“J’ai eu une prise de conscience : je veux que mes projets aient un réel impact. La simple idée de devenir un développeur dans le futur sans avoir laissé ma trace m’a inquiété, alors je me suis posé la question : que puis-je faire ?”, raconte Bastien Saidi, co-fondateur français de Brigaidnet, aux côtés de son camarade irlandais Abutalha Alam. Tous deux âgés de 19 ans et étudiants à l’University College Dublin, ces jeunes entrepreneurs ont conçu une solution innovante répondant aux besoins de 2,6 milliards de personnes dans le monde en matière de télécommunications. Leur projet a été distingué de plusieurs prix – le dernier datant de début avril – pour son impact significatif et son potentiel prometteur.
Après avoir terminé son école primaire en France, Bastien Saidi a déménagé une première fois à Londres en raison de la carrière professionnelle de ses parents, puis une seconde fois à Dublin. C’est d’ailleurs grâce au poste de son père chez Microsoft que le jeune entrepreneur a découvert son intérêt pour l’informatique. “Mes parents m’ont souvent amené à leur bureau. Un jour, mon père m’a proposé de m’apprendre les bases de l’informatique”, explique-t-il. Cette initiation a éveillé en lui une passion, mais il a rapidement compris que l’informatique représentait bien plus que cela : c’était une source de reconnaissance et de fierté.
En s’installant avec sa famille à Dublin, Bastien Saidi quitte le système éducatif britannique pour intégrer le lycée français. Parallèlement à ses études, il remporte son premier prix à seulement 12 ans lors d’un Hackathon, un marathon de programmation où des développeurs se rassemblent pour collaborer sur des projets informatiques. Puis, il continue tout au long de son adolescence à participer à des compétitions. En 2023, une reconnaissance particulière vient marquer son parcours : à l’âge de 18 ans, il remporte les Academic Awards de l’IOE. Ce jalon lui a fait réaliser qu’il est désormais le participant le plus expérimenté, mais il en a également tiré une leçon importante : “ce qui compte le plus n’est pas tant d’avoir des connaissances que de créer un retentissement à travers ses projets”.
Par la suite, il rejoint l’University College de Dublin, où il découvre les multiples opportunités offertes aux étudiants grâce aux partenariats avec des start-ups et à la présence d’incubateurs. “NovaUCD, l’incubateur de mon université, a levé plus de 1,3 milliard d’euros ces dernières années”, précise Bastien Saidi. Cependant, cette ouverture s’accompagne d’attentes élevées pour les étudiants quant à leur avenir. “Nous sommes à l’université seulement pendant quatre à six ans, nous devons vraiment en tirer le meilleur parti. Il y a donc une certaine pression car en sortant de nos études, soit nous avons déjà accompli quelque chose, soit il faudra se débrouiller”, confie-t-il. Cette angoisse est toutefois contrebalancée par l’ambiance stimulante et collaborative de l’University College de Dublin.
C’est d’ailleurs au sein de cet environnement universitaire que Bastien Saidi rencontre son associé, Abutalha Alam. Ce dernier s’est distingué en créant un détecteur de langage des signes pour son frère autiste. À côté de leurs études, les deux étudiants se lancent dans des projets dans le but de se faire remarquer lors de compétitions universitaires. Spécialisé davantage dans l’entrepreneuriat, Abutalha Alam a invité le Français à le rejoindre sur l’une de ses idées en raison de ses compétences techniques.
Ainsi, leur parcours débute avec l’ambition de développer une plateforme éducative utilisant l’intelligence artificielle. Par la suite, ils changent plusieurs fois de direction et insatisfaits des précédentes idées, ils décident d’examiner les projets gagnants lors des compétitions universitaires. Le Français se souvient, par exemple, d’une école qui a réussi à récolter des millions d’euros afin de bâtir toute une infrastructure le long du Nil. “Face à ces expériences, nous voulions réaliser ce genre d’impact. Il fallait trouver une bonne histoire et créer un produit qui touche le plus de monde possible”, se remémore Bastien Saidi.
Pour dénicher cette “bonne histoire”, ils ont consulté la liste des Objectifs de Développement Durable de l’ONU pour identifier les problèmes majeurs existants. C’est ainsi qu’ils ont porté leur attention sur le domaine des télécommunications, ce qui les a conduits à leur idée finale : Brigaidnet.
Le projet Brigaidnet a vu le jour suite à la réalisation que les infrastructures classiques de télécommunication sont trop coûteuses, dépassant les 300,000€, en raison “de la priorisation des désirs sur les besoins”, selon Bastien Saidi. Leur solution consiste donc à concevoir une nouvelle infrastructure simplifiée et beaucoup moins coûteuse, offrant à la population un accès aux services de télécommunication essentiels. Ces nouvelles infrastructures prennent la forme de petits boîtiers installés à différents endroits, établissant ainsi un réseau interconnecté sur toute la zone couverte. Les habitants peuvent ensuite utiliser une application, conçue par les entrepreneurs, pour communiquer, se retrouver ou l’utiliser lors de situations d’urgence.
Cette initiative a été distinguée parmi les cinq meilleures au prestigieux concours Enactus du Royaume-Uni, offrant à l’équipe fierté, légitimité et accès à un réseau. Et une fois reconnue par la communauté scientifique, les fondateurs ont pu établir Brigaidnet comme leur première entreprise, à seulement 19 ans. Cela a été rendu possible grâce aux premiers investissements obtenus pendant le concours Enactus. “Beaucoup de personnes nous soutiennent et apprécient notre projet. Des entrepreneurs nous voient comme un reflet d’eux-mêmes lorsqu’ils ont lancé leur propre start-up”, déclare l’étudiant. Concernant la transition vers l’entrepreneuriat à un si jeune âge, les associés reconnaissent devoir apprendre rapidement.
Maintenant que Brigaidnet est une entreprise et qu’elle dispose des financements nécessaires, l’équipe s’apprête à lancer ses premiers tests pilotes au Bangladesh à l’été 2024. Le choix de ce pays repose sur deux raisons principales. Tout d’abord, Abutalha Alam, ayant de la famille originaire du Bangladesh, possède une expérience du terrain précieuse. Ensuite, le Bangladesh est l’un des pays où le taux de couverture en télécommunication est le plus bas, avec seulement 30% du territoire connecté.
En ce qui concerne l’avenir de leur technologie, les fondateurs aspirent à proposer gratuitement leur service aux citoyens des zones non couvertes, et à le commercialiser à un prix minime auprès des ONG. Ils envisagent également de fournir du matériel personnel aux habitants ayant un peu plus de moyens, une option toujours plus économique que l’achat d’une connexion internet annuelle au Bangladesh. En attendant la commercialisation des boîtiers, Bastien Saidi se réjouit déjà du chemin parcouru. “Nous avons entamé cette aventure il y a quatre mois et nous avons accompli bien plus de progrès que ce que j’aurais pu espérer en deux ans.”
Pour soutenir le projet Brigaidnet, il est possible de contacter les fondateurs via leur adresse mail :
– [email protected] (CTO, francais et anglais)
– [email protected] (CEO, anglais seulement)
Ou par linkedin : ici