Gilles Quillot est arrivé comme pâtissier à la Résidence de France à Londres en septembre 1997. “Mais j’ai posé ma démission deux semaines après”, se souvient-il. L’Ambassadeur de l’époque le retient et lui promet qu’il pourra reprendre les rênes de la cuisine quelques mois plus tard. C’est ainsi qu’en juin 1998, Gilles Quillot devient le chef attitré de l’Ambassade de France.
Il n’aurait certainement jamais imaginé un tel parcours quand, du haut de ses 10 ans, il avait choisi ce métier. “La passion de la cuisine est venue très tôt. En réalité, petit, je voulais être agriculteur, puis boulanger et finalement, après ma troisième, je suis allé à Saint-Quentin-en-Yvelines, près de Paris, dans le cadre de mon brevet de technicien hôtelier”, confie le Lorrain de naissance, mais Normand d’adoption.
Après cette première année, il décroche un stage à La Grange, le restaurant d’André Chenu à Royan, en Charente-Maritime. Un lien professionnel entre les deux hommes se crée. Après sa seconde année, une expérience au Royal à Deauville et au Juana – fief d’Alain Ducasse -, le chef de La Grange rappelle Gilles Quillot et lui propose de venir travailler avec lui : ce sera une saison à Royan et une saison à St Barths, dans les Caraïbes. Il n’hésite pas une seconde.
A la fin de cette collaboration, il multiplie les expériences entre Strasbourg et Lyon, tout en faisant des allers-retours du côté de Royan. “André Chenu ouvrait son restaurant à Poitiers et il m’a proposé de l’aider”. Gilles Quillot y va, puis une nouvelle offre se présente à lui : partir comme pâtissier pendant un peu plus d’un an au Colorado dans un établissement situé à près de 3 000 mètres d’altitude.
Après cette expérience américaine, le Français retourne au pays, où son service militaire l’attend. Il est débarqué à la Tour-Maubourg à Paris, où il est chef de “La Popote”, où déjeunent le ministre de la Défense et les généraux. Gilles Quillot rencontre alors le Commandant Albert, futur intendant du président Jacques Chirac. “A la fin de mon service, je suis allé le voir pour lui expliquer que travailler comme chef dans une ambassade m’intéressait beaucoup. Il m’a alors répondu qu’il n’y avait pas de place, j’ai donc tourné les talons et je suis parti”.
Quelques instants plus tard, le téléphone sonne et Gilles Quillot se voit offrir un poste de pâtissier à la Résidence de France à Londres. “Au départ, j’ai dit non, puis j’ai vite changé d’avis”. 20 ans plus tard, il ne regrette pas son choix. “Je n’ai pas vu le temps passé, j’ai l’impression que c’était hier”.
Pas le temps de s’ennuyer, assure-t-il. “A chaque fois que l’ambassadeur change, je change forcément ma manière de travailler. Il y a un temps d’adaptation, parfois des doutes, mais ce poste est intéressant. En plus, j’ai toujours eu carte blanche et j’ai beaucoup de chance avec l’actuel ambassadeur (Jean-Pierre Jouyet, NDLR) qui s’intéresse à ce que l’on fait en cuisine”.
Au total, ils sont trois personnes qui sont derrière les fourneaux, et pas seulement des Français. “Mon nouveau sous-chef, qui vient d’arriver, est écossais”. Et dans les cuisines, tout le monde retrousse les manches, même Gilles Quillot. “Ce n’est pas le mythe du chef avec sa toque et sa veste. Je nettoie, je frotte le sol, je fais la plonge. Mais je n’ai pas de problème avec ça”.
Les plats qu’il propose à l’ambassadeur se font à l’instinct, mais surtout selon les produits de saison. “J’essaye bien évidemment de valoriser l’agriculture française, notamment en privilégiant la viande et la volaille de France, mais je travaille aussi avec des produits locaux”.
Gilles Quillot aime aussi partager les plaisirs culinaires via différentes opérations, en particulier avec les associations caritatives. Mercredi 21 mars, il participera à Goût de France, événement qui célèbre dans le monde la gastronomie française, et élaborera le plat lors du dîner de gala à la Résidence de France. “Le défi est de servir entrée, plat, dessert à moins de £10 par personne. C’est pour montrer que la cuisine française, ce n’est pas que des produits luxe, mais des bons produits bons de l’agriculture raisonnée. Avec un petit coup de patte, on peut faire du bon et pas cher. D’ailleurs, on a réussi à inclure le fromage !”, se félicite Gilles Quillot.
Le chef Raymond Blanc s’occupera de l’entrée et le dessert sera assuré par l’équipe britannique de la coupe du monde de pâtisserie qui se tiendra en 2019 à Lyon. “Ce rendez-vous est pour moi important, car l’idée est de partager nos savoir-faire”.
Le Français a également donné des masterclass à Londres pour The Clink, une association permettant la réhabilitation de prisonniers. Une expérience intéressante, car “ils étaient vraiment motivés et enthousiastes”. Gilles Quillot donne aussi de son temps aux écoles en s’alliant avec l’association “Chefs adopt a school”. L’objectif : éduquer les enfants au bon goût. Il est ainsi intervenu avec l’épouse de l’ambassadeur dans une école anglaise pour enfants autistes à Croydon, dans le sud-est de Londres. “La prochaine session aura lieu début avril avec des enfants malvoyants” dans un établissement dans le nord de la capitale.