Les images ont choqué de l’autre côté de la Manche. Vendredi 28 juin, des militants d’Extinction Rebellion – un mouvement de sensibilisation à l’urgence de la crise climatique – ont été violemment délogés par les CRS alors qu’ils menaient une action, non déclarée mais pacifiste, sur le pont de Sully, à Paris. Les membres britanniques d’Extinction Rebellion ont alors appelé, ce vendredi 5 juillet, à un rassemblement devant l’ambassade de France, à Londres, pour exprimer leur solidarité. Entre 30 et 40 personnes se sont rendues sur place.
Parmi elles, Caroline Vincent, une Franco-britannique engagée dans différentes actions d’Extinction Rebellion à Londres, qui ne peut retenir son indignation. « Ça a été un choc de voir des CRS gazer des jeunes à bout portant alors qu’ils étaient là, en paix, non violents », explique-t-elle, évoquant les vidéos, largement diffusées sur Internet, de militants simplement assis sur le bitume, en train de se faire asperger de gaz lacrymogènes.
« Ce n’est pas une façon de traiter ses propres citoyens. Pour moi, la réponse était disproportionnée », indique, de son côté, Douglas Rogers, jeune militant britannique qui était sur le pont de Sully et qui insiste sur l’attitude plus apaisée des policiers anglais lors des grosses journées d’action organisées par le mouvement à Londres, en avril. « Un millier de personnes ont été arrêtées mais il n’y a eu aucune blessure, que ce soit chez nos membres ou la police », assure-t-il.
Le jeune homme n’a pas hésité à témoigner de son expérience parisienne, vendredi. Les militants ont aussi parodié une altercation entre forces de l’ordre et manifestants, s’aspergeant d’eau à l’aide de vaporisateurs, en signe de solidarité envers leurs homologues français… Ils devaient également remettre une lettre à l’ambassade demandant aux autorités françaises de « sonner l’alarme » à propos de l’urgence climatique.
Mouvement originaire du Royaume-Uni (l’organisation compte maintenant de nombreux sympathisants dans d’autres pays comme, dans ce cas-ci, la France) Extinction Rebellion – XR, en abrégé – se distingue par son discours radical. Les militants n’hésitent pas à parler de « sixième extinction de masse » et effectuent des actions fortes (blocage de routes, de ponts, comme à Londres en avril), dites de « désobéissance civile », pour demander une réduction massive des émissions de CO2 .
Des actions pas toujours comprises du public, mais que Caroline Vincent cautionne complètement. Elle-même a été arrêtée, il y a quelques mois, lors d’un blocage sur le pont de Waterloo. « On a fait des marches et des pétitions pendant 30 ans. Mais le carbone continue d’augmenter, on continue de détruire l’environnement. Il faut faire quelque chose. »
Karen Janody, Française également présente au rassemblement, a elle rejoint le mouvement lorsque le rapport du Giec (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) est paru, en octobre dernier. Le document fait état des conséquences désastreuses qu’entraînerait une hausse des températures de plus de 1,5 C° (extinction d’espèces, montée des océans) et rappelle l’importance de réduire de 45 % les émissions mondiales de CO2 d’ici 2030. « Cela nous laisse à peine 11 ans », s’inquiète la Française.
Coordinatrice du groupe XR à Greenwich, Karen s’est battue pour que la municipalité reconnaisse « l’état d’urgence climatique ». Elle milite par ailleurs contre des projets locaux, comme l’ouverture du Silvertown tunnel, qui risquerait, selon les activistes, d’accroître le trafic routier, ou bien l’expansion du London City Airport. « Ce qui me permet de lutter contre l’anxiété écologique, c’est justement de passer à l’action.»
En France, une enquête préliminaire a été ouverte concernant les événements du pont de Sully. En attendant, à Londres, les militants ont repris le slogan adressé aux forces de l’ordre parisiennes par les activistes français : « Policiers, doucement, on fait ça pour vos enfants… ».