“Si la mise en pause des arrêts d’Ashford International et d’Ebbsfleet International en mars 2020, au début de la pandémie, était légitime, elle ne fait plus sens aujourd’hui avec la reprise de l’économie et l’amélioration de la situation sanitaire”, estime Artus Galiay. Ce Français de Londres vient justement d’écrire à Eurostar pour demander la remise en service de ces deux arrêts, situés dans le Kent. “Là-bas, c’est le sujet numéro un au sein de la population”, assure le trentenaire.
C’est mi-janvier dernier, lors de son premier déplacement de campagne politique, alors qu’il a décroché l’investiture Les Républicains pour les prochaines législatives, qu’Artus Galiay aurait été saisi de cette question par les habitants français mais aussi britanniques de cette province du sud-est de l’Angleterre.
Ces deux arrêts sont censés être suspendus jusqu’en début d’année prochaine. Mais Artus Galiay craint qu’ils ne puissent jamais reprendre du service. “Plus Eurostar maintient leur suspension, plus la compagnie ferroviaire détruit, ou du moins fragilise, leur modèle économique”, estime le candidat à la députation de la 3ème circonscription (Europe du Nord) des Français de l’étranger. Selon lui, “les usagers vont inévitablement cesser de les utiliser à terme”, puisqu’ils auront pris de nouvelles habitudes. Et notamment celle de préférer l’avion.
Une conséquence qui irait, selon lui, contre l’objectif d’Eurostar de se positionner comme une solution écologique pour les déplacements entre le Royaume-Uni et la France. “A l’heure où nous devons collectivement tout mettre en œuvre pour atteindre nos objectifs de neutralité carbone, vous mettez en avant – à raison – l’importance d’utiliser le train plutôt que l’avion pour minimiser l’impact environnemental de nos déplacements. Mais comment faire confiance aux services ferroviaires quand des gares sont fermées au moindre affaiblissement de la demande ?”, a-t-il ainsi écrit dans son courrier envoyé le 19 janvier dernier. Il juge par ailleurs que le même sort attend l’arrêt Calais-Fréthun, de l’autre côté de la Manche, lui aussi suspendu depuis le début de la crise sanitaire.
Ce serait donc une nouvelle perte d’usagers pour Eurostar, qui a déjà vu le nombre de ses passagers baisser pendant la pandémie. De quoi fragiliser davantage ses finances sur le long terme. Sans compter, ajoute Artus Galiay, que cette décision de la suspension de ces arrêts validée en septembre 2021 aura un impact inévitable sur le secteur touristique français. “Les habitants du Kent ont moins de possibilité de venir en France”, lance celui qui est aussi représentant de la région Hauts-de-France au Royaume-Uni, “les usagers sont aujourd’hui obligés de repasser par Londres pour prendre un train Eurostar. Cela leur coûte plus cher et les dissuade donc fortement de se rendre en France”.
Artus Galiay regrette donc la position d’Eurostar. Il espère que les arguments avancés dans son courrier aura un écho auprès de Jacques Damas, PDG de la compagnie ferroviaire, ainsi qu’auprès de Jean-Pierre Farandou, PDG de la SNCF, qui détient 55% de l’entreprise. “L’Etat français a aidé Eurostar pendant la crise sanitaire, c’est donc l’argent public qui a été investi pour sauver Eurostar. Sauf que l’entreprise, en maintenant la suspension de ces deux arrêts, prouve qu’elle ne veut pas assurer au mieux sa mission de service auprès de tous ses usagers, puisqu’elle privilégie ses connexions entre Paris et Londres. La vraie question qu’il faut se poser, c’est : quel modèle veut-on ? Simplement connecter des grandes métropoles, on entend d’ailleurs parler d’une fusion possible entre Eurostar et Thalys et créer des territoires délaissés ? Ce serait vraiment dommage”.
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