Sommelier de formation, il a suffi de trois ans à Vincent Ilunga pour se faire une place dans la vie culturelle londonienne. D’organisateur de soirées en club à producteur d’artistes, ce “Breton d’adoption” ne s’interdit rien. Et surtout pas de se lancer de nouveaux challenges comme la création de toute pièce d’une exposition éphémère. Dénommé “Made in France”, l’événement se tiendra du mardi 17 au dimanche 22 décembre 2019 à l’Espacio Gallery et regroupera une vaste palette d’artistes francophones allant “du pop-art au street-art et même au-delà”.
Depuis l’adolescence, Vincent Ilunga a cultivé un goût insatiable pour l’art. Une passion qui l’a conduit en 2017 à créer France Connection (FC), une marque pour distinguer les événements culturels qu’il organise – dans la capitale anglaise – à destination notamment du public français. L’exposition “Made in France” constitue donc la “frange artistique de FC”. En tout, ce sont seize artistes francophones émergents qui présenteront leurs travaux aux badauds et aux collectionneurs en quête de nouvelles signatures tricolores, mais aussi belges, caraïbéennes, malgaches ou sénégalaises. “L’idée est de mettre en avant tous les styles à travers la peinture, le dessin ou la photographie par exemple”, résume le curateur de 27 ans. Ainsi, bien que la première salle revête un style relativement “classique”, la seconde abrite des créations plus “osées et recherchées”, inspirées principalement du street art.
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Une publication partagée par By France Connection (@musicartsconnection1) le 5 Nov. 2019 à 12 :24 PST
Courant depuis des années maintenant les galeries nichées aux quatre coins de Londres, Vincent Ilunga mesure l’enjeu que suscite son projet. “Je n’ai jamais organisé d’exposition mais justement le but est d’essayer quelque chose de nouveau”, lâche-t-il. Avant même le vernissage, le jeune homme voit déjà plus loin en envisageant de décliner son concept avec une exposition “Made in London”, organisée cette fois en France dans le courant de l’année 2020, pour faire découvrir des artistes britanniques prometteurs au public tricolore.
Arrivé à Londres en 2014, c’est seulement deux ans plus tard que Vincent Ilunga – alors chef sommelier dans un restaurant de Shoreditch – se lance dans l’organisation d’événements culturels. Tout est parti de la rencontre avec deux libraires à la recherche d’artistes. “A l’époque, je ne savais pas si je voulais chanter moi-même, écrire ou faire des films”, se souvient celui qui s’est finalement “improvisé” producteur de Lous and The Yakuza, une chanteuse belge qu’il venait de découvrir sur SoundCloud. “Le concert s’est super bien passé”, se rappelle-t-il avant de poursuivre, “j’ai eu du nez parce que deux mois plus tard Lous signait avec le label Sony Music”. Suit rapidement un deuxième concert avec une artiste londonienne dont la notoriété a également décollé quelque temps après. Après avoir envisagé de monter son propre label de musique, il opte finalement pour l’organisation de soirées dont le concept restait à définir.
C’est chose faite début 2017 lorsque le rappeur MHD popularise un nouveau genre musical, “l’afro trap”. L’idée du Breton est alors de croiser, le temps d’une soirée, ce style émergeant avec une autre niche emblématique de la musique urbaine comme le hip-hop, l’afrobeat ou le dancehall. “Je pensais que ce serait un succès s’il y avait 150 personnes et au final on en a accueillies 450”, se remémore le natif de Kinshasa qui, fort de son succès, à réitéré l’expérience une fois par mois. En parallèle de ces événements, Vincent Ilunga cherche à attirer de grands noms français sur la scène anglaise. Pari réussi puisque le fondateur de France Connection compte déjà à son actif une quinzaine de concerts dont celui de Dadju, Nisha ou plus récemment Vald qui se produisait à l’O2 Arena le 3 décembre dernier.
Féru de nouvelles idées, Vincent Ilunga a en outre lancé en début d’année “The puriste”, un concept de soirées centrées sur le rap tricolore. “Je veux être un relais pour les artistes français en leur donnant un espace pour se produire”, explique-t-il avant de poursuivre en souriant, “je pense que les seules choses que je n’ai pas faites dans mes événements c’est de mixer et prendre des photos”.
Né à Kinshasa en 1992, Vincent Ilunga a vécu dans la capitale congolaise jusqu’à l’aube de ses dix ans. Après quelques années en Belgique, sa famille s’établit finalement à Rennes – sa “terre d’adoption” – en 2006. A ses 13 ans, c’est en expérimentant la frustration du couche-tôt qu’il se passionne pour le cinéma. “Chez moi je ne voyais jamais la fin des films car je devais aller au lit à 21 heures, donc je l’imaginais dans ma tête”, raconte le jeune homme de 27 ans. Laissant de côté ce “rêve abstrait” de faire carrière dans le cinéma, Vincent Ilunga intègre en 2008 l’école hôtelière de Dinard dont il complète la formation par un BTS en restauration. Lui qui souhaitait alors “savoir manager pour pouvoir ouvrir un hôtel” opte finalement pour une mention complémentaire en sommellerie dont il sort diplômé en 2014.
Sur les conseils d’un représentant du groupe Ducasse, il quitte la Bretagne et passe un an à Londres afin d’améliorer son anglais avec l’idée d’intégrer – à son retour – l’un de leurs prestigieux restaurants. “Au final je ne suis jamais rentré“, s’amuse-t-il. Après avoir décroché un contrat de commis sommelier dans un des établissements londoniens étiquetés Alain Ducasse, il a connu une ascension rapide jusqu’à devenir chef sommelier dans un hôtel-restaurant de Shoreditch. “J’ai découvert que j’aimais vraiment le vin parce que ça évoque une géographie, une culture et donc une histoire”, conclut celui qui travaille toujours à temps partiel dans un bar à vin londonien.