Niché au beau milieu d’East Finchley, au nord-ouest de Londres, la Table du marché connaît depuis mi-septembre 2019 un nouveau souffle après que son chef, Khalid Harici, a remis le couvert avec son nouvel associé Abdoul Harmal. Ensemble, les deux gérants ambitionnent de porter haut les couleurs et saveurs de la gastronomie française tout en y ajoutant leur touche marocaine. Après tout, le melting pot est aussi dans l’assiette !
Depuis qu’il a ouvert la Table du marché en 2015, Khalid Harici poursuit la même philosophie tournée vers les plats de saison. “Notre carte change presque tous les jours pour proposer des produits frais selon l’arrivage”, explique-t-il. Quotidiennement, le chef s’affaire ainsi à sélectionner les ingrédients dont il aura besoin pour les services du lendemain. Si deux tiers des denrées sont achetés auprès de partenaires locaux, le restant est quant à lui importé depuis l’Hexagone. C’est notamment le cas de mets typiquement français comme le fromage, le foie gras ou les fameuses cuisses de grenouille. Reste alors à imaginer une nouvelle carte, ce qui impose de savoir se réinventer. Et ce, d’autant plus que Khalid Harici tient à laisser du choix à ses clients en proposant une huitaine d’entrées et de plats pouvant aller de la soupe à l’oignon aux moules marinières en passant par le confit de canard. Les végétariens et végans ne sont pas en reste puisque deux entrées et plats leurs sont plus spécifiquement destinés.
Cette carte permet ainsi au restaurant de se démarquer dans un quartier plutôt résidentiel où se côtoient principalement des établissements grecs et turcs. “Nos clients viennent d’abord chez nous pour manger des produits français servis à la française”, résume d’ailleurs le chef, avant d’ajouter avec amusement que “les Britanniques choisissent bien souvent les escargots et les cuisses de grenouille par curiosité, mais qu’une fois qu’ils y ont goûté ils aiment”.
En parallèle de ces plats caractéristiques de la gastronomie tricolore à l’international, Khalid Harici apporte désormais sa touche marocaine afin de proposer une “cuisine française moderne avec une petite influence nord-africaine”. Pour ce faire, le natif de Casablanca aime s’amuser à mélanger les cultures en proposant par exemple un tajine de poisson ou des légumes braisés. Autant de plats “à mi-chemin entre le sud de la France et le Maroc”, lâche-t-il. Ce brassage se matérialise encore plus sur la carte des vins de la Table du Marché où s’entremêlent vins français et marocains. Le chef précise toutefois “qu’il y a une chose avec lesquelles il ne faut pas jouer, ce sont les ‘classiques’ comme le bœuf bourguignon”.
Venu au Royaume-Uni en 1985 pour y passer un mois de vacances après avoir fini des études d’informatique, Khalid Harici n’en est finalement jamais reparti. “Les vacances ont duré 35 ans”, confie-t-il. Ses débuts à Londres n’avaient pourtant rien d’évident pour lui qui ne parlait que le français comme langue étrangère. Il parvient toutefois à se faire embaucher en tant que commis auprès du chef Jean-Claude Brously, auprès de qui il s’initie à la gastronomie tricolore pendant dix ans jusqu’à devenir sous-chef de son restaurant londonien. Avec le recul, il s’amuse de ce destin empreint de “hasard”. “Un Marocain qui a appris la cuisine française à Londres, c’est bizarre non ?”, lâche-t-il.
Après une vingtaine d’années à commander les brigades de plusieurs restaurants français de la capitale anglaise, ponctuées par l’ouverture en 2006 d’un petit restaurant marocain qui ne s’avère pas viable, le chef décide finalement de s’installer avec son précédent associé dans le local d’un ancien restaurant grec. La Table du marché ouvre finalement ses portes en 2015 après que la décoration eut totalement été revue pour coller au style sobre et épuré des établissements tricolores. Aujourd’hui encore, Khalid Harici accorde un point d’orgue à servir “à la française”, ce qui impose de savoir parler des produits et de leur terroir. Pour ce faire, il tient à expliquer avant chaque service l’histoire et les saveurs de ses plats à son équipe en salle.
La suite semble se présenter sous de bons augures pour les deux chefs d’entreprise puisque leur cinquantaine de couverts font le plein chaque week-end et leur permettent d’envisager l’ouverture d’un second établissement dans le courant de l’année.