Mercredi 27 février, une cinquantaine de personnes sont venues dans la salle polyvalente du lycée international Winston Churchill de Londres pour participer au Grand débat national. Organisée dans le cadre de ce Grand débat national convoqué par le président Emmanuel Macron en conséquence du mouvement social inédit des Gilets Jaunes, cette réunion citoyenne était la première qui a lieu à Londres, et au Royaume-Uni de manière générale. Cette discussion publique est une initiative d’Alexandre Holroyd, le député de la 3e circonscription des Français établis à l’étranger (incluant le Royaume-Uni) et membre de la majorité parlementaire La République en Marche, et fut animée par deux modérateurs.
Le temps imparti étant de seulement deux heures, et également dans un souci de pouvoir faire en sorte que chacun ait le temps de s’exprimer, les modérateurs annoncent aux participant.e.s du débat que seulement deux thèmes du Grand débat seront abordés au cours de la réunion. Ont été mis de côté la Transition écologique et l’organisation de l’Etat pour se concentrer sur les deux thèmes du jour : démocratie et citoyenneté d’abord, et fiscalité et dépenses publiques ensuite.
Sans les nommer, les participant.e.s au débat se sont vite positionné.e.s sur des thèmes apportés dans le débat public par les Gilets Jaunes concernant la vie démocratique en France. Très vite, le problème des modes de scrutin et surtout du référendum d’initiative populaire (RIC) arrivent dans les bouches des orateur.rice.s improvisé.e.s. Sur la question particulière du RIC, les citoyen.e.s français.es sont partagé.e.s entre celles et ceux qui le considèrent “dangereux”, “déstabilisateur” ou encore “servant les populismes”, et d’autres le considérant comme l’avenir et le voient “s’imposer dans 10 ou 20 ans dans nos sociétés modernes”.
Bien que les visions divergent, tout le monde s’accorde sur le fait que de nouveaux moyens doivent être envisagés pour que le peuple se fasse plus souvent entendre même dans les plus hautes sphères de l’Etat. Ainsi, les Français.es du Royaume-Uni présent.e.s sont d’avis qu’il est important pour eux, vivant à l’étranger, d’apporter “un éclairage particulier”. Une participante propose alors de s’inspirer du modèle britannique en ce qui concerne les pétitions citoyennes, par exemple : si un grand nombre de signatures (plus de 100.000 au Royaume-Uni, ndlr) est récolté par une pétition, alors le Parlement est contraint de la débattre et de la transformer en acte politique ou pas.
Ensuite, le sujet qui s’est invité implicitement d’abord, et explicitement ensuite, est le problème de la représentation en France et du décalage entre les citoyen.e.s et leurs élu.e.s, voire la classe politique plus généralement. Par exemple, un participant excédé par les mensonges répétés de certains personnages politiques propose de “punir les politiques qui mentent de manière avérée” en les rendant inéligibles. Puis, un participant s’est démarqué du reste des citoyen.e.s présent.e.s, en se présentant comme un médecin qui “rentre chaque week-end en France et enfile (son) gilet jaune pour soigner les manifestants”. Ce monsieur fait alors le constat de la décrédibilisation des politiques et termine son intervention en illustrant ce constat, se fendant d’un “méprisant de la République” pour qualifier Emmanuel Macron.
Le terme “écart entre les citoyens et les représentants” est répété plusieurs fois avant qu’un participant parle du “nombre trop élevé d’élus” parlementaires. Certain.e.s critiquent les salaires des parlementaires, mais surtout leurs avantages ou “privilèges”. Assez discret jusque-là, le député Alexandre Holroyd, qui souhaite seulement faire quelques précisions techniques mais laisser le débat aux citoyens, demande alors à ses concitoyens de “ne pas débattre du nombre de représentants idéal sur une simple notion budgétaire mais plutôt selon les convictions politiques, car en réalité le budget de l’Assemblée nationale représente une goutte d’eau par rapport à l’ensemble des dépenses de l’Etat”.
Avant de passer à l’autre grand thème de la soirée, les participant.e.s se déclarent unanimes quant à l’intérêt de ce Grand débat, que certain.e.s aimeraient voir se reproduire plus souvent même si les avis sont divers au sujet de la fréquence de ce type de discussion. Une participante clôture ce sujet en remerciant nommément cette fois, “les Gilets Jaunes sans qui ce Grand débat ne serait pas arrivé”.
Puis, le public été amené à réfléchir sur les questions économiques, notamment la fiscalité et les dépenses publiques. Deux grandes idées ressortent de cet aspect du débat. Tout d’abord, tous sont unanimes pour dire que l’Etat dépense trop. Une citoyenne qualifie l’État de “machine lourde”, quand un autre lui répond que la dépense n’est pas importante tant que l’on reçoit un bon service, ajoutant que “lorsque l’on va chez le médecin aux Etats-Unis, on s’en rend vraiment compte”. Optimiste, une participante concilie les demandes précédentes en déclarant que l’on “peut dépenser moins, et avoir tout de même de bons services”. En outre, une autre personne du public ajoute qu’il faut “impérativement réduire les dépenses symboliques”, militant pour le retour de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) supprimé par Emmanuel Macron en 2017.
L’expression qui marque la fin de ce débat concernant la fiscalité est la suivante : “justice fiscale”. En effet, à plusieurs reprises, le terme est repris dans la salle, certain.e.s participant.e.s s’indignant d’un “prélèvement injuste car l’impôt n’est pas assez progressif globalement”.
Ainsi se conclut le débat. De l’avis de tous, l’expérience lancée par le député Alexandre Holroyd a été une réussite. D’autres rendez-vous seront organisés au Royaume-Uni, à à Glasgow, Edimbourg, et enfin à l’Institut francais de Londres, le samedi 9 mars à 2pm.