo, vendeuse, lors d’une de ses prestations dans un café. Les deux femmes se lient d’amitié et l’Espagnole prend rapidement part au projet auquel elle apporte désormais ses talents d’illustratrice, de comédienne et de graphisme. Finalement, par un heureux hasard, un petit local s’est retrouvé en vente dans leur quartier quelques temps après et il ne leur en fallait pas plus pour sauter le pas.
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Le nom “The Well Walk Theatre” s’impose naturellement, en hommage à la rue historique et au local, ancienne épicerie qui portait le nom de Well Walk Pottery. « On voulait montrer aux voisins qu’on respectait leur identité et leur tradition », souligne Marina Turmo. Finalement, après de longues rénovations et une direction artistique pensée de la porte d’entrée jusqu’au rideau de la scène, le lieu ouvre en septembre 2024.
Ce qui fait la particularité du lieu, c’est son atmosphère unique : un petit espace de 50 places, conçu comme une fabrique de rêves où petits et grands se retrouvent. L’esthétique du lieu évoque les contes d’antan, avec une librairie « rétro » et « nostalgique », un café fait maison et un escalier menant à un théâtre souterrain, comme s’il avait traversé les âges. « Avec ce petit théâtre en coin, le lieu est déjà magique avant même de voir le spectacle », explique Zina Drouche.
Si le théâtre propose également des projections de Charlie Chaplin ou encore des spectacles de magie, leur spécificité est le spectacle de marionnettes. Pour la Française, ce sont « des bouts de papiers qui permettent de faire passer beaucoup d’émotions ». Durant le spectacle, Marina Turmo toute vêtue de rouge sert de lien entre le public et les personnages, tout en restant muette. Zina Drouche, elle, placée derrière le castelet anime les différentes marionnettes en interprétant leurs voix. « Le décor et la musique accompagnant le spectacle permettent d’autant plus d’émerveiller, de faire rire et même parfois de faire peur ».
Même si les thèmes des histoires peuvent différer, on y retrouve toujours les deux personnages principaux : Petit Pierre et Gédéon. Deux épiciers français qui sont à la recherche de voyages et d’aventures au cours desquels ils rencontreront le roi d’Angleterre ou même la grand-mère du co-fondateur Dylan McNeil.
Si le public principal est familial, les représentations ne sont pas réservées qu’aux enfants. « Nous avons parfois un groupe de cinq adultes pour un nourisson qui vient pour le spectacle, nous avons imaginé les histoires, les décors et les interactions pour que ce soit adapté à tous », explique le Français. De plus, le spectacle se pousuit souvent par des discussions au café du théâtre entre le public et les gérants. Les représentations en anglais ont lieu chaque week-end et pendant les vacances scolaires. Le prix des billets est fixé à £15 et chaque spectacle dure entre 30 et 45 minutes, un format idéal pour capter l’attention des plus jeunes sans les lasser.
Si son ouverture est récente, le théâtre a déjà gagné le prix de « Theatre Building of the Year », par The Stage Awards récompensant les salles les plus récentes ou nouvellement réaménagées du Royaume-Uni au cours des 12 derniers mois.
Alors que les propriétaires n’avaient fait aucune communication autour de l’ouverture, l’enthousiasme du public et le bouche-à-oreille ont rapidement fait du Well Walk Theatre un succès. « On est petits, mais on est différents. C’est pour ça qu’on est aussi populaires », ajoute Dylan McNeil. Marina Turmo explique également qu’ils étaient déjà très contents d’avoir été nominés. « Les autres théâtres en jeu étaient beaucoup plus imposants alors ce prix est une vraie reconnaissance de notre démarche artistique », se réjouit quant à elle Zina Drouche.
De plus, le théâtre a franchi la barre des 100 représentations le week-end dernier, toutes à guichet fermé, encore une preuve de cette réussite fulgurante.
Loin de s’arrêter en si bon chemin, l’équipe du Well Walk Theatre fourmille d’idées pour la suite. Parmi leurs projets à venir, le lancement d’ateliers de fabrications de marionnettes dans leur atelier. En effet, tous les décors et objets utilisés dans leurs spectacles sont faits main dans leur atelier situé non loin du théâtre. De plus, ils ont pour projet l’organisation de spectacles à la fois pour les anniversaires et les écoles mais aussi en français le mercredi.
Enfin, Zina Drouche, Dylan McNeil et Marina Turmo veulent faire de leur espace un lieu « anti-Brexit » grâce à une programmation plus riche avec des artistes internationaux. « Depuis la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, il est difficile de faire venir des artistes d’autres pays, ça coûte plus cher pour tout le monde », explique l’interprète des marionnettes, qui au-delà des spectacles, aime découvrir des talents et surtout faire fleurir chez les gens leurs arts.
Avec son approche artisanale, son accessibilité et sa dimension poétique, le Well Walk Theatre a su créer un véritable écrin de magie. Un lieu qui prouve que l’art du spectacle peut encore surprendre, émerveiller et surtout rassembler. Si leurs futurs projets sont ambitieux, ils ne sont pas pour autant démesurés et restent dans l’atmosphère du petit théâtre artisanal. « On veut que ça marche mais ce n’est pas commercial. On est une compagnie de théâtre et on a la chance d’être propriétaires », conclut Zina Drouche.