“Je veux rendre la saucisse tendance”, affirme Guillaume Desmurs. Ce Français installé à Londres depuis huit ans vient d’ouvrir son restaurant Flying Frenchman Canteen à mi-chemin entre Highbury et Stoke Newington. Après tenu plusieurs établissements en France, voyagé dans le monde, sa passion pour la saucisse est née à l’autre bout de la Terre : en Nouvelle-Zélande. Aujourd’hui, il propose au sein de sa cantine des burgers à base de sa spécialité à laquelle il espère ainsi convertir le plus grand nombre.
Oubliez tous vos préjugés – si vous en aviez – car chez Flying Frenchman, c’est tout sauf ce que vous imaginez ! “On a tous en tête la saucisse faite de restes, mais si on prend de bons morceaux de viande et qu’on prépare bien le tout avec des assaisonnements de qualité, ça change tout”. Pour Guillaume Desmurs, ce met offre en effet de vastes possibilités tant sur la cuisson que sur les mélanges à faire. Lui le propose coupée en lamelle pour ressembler à un steak et y ajoute des épices qu’il moud lui-même ainsi que des légumes. Tout cela avant de le cuire sans contact direct avec la flamme… ce qui lui donnerait son goût si original.
Le Français en est certain : la saucisse a tout pour détrôner le burger dans le cœur des gastronomes, et est même en passe de le faire car “la population mange de moins en moins de bœuf” pour des raisons de santé mais aussi environnementales. Cela tombe bien car lui n’utilise pas cette viande dans la confection de ses saucisses. Il se fournit auprès d’un éleveur britannique installé dans le Yorkshire où il s’approvisionne en porc, poulet ou gibier. Mais les végétariens et les végans pourront aussi trouver leur bonheur sur la carte de cette cantine hors norme. Côté boisson, sa cantine propose du vin à la pression ou naturel ainsi que de la bière artisanale.
Cette passion du bon goût et des produits sourcés, il l’a acquis tout au long de sa carrière, mais surtout auprès de ses parents. La cuisine, il est en effet tombé dedans quand il était petit. “Ma mère avait un restaurant et mon père un club de jazz”, explique Guillaume Desmurs. Mais au moment de choisir sa voie professionnelle, le Parisien préfère d’autres sillons. Il enchaînera pendant près de cinq ans différents jobs, comme assistant réalisateur en publicité, organisateur de défilés de mode… Puis il décide de tout plaquer, direction l’Afrique de l’ouest. “J’y suis resté un an et demi”. De quoi le faire réfléchir car en rentrant à Paris, il se rend vite compte que la gastronomie lui colle à la peau.
Alors, pour décrocher un job, il tape aux portes. En à peine deux petites heures de recherche, il est embauché comme serveur dans un restaurant tenu par des Auvergnats aux Halles. “C’était un restaurant à l’ancienne”, se souvient le Flying Frenchman. Là, il y apprend la rigueur, une qualité qu’il mettra ensuite à son propre service quand il gérera quelques années après un bistrot à Saint-Germain-en-Laye. Le rachat, plus tard, avec d’autres associés d’un grand restaurant au bord de la Seine à Boulogne lui fera prendre conscience que ce type de restauration ne lui convient pas. “J’étais passé d’un bistrot avec 35 couverts à la gestion d’un établissement avec 10 employés. Ce n’était définitivement pas mon truc”.
En 1999, il travaille ensuite avec des amis dans un bistronome, où il découvre pour la première fois les vins nature. “C’était une autre manière de faire, on collaborait avec les meilleurs artisans de la ville”. Mais cela ne l’empêche pas deux ans plus tard de quitter à nouveau la France pour la Nouvelle-Zélande pour… y faire du vélo. “J’avais beaucoup travaillé, j’étais fatigué”, se justifie Guillaume Desmurs. Il se donne alors deux années pour profiter un peu plus de la vie, mais une semaine après son arrivée, il rencontre un Français, qui venait de racheter un deli dans la ville de Davenport. “Il m’a demandé de l’aider à préparer des terrines”. Mais le Français va surtout se mettre à faire des saucisses. “J’avais à disposition les meilleures viandes, que je hâchais gros et où je ne rajoutais ni farine, ni conservateur ou produit chimique”. Ses saucisses font tellement fureur, qu’il décide de créer sa propre marque, L’Authentique.
Cinq ans plus tard, il a 20 employés et deux sites de production, il crée de multiples recettes qui lui valent plusieurs récompenses de la presse ou des professionnels de la viande. Parallèlement, il rencontre sa future épouse et fonde sa famille. “Mais quand tout roule, c’est là que je commence à m’ennuyer”, confesse-t-il. C’est pourquoi, les Desmurs font leurs valises et s’envole vers Dubaï. S’il pensait réussir aussi à imposer ses saucisses dans le pays, il va vite déchanter. “J’ai étudié avec un ami la possibilité de créer une structure de production pour fournir tous les hôtels mais visiblement ils n’étaient pas intéressés”, rit-il. Mais il ne regrette pas cette expérience, qui lui apprend comment les grands groupes fonctionnaient.
Décidé à rebondir, Guillaume Desmurs et sa famille s’installent finalement à Londres. “Si l’on construit un projet en France, il a peu de chance de dépasser les frontières. Ici, il y a une ouverture sur le monde immédiate”. Arrivé dans la capitale anglaise, le Français va encore faire une rencontre déterminante, celle avec le patron du restaurant argentin Gaucho. Ce dernier goûte ses saucisses et lui demande alors de travailler pour lui. Parallèlement, le Français réfléchit à un projet plus personnel. “En arrivant, j’avais déposé la marque Flying Frenchman pour me laisser un champs des possibles, car je ne voulais pas me restreindre à un type d’activité”.
Guillaume Desmurs tente d’abord de proposer ses saucisses sur les marchés de street-food. Mais ça coince. “On voulait bien que je vende des terrines mais pas de saucisses”, s’étonne encore le restaurateur. Qu’à cela ne tienne, il ouvrira donc sa propre cantine en août dernier. L’établissement, reconnaissable à sa rotonde, connaît déjà un beau succès. “Ma seule préoccupation est de servir des bons plats à des bons prix”, commente Guillaume Desmurs. Flying Frenchman Canteen se veut aussi un lieu convivial, c’est pourquoi le Français organise, en prévision du Brexit et de la fin du Dry January, une grande soirée vendredi 31 janvier. Au menu : saucisses et bon vin…