“Londres fait toujours autant rêver les artistes”, estime Nathalie Berrebi. Elle en sait quelque chose, elle qui a fait venir depuis 2006 de nombreux humoristes français et francophones dans la capitale anglaise. Gad Elmaleh, Michel Boujenah, Anne Roumanoff ou encore en mai prochain Manu Payet et Ary Abittan… Mais avant de se consacrer à la production de spectacles vivants, la Française de Londres a eu une première carrière professionnelle, bien loin des planches.
En effet, elle arrive à Londres, alors qu’elle n’est âgée que de 27 ans. Elle y suit son mari qui a alors décroché une opportunité professionnelle à Londres. Problème : elle ne peut pas travailler. “Le métier d’avocat n’est pas adaptable d’un pays à l’autre”, rappelle Nathalie Berrebi. Elle décide alors de prendre un nouveau départ. Passionnée depuis toujours par le théâtre – elle se souvient encore des spectacles de fin d’année organisés par la directrice de son école maternelle en banlieue parisienne -, elle étudie même la matière quand elle arrive au lycée. “Le théâtre est un canal qui permet de se connecter à nos émotions, nos réflexions. Cela nous rend plus humain”, estime la Française de Londres.
L’envie de se lancer dans cette nouvelle aventure professionnelle est aussi née d’une rencontre avec Sandra Soudry, une autre Française installée dans la capitale anglaise, également férue de théâtre. Ensemble, au vu de la forte présence de la communauté, elles décident de faire venir des spectacles en français pour les Français de Londres via leur société de productions, Emmenez nous au théâtre. Mais pour les convaincre de s’intéresser au théâtre, elles ont d’abord l’idée de proposer des pièces pour leurs enfants. Elles prennent alors contact avec la compagnie Colette Roumanoff – la mère de l’humoriste Anne Roumanoff – basée à Paris et qui produisait des classiques de Molière pour le jeune public. “Nous l’avons appelée et lui avons expliqué ce que nous voulions faire. Elle a été tout de suite emballée”.
Chaque année, pendant près de quatre ans, Nathalie Berrebi et sa complice proposaient ainsi des spectacles dans différents lieux, que ce soit au Shaw Theatre, aux Riverside Studios ou encore au Bloomsbury Theatre, avec des échanges à l’issue de la pièce. “Et puis, un jour, nous avons été contactées par le gérant du restaurant de l’Institut français de Londres”, raconte l’ancienne avocate, “il nous a alors expliqué qu’il était le cousin de Gad Elmaleh et qu’il pourrait nous aider à le faire venir à Londres”. Incroyable, mais jusque-là, l’humoriste marocain ne s’était jamais produit de ce côté de la Manche. Elles rencontrent alors le père de l’artiste et ont le feu vert en 2006 pour produire le spectacle à Londres.
En parallèle de l’organisation de leurs spectacles de théâtre, les deux amies se lancent donc dans un nouveau créneau. S’en suivront d’autres humoristes comme Dany Boon, François-Xavier Demaison… mais aussi des musiciens comme Laurent Voulzy ou Michel Jonasz. Mais le duo de productrices va devoir se séparer, Sandra Soudry étant rentrée à Paris en 2012. “Sauf que je n’aime pas travailler seule, j’apprécie plutôt l’expérience collective”. Nathalie Berrebi, qui monte alors sa propre boite de productions, NB Productions, se rapproche alors de Marianne Badrichani, une productrice de spectacles vivants à Londres. Avec l’appui de l’attaché culturel de l’époque de l’Institut français, elles montent ensemble une saison de théâtre, avec la particularité de proposer des pièces avec un sous-titrage en anglais. Puis, elles travaillent avec l’actrice Edith Vernès sur différents spectacles. Finalement, elles finissent par constituer un nouveau trio et montent leur société de production, Gallic Gang Productions, afin de permettre de faire découvrir des auteurs français soit via des pièces en français mais sous-titrées en anglais, soit en anglais.
En parallèle, Nathalie Berrebi rencontre Bruno Bensoussan, qui lui donne envie de se relancer dans la production de spectacles de stand up. Le Français de Londres a un joli carnet d’adresses et ensemble ils proposent de belles têtes d’affiche, dont Patrick Timsit, Manu Payet (qui revient le 14 mai prochain), Ary Abittan (en spectacle le 21 mai), Anne Roumanoff, Michel Boujenah et Gad Elmaleh qui est venu à plusieurs reprises à Londres grâce au duo, la dernière étant en janvier dernier au Shaw Theatre pour trois dates sold out.
Insatiable, la Française n’arrête pas, puisqu’elle travaille actuellement avec Marianne Badrichani sur un gros projet, qui devrait voir le jour à la fin de cette année et parfaite pour célébrer le 120e anniversaire de l’Entente cordiale. “Nous avons racheté les droits de la pièce de Jean Poiret, ‘Féfé de Broadway’ pour l’adapter”, explique Nathalie Berrebi. Rebaptisée French toast, elle racontera l’histoire d’une actrice française, grande tragédienne, qui entend parler du projet qui se monte à Londres autour du classique Phèdre. Elle traverse alors la Manche, sauf qu’elle se rend compte que ce n’est pas la tragédie grecque classique qui sera jouée, mais un cabaret de music hall. Un choc des cultures entre la France et la Grande-Bretagne, mais tout en humour. “C’est une pièce qui s’adresse davantage au public anglophone”, reconnaît Nathalie Berrebi, bien qu’elle souhaite que ce spectacle rapproche les Français et Britanniques “séparés à cause du Brexit”. “Notre objectif, que ce soit par le stand up ou les pièces de théâtre, est que le public ressorte avec le sourire, l’envie de parler de leurs émotions”.