Avec ses 1.500 kilomètres carrés d’envergure et ses quasi 9 millions d’habitants rien que dans le Grand Londres, la capitale anglaise peut sembler intimidante pour quiconque songerait à s’y déplacer en bicyclette… Un choix pourtant fait par de nombreux Londoniens, dont un certain nombre de Français, qui utilisent désormais le vélo pour leurs trajets quotidiens.
C’est notamment le cas de Charlotte (*), étudiante, qui prend sa bicyclette tous les jours pour se rendre à l’université, en zone 1 (où se trouve également sa résidence étudiante). Un choix notamment économique pour la jeune fille. « La vie est chère ici et, en tant qu’étudiante, je galère déjà avec l’argent. Faire du vélo, ça m’enlève le coût des transports. » Un abonnement mensuel au « tube » lui coûterait £156.30. Et £94.90 en bus.
Certains sont aussi las des transports en commun. « Avant le Covid, je prenais tout le temps le métro, ce qui me stressait, décrit Laura. J’arrivais au bureau de mauvaise humeur. J’ai décidé de me mettre au vélo. Le ‘boost’ d’endorphines me mettait le sourire aux lèvres. » Une fatigue que ressentait également Magalie – la Française pédale désormais quotidiennement pour se rendre au travail ainsi que pour « une sortie ou deux le week-end » –, qui évoque aussi l’envie de s’ajouter une « activité physique ».
Tout comme Mélanie – « mon vélo, c’est ma salle de gym ! » – et Erwan. « J’ai fait ce choix pour avoir une activité physique régulière, indique le Français, qui fait du vélo une cinquantaine de minutes par jour. Cela a eu des effets bénéfiques rapides au bout de quinze jours : sommeil, régime alimentaire… » « Rajoutez à cela la réduction de votre emprunte carbone… » « Et puis voyager à vélo à Londres, c’est découvrir la ville sous un angle complétement différent », ajoute Mélanie, pour qui le vélo est de plus un beau vecteur de rencontres. « J’ai étendu mon entourage grâce à la pratique du vélo (…). Partager un café, un repas entre cyclistes le week-end, quel plaisir ! »
Ces Français voient donc de nombreux avantages à pédaler dans la capitale anglaise… Et ne semblent pas tant souffrir de la météo. « Les cyclistes sont bien équipés, les marques sont très présentes et leur stratégie marketing est orientée vers la démocratisation de la pratique, pour tous et par tout temps », sourit Mélanie.
Bien sûr, ils peuvent également être confrontés à d’autres problématiques comme celle, particulièrement importante à Londres, du vol de vélos. En moins d’un an, Erwan s’en est fait voler deux, dont l’un dans l’enceinte de son lieu de travail. Il ne l’avait pas attaché. « Le voleur a sauté par-dessus la grille, a pris mon vélo et est parti avec en pleine nuit. » Sophie s’en est aussi fait dérober deux…
Et puis se posent la question du trafic, en général, ainsi que celle de la qualité des infrastructures. Sophie juge qu’il est « en majorité agréable de faire du vélo à Londres », elle qui circule surtout dans le centre et l’Est et a d’ailleurs rédigé un article, en anglais, sur la pratique du vélo dans la capitale, même si elle estime que les conducteurs sont « plus ou moins respectueux » et les infrastructures « de plus ou moins bonne qualité » selon les endroits. Les choses vont néanmoins en s’améliorant, selon elle. Pour Magalie, « il y a quand même beaucoup de voies cyclables en ville mais aussi beaucoup de trafic et de piétons pressés. Je dirais que c’est comme tout, en faisant attention, tout se passe bien. »
De son côté, Simon Munk, de la London Cycling Compaign (LCC), indique que la popularité du vélo « augmente rapidement » à Londres, tout comme celui des « pistes cyclables sécurisées ». Il estime que la capitale s’en sort globalement « vraiment bien », niveau infrastructures, pour une ville de cette taille. Et dispose de « pistes de grande qualité qui atteignent les banlieues davantage que beaucoup d’autres mégacités ».
Mais il y a encore fort à faire. « Et nous avons encore trop de ‘trous’ dans notre réseau. » Avec des « boroughs » qui ont « la volonté politique » de proposer des infrastructures – et les leaders en la matière sont notamment les quartiers de Camden, City, Hackney, Islington, Lambeth et Waltham Forest – mais d’autres, aussi, qui « traînent des pieds », comme « de manière plus notoire, le borough de Kensington & Chelsea ».
« Et puis il y a encore trop de croisements où les voitures coupent la route aux cyclistes. Outre des pistes, nous avons besoin de davantage de carrefours sécurisés pour les cyclistes et les piétons. » Pour ce représentant de la LCC, faire du vélo à Londres « n’est statistiquement pas très dangereux mais est encore trop souvent perçu comme tel ».
En 2022, l’organisation People for Bikes octroyait à la ville la note de 48 sur 100, pour la qualité – couverture, surtout – de son réseau (Paris et Berlin ont elles les scores de 83 et 78, contre 26 et 45 pour Sydney et Toronto). Côté accidents, Transport for London comptabilisait 10 cyclistes tués, en 2021, dans le Grand Londres et 989 sérieusement blessés (le nombre de cyclistes avait aussi bien augmenté durant la pandémie).
Pour Erwan, il s’agit d’être « vigilant ». Aux gens qui souhaitent se lancer, il conseille de « repérer le trajet un jour où il y a peu de trafic », d’essayer éventuellement différentes routes… « Ensuite, il faut se forcer les premiers jours mais au bout de deux semaines, j’étais conquis », assure-t-il. « On y prend très vite goût au point où je ne pourrais plus prendre les transports aujourd’hui, même l’hiver », affirme, de son côté, Magalie.
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(*) Le nom de famille n’a pas été précisé.
Le tracé des pistes cyclables dans la capitale est à retrouver sur le site internet de Transport for London.