Ce début du mois d’octobre marque l’augmentation du prix de l’énergie au Royaume-Uni, avec une hausse de 80 % des factures actuelles, comme l’indique le site du gouvernement britannique. Un récent rapport de l’Office for National Statistics indique que l’indice des prix à la consommation a augmenté de 8,6 % d’août 2021 à août 2022.
Faire face au Brexit, à la pandémie, à la hausse des prix des matières premières, et maintenant du gaz et de l’électricité. Telle est la mélodie déprimante avec laquelle les chefs d’entreprises ont appris à composer ces dernières années. Christophe Le Tyvenez-Dobel, propriétaire de onze boulangeries Jade à Londres, explique avoir reçu une estimation de sa facture d’électricité pour son fournil à hauteur de £105,000 livres à l’année, qui était auparavant facturée à £24,000 par an. Il espère que le bouclier tarifaire lui permettra de réduire cette estimation de moitié.
Les commerçants retiennent alors leur souffle jusqu’à la réception de la première facture d’énergie en octobre. « Il s’agit de coûts énormes pour mon entreprise. Nous essayons de trouver des solutions pour économiser l’énergie », explique le boulanger avant de reprendre, « notre four tourne sur les horaires de nuit, nous cuisons notre pain entre minuit et quatre heures du matin ».
Le prix de l’énergie n’est pas la seule préoccupation des commerces français du Royaume-Uni. Farine, beurre et bien d’autres produits du terroir français ont augmenté à cause du Brexit et de l’invasion russe en Ukraine. Christophe Le Tyvenez-Dobel explique avoir dû augmenter ses produits à deux reprises, entre 7 et 10 %. « Mes clients sont compréhensifs, nous faisons de notre mieux pour les consommateurs et pour notre entreprise », affirme le boulanger.
Matthieu, gérant de la crêperie Le Merlin à Hackney, est confronté aux mêmes problématiques. « Nos factures de produits français ont doublé à cause de l’augmentation des frais de port. Acheminer du cidre breton jusqu’à Londres ou encore de la farine, du jambon et du fromage français coûte trois fois plus cher qu’il y a un an. Nous sommes à présent contraints d’augmenter le prix de nos crêpes », déplore-t-il. Les propriétaires de cette crêperie française emblématique du quartier de Clapton envisagent de consommer davantage de produits locaux d’origine britannique pour en finir avec les barrières tarifaires et administratives.
Le mécontentement gronde au sein de la communauté de commerçants français, qui doivent également faire face à des problèmes de recrutement de taille. Depuis plus d’un an, les patrons français de Londres rencontrent de véritables difficultés à embaucher des employés qualifiés et motivés. « J’ai connu de nombreuses crises en quinze ans », dit Rémy Zentar, propriétaire de l’Épicerie@56 dans l’Est de Londres, « mais le contre-coup du Brexit et l’augmentation du coût de la vie posent de gros problèmes dans le recrutement et la rétention de personnel. La plupart de mes employés européens sont partis », déplore ce commerçant français.
Avec le départ de 25,000 Français du Royaume-Uni entre 2019 et 2021, selon l’ONS, les patrons ont en effet perdu un bon nombre de leurs employés de longue date. « Les quatre derniers mois ont été particulièrement difficiles pour recruter, j’ai le sentiment que tous les bons chefs et serveurs sont partis », conclut le crêpier breton.