“Furlough”, confinement, perte d’emploi… les raisons d’un retour temporaire en France ont été (et sont peut-être encore) nombreuses, pour certains, avec la Covid. Mais ces situations peuvent être délicates, notamment pour des personnes n’ayant encore que le “pre-settled status”, statut qui autorise un nombre de jours d’absence du territoire britannique limité. Si les règles ont été un peu adaptées fin 2020, elles demeurent très restrictives.
Dans le cadre du Brexit, les Européens souhaitant continuer à vivre au Royaume-Uni peuvent acquérir un “settled status” (“résident permanent”), leur permettant de rester autant de temps qu’ils le souhaitent. Pour l’obtenir, toutefois, cinq ans de “résidence en continu” sont nécessaires. Ce qui signifie que les personnes intéressées – ayant donc, pour beaucoup, un statut temporaire, de “pre-settled” – ne peuvent s’absenter du Royaume-Uni plus de six mois par an durant cinq années consécutives.
Des absences sont normalement tolérées, mais essentiellement en cas de “raison importante”, – “par exemple, la naissance d’un enfant, une maladie grave, les études, une formation ou une mutation à l’étranger” – et ne peuvent excéder 12 mois. Une seule absence durant les 5 ans est par ailleurs autorisée.
Avec la crise, le Home Office a rajouté la Covid à la liste des “raisons importantes”, mais de façon assez limitée. Publiée en décembre 2020, la “guidance” évoque surtout des cas de personnes malades, en quarantaine ou en isolement parce qu’elles partagent le domicile de personnes infectées à la Covid qui, ayant été contraintes de rester dans le pays où elles se trouvaient, ont dépassé les 6 mois.
Les absences liées au coronavirus ne peuvent, là non plus, excéder 1 an et ne sont tolérées qu’une fois. Enfin, il est demandé de fournir une “supporting letter”, lors du dépôt de sa demande pour le “settled”, laquelle doit comporter “détails et dates auxquelles vous étiez malade ou en quarantaine”.
Sont également évoqués les étudiants, pour lesquels il est indiqué que “s’ils étudient actuellement en-dehors du pays à cause du coronavirus”, cette absence (jusqu’à 12 mois) ne devrait pas “entraîner de rupture de leur ‘période qualifiante’”. A noter que le fait de ne plus avoir eu de cours en présentiel pourrait ne pas suffire à justifier l’absence. C’est en tout cas ce qu’indique Christopher Benn, avocat de l’immigration chez Seraphus Solicitors. “Le Home Office semble aussi exiger une raison liée à la Covid, en plus de l’explication selon laquelle les cours ont été transposés sur Internet.”
Est aussi mentionné, brièvement, le cas d’individus qui se seraient vu imposer des “restrictions de voyage”. Pour Christopher Benn, cela pourrait s’appliquer à des personnes qui l’avaient contacté parce qu’elles avaient été bloquées en Russie, en début de pandémie. “La Russie avait fermé ses voyages internationaux. Ils ne pouvaient pas partir.” La chose, toutefois, n’est pas évidente car les directives ne sont pas détaillées (*).
Pour l’avocat, qui a écrit un article sur le sujet, le principal problème reste que de nombreuses situations ne sont pas abordées. Comme lorsque “le citoyen a fait un choix conscient de rester à l’étranger pour des raisons économiques, parce qu’il voulait être plus près de sa famille ou parce qu’il considérait le risque pour sa santé plus important au Royaume-Uni”.
Jugeant le dispositif “décevant” et ne reflétant pas assez la réalité de ce que peuvent vivre les gens dans une pandémie, il conseille de respecter autant que possible les 6 mois, tout en encourageant, malgré tout, ceux les ayant dépassés à faire valoir leurs raisons (et donc à conserver les documents justifiant leur absence prolongée), même si elles ne sont pas “explicitement dans la ‘guidance’”.
De son côté, le ministère de l’Intérieur britannique insiste sur le “succès” de l’EU Settlement Scheme (lequel a reçu, à ce jour, “plus de 5 millions de candidatures”) et précise qu’il “cherche toujours des raisons d’accorder un statut, pas de le refuser”.
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(*) Répondant, par exemple, aux sollicitations de French Morning London sur la question de savoir si les réglementations entourant les quarantaines à l’hôtel (£1750 les dix jours à la charge du voyageur) récemment mises en place par l’Angleterre pour certains pays, dont le Portugal qui se trouve dans l’UE, pourraient être perçues comme des “restrictions de voyage” (la chose inquiétait aussi certains Français d’Ecosse), un porte-parole du Home Office a indiqué de manière assez large : “Nous savons que la pandémie a eu un impact sur la capacité de beaucoup de gens à voyager, et c’est pourquoi nous avons été clairs envers toutes les personnes ayant un ‘pre-settled status’ que leur ‘résidence en continu’ ne serait pas affectée dans des cas où elles auraient dû être absentes du Royaume-Uni pour une seule période allant jusqu’à 12 mois, pour des raisons liées à la maladie ou des mesures de quarantaine dues à la Covid-19”.
L’organisation the3million, qui cherche à protéger les droits des Européens au Royaume-Uni, a aussi mis en place un outil permettant de mieux comptabiliser ses absences du pays.