Depuis des semaines maintenant, l’hypothèse d’un non-accord sur le Brexit entre le Royaume-Uni et l’Union européenne revient inlassablement sur la table des négociations qui patinent. Pour faire face à cette éventualité, le gouvernement français a décidé de prendre concrètement les devants. La ministre des Affaires européennes a annoncé mercredi 3 octobre le dépôt d’un projet de loi avec pour objectif de parer les nombreux vides juridiques qu’entraîneraient un tel scénario.
Le texte, qui sera présenté au Parlement début novembre, donnera pouvoir à l’exécutif de légiférer par ordonnances pour régler le casse-tête du Brexit en cas de non-deal. “Le projet de loi liste les domaines sur lesquels nous allons préparer des ordonnances”, a expliqué Nathalie Loiseau, lors de la conférence de presse à Paris, “d’abord, la situation des Français ayant résidé au Royaume-Uni et revenant en France (…), nous devons aussi faire en sorte qu’en cas d’absence d’accord au 30 mars 2019 les Britanniques résidant en France ne se retrouvent pas brutalement en situation irrégulière.”
Avant le conseil des ministres, devant lequel Nathalie Loiseau a présenté ce projet, elle expliquait au micro de Radio Classique que par exemple “la loi portera sur le fait qu’un Français qui a vécu au Royaume-Uni, qui y a eu son diplôme ou qui y a peut-être été au chômage puisse prendre sa retraite en France, faire que son diplôme continue à être reconnu, que ses années de travail au Royaume-Uni continuent également à être reconnues et que ses cotisations puissent être prises en charge en France. S’il y a un accord, c’est automatique, s’il n’y en a pas, il faut une loi française”.
Justement sur le sujet des droits des ressortissants britanniques sur le sol hexagonal, l’Etat a fait savoir que serait appliqué le principe de réciprocité. “Nous sommes très attentifs à la situation et aux droits des ressortissants français vivant au Royaume-Uni. Le gouvernement prendra les mesures appropriées en ce qui concerne la situation des ressortissants britanniques en France. Il tiendra compte du statut accordé par le Royaume-Uni à nos ressortissants. sur son territoire”, a complété Nathalie Loiseau.
Outre la question du retour des Français quittant le Royaume-Uni, des Britanniques vivant en France et de la circulation des personnes, la très longue liste des cas problématiques inclut également la circulation des biens entre les deux pays et notamment du régime douanier d’importation et d’exportation. Objectif : protéger les entreprises. “Cela signifie que nous devons recruter des agents des douanes et cela a déjà commencé”, a déclaré Nathalie Loiseau. En effet, le ministre du Budget, Gérald Darmanin, était en déplacement mardi 2 octobre dans le Pas-de-Calais pour expliquer que les plans actuels du gouvernement prévoyaient d’embaucher 700 agents des douanes supplémentaires dans les trois ans.
Fin août, le Premier ministre, Edouard Philippe, avait par ailleurs déjà réuni les membres de son équipe gouvernementale afin de faire le point sur l’état de préparation dans chaque ministère. Près de 200 mesures avaient ainsi été identifiées, dont une soixantaine d’ordre législatif. Les ordonnances sont donc en cours de préparation, l’objectif étant que les textes soient prêts le moment venu en cas de besoin.
Ces préparatifs ne concerneraient pas seulement la France. “Les autres États de l’UE les mènent également. Les Britanniques, tout autant que nous. Ce n’est un acte de défiance ni par rapport à l’état de la négociation ni par rapport à nos partenaires britanniques, c’est ce que nous devons à nos concitoyens, aux Britanniques qui sont sur notre sol et à nos entreprises”, a assuré la ministre des Affaires européennes.