Avec des centaines projets de construction en cours, Londres fait partie de ces villes où les travaux ne s’arrêtent jamais. Dans cette dense jungle de buildings qui s’élève année après année dans la capitale anglaise, il y en a forcément quelques-uns qui ne sont pas des réussites en termes esthétiques.
C’est ce qu’a d’ailleurs voulu sanctionner le magazine britannique Building Design, en créant la Carbuncle Cup (littéralement Coupe du Furoncle, ndlr) entre 2006 et 2018. Elle récompensait les bâtiments les plus laids ayant été construits dans les douze derniers mois au Royaume-Uni. Malheureusement pour les habitants de Londres, leur ville y est souvent représentée. Pour vous, French Morning London a sélectionné certains de ces “furoncles” architecturaux londoniens qui ont marqué l’histoire de la compétition.
Construite en 2010 dans le sud de Londres, la Strata SE1 a été designée par le cabinet d’architectes britanniques BFLS pour un peu plus de 113 millions de livres sterling. Haute de 148 mètres, elle accueille près de 1.000 résidents logés dans les 408 appartements qui la composent : naturellement, elle est l’un des bâtiments résidentiels les plus hauts de Londres.
Elle remporte la Carbuncle Cup 2010, plébiscitée par le jury qui ne manque de superlatifs à son égard. “Qu’est-ce qui rend la tour Strata de BFLS à Elephant & Castle si pénible ? Parée d’un style de rasoir électrique Philips, la stridence sinistre de l’édifice est exacerbée par ses rayures noires et blanches alternées, configurées, aux allures de codes à barres”. (Crédit photo : Yulia_Bogomolova / Shutterstock.com)
Dans le quartier de Greenwich, ce bâtiment finalisé en 2012 a été construit pour accueillir un hypermarché Tesco et quelques 900 logements. Cependant, très vite, il a suscité les divisions entre les habitants du quartier. Alors président du conseil de planification du conseil municipal de Greenwich, Alex Grant a donné le feu vert au projet en 2007, mais n’a finalement pas été convaincu du résultat. “Je peux regarder avec fierté bon nombre des bâtiments que j’ai approuvés sous ma direction. Mais Woolwich Central n’en fait pas partie”, déclarait-il au Guardian en 2014.
Cette même année, la gigantesque construction s’est distinguée par sa victoire lors de la Carbuncle Cup 2014. Le jury a jugé cet édifice “oppressant, défensif, arrogant et inepte”, avant d’ajouter tristement que “le pire crime du bâtiment est qu’il réduit en cendres les efforts de ceux qui ont travaillé dur pour régénérer ce quartier délabré et défavorisé du sud-est de Londres”.
Imaginé par le cabinet d’architecture BUJ Architects, ce complexe se divise en deux tours résidentielles et un hôtel de luxe. L’édifice de 31 étages a été finalisé en 2016 sur la péninsule d’Isle of Dogs qui accueille aussi Canary Wharf.
Dès sa construction, le potentiel du bâtiment a été repéré par le jury de Building Design qui lui a remis sa Carbuncle Cup annuelle. “Essentiellement, ce bâtiment est l’incarnation architecturale du mal de mer. Lorsqu’on le regarde trop longtemps, ses gaines de verre et d’aluminium coloré, provoquent la nausée, l’inconfort et, si on est vraiment malchanceux, une montée du déjeuner aussi inévitablement que des flaques apparaissant après une tempête de pluie”.
Lancée dès 2011, la construction de Saffron Square s’est terminée cinq ans plus tard, en 2016. Devenue le plus haut bâtiment de Croydon avec ses 134 mètres, elle fait partie du projet de rénovation de la commune du sud de Londres qui a souffert longtemps d’une image mal famée et d’un délaissement dans le développement économique de la capitale anglaise.
Dans une édition 2016 très relevée, Saffron Square faisait partie des nommés de la Carbuncle Cup. “La tour est revêtue de panneaux de bardage colorés disposés verticalement qui donnent à l’ensemble l’aspect d’une création Lego surdimensionnée. Croydon peut prétendre être la Silicon Valley du sud de Londres, mais si elle continue à produire des bâtiments comme celui-ci, l’herbe pourrait bien être plus verte ailleurs”, a commenté le jury.
Dans un quartier de Stratford réhabilité depuis l’arrivée des Jeux Olympiques 2012 sur son site, les constructions vont bon train même des années après la clôture de l’événement planétaire. Après y avoir logé les athlètes, ce sont désormais les étudiants de la capitale qui y trouvent refuge.
C’est à cet effet qu’a été construit le bâtiment “Stratford One” en 2014. Cette année-là, l’œil aiguisé du Building Design l’a repéré et nominé parmi les prétendants à la Carbuncle Cup. Après l’avoir longuement étudié, les membres du jury ne l’ont finalement pas élu mais l’ont vivement critiqué. “Le bâtiment est d’une ampleur intimidante, avec une combinaison confuse de couleurs et d’angles, comme une sorte de piste de ski stalinienne”.
Comme pour son voisin précédent, la tour ArcelorMittal Orbit est née suite à l’attribution des JO d’été à la ville de Londres. Située au cœur du parc olympique Elizabeth II, la structure qui fait office de tour d’observation culmine à 114 mètres de hauteur. Elle est le fruit de la collaboration entre l’artiste britannique Anish Kapoor et l’ingénieur sri-lanko-britannique Cecil Balmond. Au départ non prévue dans les plans du parc olympique, elle a été ajoutée a posteriori avec l’appui de l’ex-maire de Londres, Boris Johnson, qui voyait en elle, “un symbole de prospérité et de croissance, délivrant le message fort que cette partie de la ville est ouvert aux affaires après des décennies de délaissement”.
Alors qu’elle n’était pas encore terminée, la tour reçut un accueil froid de la part de l’opinion publique et fut rapidement nominée pour la Carbuncle Cup 2012. A son sujet, le critique d’art Brian Sewell déclara : “Notre pays est jonché d’art public sans aucun mérite. Nous entrons dans une nouvelle période de gigantisme fasciste. Ce sont des monuments de l’ego et vous ne pourriez pas trouver un ego plus monumental que celui de Boris Johnson”.
Il aura fallu 5 ans pour que les plans de l’architecte uruguayen Rafael Viñoly soient mis à exécution et finalisés en 2014, après avoir coûté un total de £200.000.000. Construite dans le quartier de la City, le bâtiment surnommé ‘The Walkie Talkie’ est le sixième plus grand du quartier avec ses 160m de haut. Avec sa forme particulière, plus large en haut qu’à la base, le gratte-ciel de la City n’a pas fait l’unanimité lors de sa construction. Pire, on lui reproche (de façon sérieuse) de faire fondre des voitures garées devant lui à cause de ses vitres concaves qui réfléchissent avec force les rayons du soleil.
En 2015, le jury de la Carbuncle Cup a mis un point d’honneur à le désigner vainqueur de l’édition annuelle. “Son aspect le plus ridicule et le plus nuisible est sans doute sa forme, s’envolant vers l’extérieur comme un majeur gonflé, levé dans une profanation provocante pour tous. Bien sûr, le Walkie Talkie a ses partisans, la plupart d’entre eux concentrés dans le système de plus en plus dysfonctionnel qui lui a donné la permission d’être érigé”.