Spatule, bol, mixeur plongeant : les indispensables pour réaliser une crème. Qu’on se l’applique sur le visage ou s’en tartine le fond du gosier, ce sont les mêmes ustensiles. Sous la toque, Emmanuelle Vignalou, pharmacienne aujourd’hui à la tête de Ganache And Pistache, entreprise de desserts faits maison à Londres.
Après une quinzaine d’années en officine à Paris, la pharmacienne s’installe en famille à Londres. Elle ne trouve pas d’emploi satisfaisant dans sa branche, et une nouvelle expatriation se profile. C’est l’occasion d’envisager une reconversion professionnelle. “J’ai toujours aimé les gâteaux. L’idée d’en faire à Hong Kong s’est rapidement imposée. On était amis avec Jocelyn Herland, à l’époque chef du restaurant d’Alain Ducasse au Dorchester. Je lui en ai parlé”. Il lui propose d’y faire ses classes en cuisine. “C’était totalement inespéré ! J’y ai passé l’année scolaire 2014-2015. J’ai découvert un univers inconnu, le restaurant, la pâtisserie, le coup de feu, le 3 étoiles, un truc hyper carré, militaire. Je me suis aussi beaucoup entrainée à la maison. Cette année-là, on a mangé des gâteaux à profusion !”, rit-elle.
Quelques mois avant le grand départ, le projet Asie retombe comme un soufflé. “Je tenais mon idée, je m’étais formée, j’allais le faire à Londres”. Ganache And Pistache est lancé en septembre 2015, et suit une recette inchangée : desserts et chocolats faits maison, dans la cuisine familiale à Fulham. La clientèle, à l’origine le réseau de copines, s’agrandit rapidement sous l’effet du bouche à oreille. Emmanuelle Vignalou cuisine “des choses très classiques : Paris-Brest, tarte citron meringuée, fraisier. Les bons basiques français pas faciles à trouver à Londres”. ChocoHolic, Pavlova, Big Macaron et compagnie s’invitent sur les tables londoniennes, ainsi que des desserts “complètement personnalisés”. L’ancienne pharmacienne “retrouve des gestes. Une crème pâtissière, c’est comme une crème de TP à la fac. Le fait d’être organisée, l’hygiène, savoir comment les choses se contaminent me sert tous les jours”.
“Me lancer était un sacre challenge. J’avais passé 3-4 ans sans travailler et il a fallu commencer quelque chose de nouveau, aller vers [une clientèle]. Puis accepter les grosses commandes. Plus ça va, plus la barre monte”. La reconversion est un succès, les commandes vont croissant. Quand se pose la question de passer à une cuisine industrielle, d’embaucher, la pâtissière prend conscience qu’elle ne veut “pas forcement monter un énorme truc qui [la] dépasse”, mais plutôt “rester sur un concept fait maison, artisanal, en gardant un œil sur la qualité de chaque boite envoyée”. Et les projets ne manquent pas : dans les cartons sommeillent des cours de cuisine. Une façon de transmettre les enseignements du Dorchester, là où tout a commencé.