Etienne Daho n’est pas passé loin de la mort en 2013 pour une appendicite qui a mal tournée. Quelques mois après, il sortait son album Les chemins de l’innocence retrouvée. Puis il y a eu le traumatisme des attentats en France en 2015, la perte de sa sœur Jeanne en 2016. Des épreuves dans de sa vie d’homme et d’artiste qui n’ont pas eu raison de lui. Sa force, il l’est venue la puiser à Londres pour l’écriture de son dernier opus, Blitz qu’il viendra présenter au public de la capitale anglaise samedi 19 février à l’Electric Brixton.
Sa voix si singulière est la même. A 60 ans passés, son charme n’a pas pris une ride. Sa prestance reste toujours aussi vibrante. Pour sa journée promotion mercredi 9 janvier à l’Institut français, Etienne Daho a fait un aller-retour express entre Paris et Londres, où il viendra dans quelques jours raconter sur scène son dernier album, Blitz, écrit à Londres et sorti en novembre 2017. La capitale anglaise, c’est un peu sa seconde maison. Etienne Daho y vient pour y trouver l’inspiration. Le chanteur français reconnait volontiers qu’il a besoin de quitter la France pour écrire. “J’organise ma vie pour réaliser mes projets. J’ai vécu à Lisbonne, Ibiza, New York. Et Londres est pour moi une ville exotique, on y est dans un autre monde”, confesse-t-il.
Etienne Daho a un lien extrêmement fort avec le Royaume-Uni, où il a vécu alors qu’il n’avait que 14 ans. A l’époque, raconte-t-il, il travaillait dans un hôtel à Manchester. A Londres, il y s’y est souvent rendu pour acheter des disques, voir des concerts. “C’est la ville de la musique par excellence”. Il se souvient d’ailleurs d’avoir donné son premier concert dans la capitale anglaise en 1987. C’était au Marquee Club, rappelle-t-il. Depuis, le lieu a fermé et Etienne Daho est toujours là.
Lors de son dernier séjour, où il a créé Blitz (en référence aux bombardements nazis sur Londres entre 1940 et 1941), il avait posé ses valises à Earl’s Court, un quartier qui était dans les années 70 le cœur de la vie créative de Londres. “J’aime aussi beaucoup Shoreditch, alors que Soho s’est beaucoup aseptisé avec le temps. Jusque dans les années 90, c’était vibrant, avec un développement de l’art alternatif. Mais la capitale est devenue bien trop chère et les artistes sont partis”, regrette-t-il. Pour le Français, amoureux de la grande Île, Londres garde tout de même son éternel statut de capitale du rayonnement artistique international. “Ici tout va vite”, résume-t-il.
Dans son dernier opus, Etienne Daho rend hommage à ses idoles musicales, dont l’anglais Syd Barrett des Pink Floyd. D’ailleurs, il assume complètement ses références à ce genre de grands artistes. “Il faut citer ses sources tout le temps, cela permet de transmettre aux autres, de leur faire découvrir des choses”, justifie-t-il. Citer également pour transformer et recréer et raconter une nouvelle histoire. Ses albums, il les imagine d’ailleurs toujours comme un livre. “Une chanson en ouverture et une en fermeture, puis je choisis l’ordre, car c’est essentiel pour raconter quelque chose”, confie le chanteur.
Mais comment faire le tri dans la création ? Quelles sont les chansons que l’on garde pour faire que l’album trouve tout son sens ? “Celles qui ne doivent pas y figurer s’éjectent naturellement. C’est le destin des chansons qui pour moi ont leur propre vie”, philosophe Etienne Daho qui estime que les opus au format court sont les plus intéressants. “Je trouve que 40 minutes, c’est bien. Cela permet de rentrer dedans, de le réécouter. Un album n’est pas quelque chose que l’on prend tout de suite, c’est une expérience à vivre, à découvrir à l’infini”. Un peu comme un film dont on décortiquerait les moindres détails à chaque fois qu’on le revoit.
Etienne Daho se réjouit d’ailleurs que les nouvelles générations ne soient plus dans le téléchargement numérique de masse et recommencent à apprécier l’achat de vinyles par exemple. “Elles recherchent dorénavant la relation à l’objet”. Un objet que lui-même prend soin à imaginer avec une attention particulière sur le design, l’esthétique. “Je suis moi-même consommateur de disques, donc j’imagine juste ce qui pourrait plaire aux autres”, estime-t-il.
Cette méticulosité et cette passion qui l’animent depuis ses débuts et même bien auparavant, ce sont certainement les raisons de la longévité de sa carrière. Etienne Daho a en effet traversé les quatre dernières décennies sans que le public ne lui soit infidèle. Quand on lui demande quel est son secret de jouvence, il répond que son appétit et son envie sont toujours aussi forts. Bref, un amour et une passion pour la musique comme au premier jour. “Mon corps et ma tête sont fabriqués pour ça. Expliquer les raisons de cette longévité, c’est compliqué. Je peux simplement dire que je suis fidèle à mes envies de base, à ma passion de la musique. Si elle évolue, je n’ai rien changé à ce que je suis”, résume l’artiste français.
Etienne Daho, avec un timbre de voix qui n’a pas bougé, n’a en effet pas peur d’apporter de nouvelles formes à sa musique, en s’entourant de musiciens de la scène “underground”, “parce que c’est là que tout ce qui s’y passe est intéressant, qu’il y a encore de la création”. Lui aussi continue de créer et veut continuer à faire vibrer le public, comme il l’espère une nouvelle fois sur la scène de l’Electric Brixton samedi 19 janvier.