“Les sept mois que j’ai passé avec mes collègues au Parlement européen n’ont pas été vains, ils ont permis de faire comprendre aux Etats membres et au reste du monde que nous voulions rester au sein de l’Union européenne”. Même si Christian Allard a dû faire ses cartons dans son bureau à Strasbourg vendredi 31 janvier, le Français, élu en mai dernier député européen représentant l’Ecosse, reste positif. “Le Brexit n’est pas encore fait, il n’a même pas commencé. On n’est qu’au début du début des négociations”.
Mieux, ce qui le motive, c’est l’espoir de la tenue d’un nouveau référendum sur l’indépendance écossaise, après celui de 2014 où le “non” l’avait emporté. “Si le Brexit est certes un moment historique, le fait que l’Ecosse ait voté en juin 2016 à 62% pour rester dans l’Union est tout aussi important”, rappelle Christian Allard. Le Français revendique que les élections générales de décembre 2019 ont, selon lui, donné un nouveau mandat à la Première ministre écossaise, Nicola Sturgeon, pour conduire un second référendum dès cette année. Et le Français est catégorique : en cas de vote, le “oui” serait majoritaire cette fois-ci. “En 2014, les électeurs ont voté contre l’indépendance, car il leur avait été expliqué qu’ils avaient le choix entre une Ecosse indépendante dans une grande Europe ou un statu quo. Les soutiens du “non” avaient même été menaçants en racontant que si l’indépendance était votée, la conséquence serait une sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne”, se souvient l’élu. Ironique, pense-t-il, alors que deux ans plus tard, l’Angleterre et le Pays de Galles emmèneront le reste du Royaume-Uni dans un divorce total avec l’UE.
Les Ecossais, il en est persuadé, seraient donc prêts aujourd’hui à se séparer des autres régions britanniques pour rester au sein de l’Union. “Nous sommes européens et nous le resterons”, martèle Christian Allard, pour qui le territoire gaélique représente toute sa vie. Le Dijonnais y est en effet arrivé il y a plus de 30 ans. “La société pour laquelle je travaillais m’avait envoyé à Glasgow pour ouvrir un bureau des transports des produits de la mer”, raconte le quinquagénaire, spécialiste des questions de pêche. C’était en 1986. A l’époque, il avait 20 ans et avait “envie de voir le monde”. Si aujourd’hui il est un ardent défenseur de ce territoire du nord du Royaume-Uni qu’il considère comme chez lui, Il reconnaît cependant qu’il n’est pas immédiatement tombé amoureux de l’Ecosse. “Je suis d’abord tombé sous le charme de celle qui allait devenir ma femme”, rit-il.
Ce n’est qu’en 2004 qu’il décide de s’investir réellement en politique, en rejoignant les rangs du parti nationaliste écossais. D’abord suppléant aux élections législatives, il sera élu en 2013 – et ce, pour trois ans – député au sein du “scottish parliament”. Une première. Mais rien de plus normal pour lui. “L’Ecosse a depuis longtemps compris que tout le monde devait être représenté et que chacun devait avoir accès à la démocratie. On m’a donné le droit de vote en 1997, ce qui m’a permis, moi Français, de participer aux différentes élections, d’être candidat et donc même d’être élu”, se réjouit Christian Allard, qui est aujourd’hui également membre du conseil municipal d’Aberdeen, ville où il habite.
C’est donc cela qu’il souhaite continuer à protéger et qui le poussera une nouvelle fois à militer pour un second référendum sur l’indépendance de l’Ecosse. “Avec le Brexit, on risque d’avoir une population qui va diminuer. J’ai envie de dire à tous les populistes que, s’ils pensent que l’immigration est un problème, ils devraient venir faire un tour en Ecosse pour comprendre que c’est l’émigration qui est un vrai fléau économique”, conclut le Français.