C’est après avoir entendu mi-mars à la radio l’interview d’un médecin urgentiste londonien qu’Edouard de Guitaut a décidé d’agir. “Après avoir confié son inquiétude sur la vague de patients qui allait arriver, il a expliqué que ce serait bien que le personnel médical puisse reprendre des forces autour d’un café”, se souvient le Français. Car le NHS face face à un problème depuis plusieurs années : la plupart des services hospitaliers n’ont souvent à disposition, dans leur salle de repos ou dans un local de leur unité, qu’une bouilloire et un pot de café lyophilisé financé par le personnel lui-même. Une idée lui vient alors en tête : pourquoi ne pas en offrir une machine à café aux deux établissements hospitaliers situés près de chez lui ? Dès le lendemain, il les appelle pour leur demander quels sont leurs besoins. Edouard de Guitaut fait alors livrer dans la foulée une machine expresso au Westminster Hospital. Pour l’hôpital de Charing Cross, ce sont 14 machines qui sont offertes, grâce à un collecte de £1.500 auprès de ses amis.
Le Français souhaitant aller plus loin, il décide alors de lancer un appel, le NHS Coffee Appeal, auprès du plus grand nombre. “Il existe 20.000 lits à Londres, sans compter ceux qui ont été ouverts pour faire face à l’épidémie”, commente-t-il, “cela représente environ 2.000 services”. Soit autant qui manquent de machine à café. Mais Edouard de Guitaut ne veut en aucun cas créer une levée de fonds, mais plutôt inciter la population à se mobiliser elle-même. “Une machine expresso coûte entre £70 et £100, soit le prix d’une sortie à Londres, et elle peut faire toute la différence pour le personnel”, analyse le chef d’entreprise, “tous les jeudis les gens applaudissent pour soutenir les soignants, alors pourquoi ne pas continuer le mouvement en transformant concrètement ce soutien”.
Pour lancer ce NHS Coffee Appeal, il crée avec des amis une page internet, où les internautes peuvent retrouver la liste des hôpitaux ou trusts hospitaliers de Londres qui sont en demande. Une vingtaine est actuellement référencée. Et l’appel a déjà été largement entendu puisque sur les 700 services recensés sur le site, 300 ont déjà été fournis en machines expresso. “90% des donations ont été faites grâce à des Français”, se réjouit Edouard de Guitaut, “je crois que c’est une belle reconnaissance de la communauté française envers le personnel soignant britannique”. 60 machines et deux tonnes de capsules ont aussi été offertes, par l’intermédiaire d’une Française, par deux entreprises italienne et autrichienne spécialisées dans le café.
Mais il reste encore de nombreux établissements hospitaliers demandeurs. “A Londres tout d’abord”, précise Edouard de Guitaut, “mais pas seulement dans le centre de la capitale. Il ne faut pas oublier les autres” et notamment ceux dans des quartiers moins favorisés. D’autres villes d’Angleterre, comme Manchester, ont par ailleurs eu vent de cet appel et ont également fait part de leurs besoins. “Si un tel mouvement pouvait aussi se créer dans tout le Royaume-Uni, ce serait une excellente chose”. Car, rappelle le co-fondateur du NHS Coffee Appeal, les besoins ne sont pas seulement liés à l’épidémie de coronavirus. “Certains services comme ceux des soins intensifs, de gériatrie ou encore de pédiatrie vont continuer à tourner et vont même être submergés après la crise”, estime le Français, qui relance son appel tant auprès des particuliers que des entreprises.