Partis de France alors que “The Penelopes” commençait à peine à circuler parmi les noms des groupes montants de la pop-électro, Axel Basquiat et Vincent Tremel ont dû “repartir de zéro” en arrivant à Londres. Après avoir couru les pubs, enchaîné les premières-parties et les remixes, le duo achève aujourd’hui la préparation de son troisième album prévu pour l’été 2020. En guise de mise en bouche, le single “Meet me by the gates” a été dévoilé vendredi 25 octobre 2019. Associant la grosse voix d’Axel Basquiat à celle – crue et sensible – d’Isabelle Adjani, ce titre signe un tournant dans la carrière du groupe et le retour de l’actrice dans les studios d’enregistrement.
Conçu comme un dialogue, “Meet me by the gates” aborde toute la complexité d’une rupture amoureuse. Mêlant à la fois la colère la résignation et l’espoir de voir renaître la flamme, le titre se compose comme une “succession d’états d’âme”. A la première écoute se dégage comme une forme de pesanteur matérialisée par un tempo remarquablement lent de 60 battements par minute. “Ça rappelle le temps qui passe”, explique le chanteur Axel Basquiat avant d’ajouter que “ce rythme deux fois plus lent qu’à (son) habitude permet de se focaliser davantage sur le travail autour de la voix”. Cette sensation est en outre renforcée, dans l’écriture, par l’absence de refrain soulignant qu’il “n’y a pas de morale et pas vraiment de conclusion”, d’après Vincent Tremel.
Au départ, la collaboration avec Isabelle Adjani commence par un long email “écrit en toute sincérité”. Un pari sur l’inconnu car les deux Londoniens d’adoption sont bien conscients qu’ils ne sont pas les seuls à convoités la comédienne multi-casquettes. “Isabelle Adjani fait partie de ces grands artistes populaires qu’on aime pour leurs aspérités”, confie Axel Basquiat avant de poursuivre, “c’est une femme avec beaucoup d’esprit qui a construit sa carrière à l’instinct”. Il faut dire que depuis le succès de son album éponyme co-écrit avec Serge Gainsbourg en 1983, la Française a participé à plusieurs projets musicaux. Et maintenant à celui des The Penelopes auquel elle a répondu “oui” sans hésiter. Leur première rencontre à Paris s’opère sur des airs de Lana Del Rey, de Cocteau Twins mais surtout de Leonard Cohen qui a “eu une grosse influence sur la manière d’enregistrer ce titre”, à en croire Axel Basquiat.
Il aura fallu seulement deux jours de travail avec l’actrice pour mettre le projet musical en boîte. “Le premier jour où on est arrivé en studio, c’est là que je me suis dit : ‘Je suis le producteur d’Isabelle Adjani’. C’est drôle que deux petits gars du 93 en viennent à donner des instructions à une telle artiste”, s’étonne encore Axel Basquiat. Mieux encore, la Française a dit avoir été “séduite dès la première écoute”.
Alex Basquiat et Vincent Tremel ont grandi dans le même immeuble de Stains, une ville dortoir de la Seine Saint-Denis. Après avoir “passé leur enfance chez l’un ou chez l’autre”, ils ont également suivi des parcours similaires. Leurs parents respectifs les ont en effet poussés à intégrer un lycée parisien afin de rompre avec la banlieue. Pari réussi, chacun d’eux obtient son baccalauréat scientifique haut la main et rejoint Assas, pour Vincent Tremel, et la faculté de médecine pour Axel Basquiat. “Pour nous, la seule façon de faire de bonnes études était d’aller à la fac”, raconte d’ailleurs le chanteur qui se rappelle, adolescent, vouloir être “étudiant à vie”.
En regardant dans le rétroviseur, les deux acolytes se souviennent de cette enfance passée “dans un quartier très urbain où l’on écoutait du rap alors qu’(eux) étaient un peu de côté” à se remplir les oreilles de Bowie, Gainsbourg ou encore NTM. Au vu de cette playlist, ils admettent volontiers “aimer les personnalités transgressives, rebelles, mais en même temps populaires”.
The Penelopes décolle finalement en 2010 lorsqu’un label indépendant les contacte suite à la mise en ligne d’enregistrements de leurs premiers morceaux. Le point de départ d’un premier album, mais également d’un déclic. “Ça devenait trop sérieux et c’était impossible pour nous de devenir professionnels car on était étudiants”, se rappelle Axel Basquiat.
Au sortir de leurs études, en 2013, le duo se remet à composer à plein temps jusqu’à ce qu’un label londonien ne les approche. Quelques mois plus tard, leur second album sort donc dans les bacs britanniques et leur fait miroiter la perspective d’une carrière outre-Manche. Sauf qu’ici, “il a fallu tout recommencer à zéro”, lâche Axel Basquiat. “Alors qu’en France on commençait à être bien identifiés (notamment dans les médias, ndlr) on est d’un coup retombé dans l’anonymat total”, ajoute-t-il tout en racontant l’épopée des pubs à laquelle ils n’ont pu échapper.
Leur carrière prend finalement un nouveau souffle lorsque le groupe électro-pop The Human League les repère en novembre 2013 pour assurer ses avant-premières. S’en suit une tournée d’un mois dans de grandes salles anglaises.
De retour dans leur “quartier général” de Bethnal Green, les deux hommes se lancent dans des remixes et sont rapidement contactés par de grands noms comme Pet Shop Boys, Lana Del Rey ou encore The Cure. Un succès qui les conforte au passage dans leur attachement pour la scène londonienne. “Ici, les gens essaient de se rencontrer et les grands artistes sont plus ouverts à la nouveauté”, explique Axel Basquiat.
En 2018, tout s’accélère lorsque The Penelopes fait partie de l’affiche du Meltdown (un festival monté de toute pièce par un artiste renommé, ndlr) qui était cette année-là organisé par Robert Smith, le leader du groupe The Cure. Une invitation qui rime alors avec consécration. “Lorsqu’on a reçu la lettre nous demandant de participer au festival on était aux anges”, se remémore Vincent Tremel. La suite reste quant à elle à écrire et sera notamment marquée par la sortie prochaine de trois nouveaux singles, ainsi que des contributions à plusieurs documentaires et longs-métrages européens.