Les électeurs et électrices de la troisième circonscription ont choisi : le second tour des législatives 2022 pour l’Europe du Nord opposera le député sortant étiqueté de la majorité présidentielle, Alexandre Holroyd, à la candidate écologiste, Charlotte Minvielle, qui se présente sous la bannière NUPES. Deux profils politiques radicalement différents que les votants devront départager dès vendredi 10 juin, jour d’ouverture du scrutin en ligne.
Si tout les oppose politiquement, les deux candidats sont d’accord sur un point : le taux de participation au premier tour a été décevant. “Mais elle est plus importante que celles de 2012 et 2017”, tient tout de même à préciser Alexandre Holroyd, “c’est 6 points de plus qu’il y a cinq ans par exemple et 8 points de plus qu’il y a 10 ans”. “Le vote par internet a permis aux personnes qui vivent dans des territoires plus reculés de voter et il faut s’en féliciter”, ajoute de son côté Charlotte Minvielle.
Mais comment faire pour mobiliser davantage l’électorat pour le second tour ? La candidate NUPES milite pour mieux informer les électeurs et électrices sur l’importance de cette élection. Éducation, protection sociale, relation entre la France et les pays de la circonscription… “Beaucoup de sujets entrent dans le mandat d’un député”, rappelle la jeune femme. Et ses leviers d’action sont, selon elle, nombreux. Si elle est élue, elle promet de “s’inspirer de ce qui se fait de mieux dans les pays de la circonscription comme sur le plan de l’égalité homme-femme, du système éducatif, de la diversité culturelle, des énergies renouvelables”. Pour Alexandre Holroyd, mobiliser les électeurs passe par leur rappeler également que “c’est une élection primordiale, où se joue l’avenir et le destin de notre pays”. Selon lui, les votants auront le choix entre “deux alternatives radicalement opposées”.
Charlotte Minvielle estime que sa présence au second tour est une “super victoire”. Pour elle, les pronostics ont été déjoués et avec “seulement sept points d’écart” avec le député sortant, elle considère que son score, de 31,5% sur l’ensemble de la circonscription, est “un très bon score”. “C’est un échec, une grosse dégringolade pour le député sortant”, lance-t-elle, “il a perdu 20% des voix depuis 2017, cela montre qu’il n’y a plus d’adhésion et de confiance apportées à Emmanuel Macron et à son député”. Pour justifier son analyse, la candidate écologiste rappelle que “le plus souvent, c’est la prime au sortant”. “Il aurait dû être dans une position plutôt positive, mais notre union de la gauche montre qu’il y a une forte dynamique, et ce, sur l’ensemble des circonscriptions des Français de l’étranger”.
Les électeurs et électrices, “insatisfaits par le quinquennat précédent”, seraient donc, selon elle, pour un changement radical. Son “bon score”, elle le doit aussi, pense-t-elle, à “une campagne nouvelle et différente” portée “par une belle énergie”. “On a su toucher différents types d’électeurs et les mobiliser”. L’alliance de la gauche dès le premier tour aurait aussi été un avantage pour la candidate. Lors du débat organisé par French Morning London avant le premier tour, certains de ses opposants, dont le député sortant, lui avaient pourtant reproché ce rapprochement avec Jean-Luc Mélenchon. “Il y a eu des propos caricaturaux sur lui comme sur l’Europe”. Des propos, dit-elle, qui n’ont pas lieu d’être. “J’essaie d’œuvrer dans cette campagne aussi avec mon identité d’EELV, j’ai l’Europe dans mon ADN, notre parti est profondément européen. J’ai vécu le Brexit et je ne veux absolument pas de cela pour la France”, assure Charlotte Minvielle.
De son côté, Alexandre Holroyd estime que c’est lui le grand vainqueur de ce premier tour. Les résultats parlent d’eux-mêmes, lance-t-il, “dix des onze candidats de la majorité présidentielle sur l’ensemble des circonscriptions sont arrivés en tête et cela, avec une large marge”. Cette “avance très nette” prouve, selon lui, que les Français et Françaises de l’étranger ont toujours autant confiance en le président de la République et les politiques qu’il mène. “On verra si cela se confirme à nouveau au second tour. Mais déjà, quand on regarde également l’écart entre les résultats de la présidentielle et de ce premier tour des législatives, on constate que Charlotte Minvielle, qui représente la NUPES, a perdu sept points”, analyse Alexandre Holroyd.
Pour lui, cela prouve que l’électorat des Français de l’étranger ne veut pas du programme de Jean-Luc Mélenchon, qui porte, selon lui, “une alternative anti-européenne”. Quant à l’alliance de la gauche, il considère que si certains socialistes et écologistes l’ont acceptée, ce n’était que “pour sauver ou obtenir des sièges”.
Si politique et mathématiques ne donnent pas toujours les résultats escomptés, les hypothèses de reports de voix doivent cependant être prises en compte. Alexandre Holroyd a un certain avantage sur ce plan. Le député sortant avait face à lui lors de la campagne du premier tour deux candidates qui se revendiquaient de la majorité présidentielle : Assamahou Lamarre et Laurence Helaili-Chapuis. La première a obtenu 4,7% des suffrages exprimés, la seconde 8,5%. Une réserve de voix supplémentaire non négligeable pour le député sortant, et Charlotte Minvielle ne peut pas en dire autant, surtout que l’alliance de la gauche a été faite dès le premier tour et que les candidats marqués à gauche (Parti animaliste, Fédération de la Gauche républicaine, Volt) n’ont pas fait de gros scores sur l’ensemble de la circonscription.
Laurence Helaili-Chapuis a déjà appelé à voter pour Alexandre Holroyd. Un geste que le député sortant salue. “Elle a mené une campagne exemplaire au premier tour et je la remercie de son soutien pour le second tour”, confie-t-il. Concernant Assamahou Lamarre, rien d’officiel n’a été annoncé. Mais, même si le député sortant estime que “chacun est libre de faire ce qu’il veut”, ne comprendrait pas que la candidate, qui se revendiquait donc de la majorité présidentielle, ne lui apporte pas son soutien. Quant à Artus Galiay, candidat Les Républicains qui a rassemblé 5,4% des suffrages, ses électeurs pourraient se laisser davantage convaincre par Alexandre Holroyd que Charlotte Minvielle, ne se reconnaissant pas en la gauche ou du moins peu tentés de voter pour une alliance portée par Jean-Luc Mélenchon. En cumulant les reports de voix de manière brute et si le taux de participation est le même, Alexandre Holroyd pourrait alors réunir près de 57% des suffrages au second tour. Et donc s’assurer la victoire.
Mais cela reste une hypothèse et Charlotte Minvielle compte bien déjouer les pronostics. La candidate écologiste est arrivée en tête dans tous les pays de la circonscription, sauf à Londres. Là-même où le nombre d’électeurs et électrices est le plus important. L’écart de voix y est de 4400 voix. Alors comment convaincre ? “ A Londres, il y a des profils différents, certains ne se sont peut-être pas encore mobilisés car moins en contact avec la politique, et ce sont eux qu’il faut aller chercher”, analyse la candidate écologiste. Elle espère les convaincre en organisant des événements (conférences, projection de films, rencontre avec la sénatrice Mélanie Vogel…) pour la rendre “la politique moins intimidante” et leur faire comprendre qu’il n’y a “pas de séparation entre la politique et ce qu’ils vivent quotidiennement”. “On doit réussir à leur dire que la politique c’est la mobilité verte, alimentation de bonne qualité, l’air qu’on respire. Il faut les convaincre de s’emparer de ces sujets, qu’ils ont un rôle à jouer en exerçant leur droit de vote”.
Elle croit en ses chances, rappelant que rien n’est encore joué. “On est sur les derniers jours de la campagne électorale. La dynamique au niveau national lors du vote dimanche 12 juin pourrait montrer que le changement est possible”, confie Charlotte Minvielle, “je ne pense pas que tous les électeurs vont voter pour Alexandre Holroyd. Il n’a pas su rassembler la majorité présidentielle au premier tour, cela prouve que les autres candidats n’approuvaient pas le bilan d’Emmanuel Macron”. Aller chercher ces 4000 voix manquantes, “c’est faisable”, assure-t-elle. “Je vais continuer à rappeler aux électeurs quelles sont mes valeurs à savoir qu’elles sont européennes, écologistes et sociales”.
“Les électeurs et les électrices ne veulent plus de cette inaction sur l’écologie et la justice sociale”, pense Charlotte Minvielle, “sans compter que le bilan du député sortant est désastreux. Il a voté pendant sa mandature pour la réintroduction des néonicotinoïdes et le maintien de l’utilisation du glyphosate. Et parallèlement, il a voté contre la baisse de la TVA sur les transports en commun. Ce que nous voulons, nous, c’est une écologie des actes et non pas des mots car on n’a plus le temps d’attendre”, explique-t-elle, rappelant que le dernier rapport du GIEC prévient qu’il ne resterait que trois ans pour agir afin d’inverser la tendance du réchauffement climatique. Si elle est élue, la candidate NUPES promet ainsi de “mettre l’écologie et la justice sociale au centre” de son mandat.
De son côté, Alexandre Holroyd continuera, si les électeurs lui accordent à nouveau confiance, à poursuivre son travail. “Le gouvernement a toujours œuvré à une vraie construction européenne, comme avec la mise en place d’un minimum européen, la défense d’un Green Deal européen ou encore le vote du plus grand plan de relance en Europe. Je veux continuer à avoir cette voix européenne à l’Assemblée nationale”, assure-t-il. Pour lui, voter Jean-Luc Mélenchon dont il estime “le programme dangereux”, c’est voter pour une “voix europhobe qui ressemble à celle des Brexiteurs, et où le respect des règles européennes n’existent plus si elles ne lui conviennent pas. En somme, c’est un premier pas vers la sortie de la France de l’Europe”. Le député sortant dit ainsi espérer que les électeurs et électrices feront le choix de la majorité présidentielle. “C’est le destin du pays qu’ils vont choisir. J’ai siégé cinq ans à l’Assemblée nationale et vu ce que Jean-Luc Mélenchon porte comme idées. C’est un eurosceptique notoire, qui assume fièrement sa radicalité”.
Débat du second tour
Les deux candidats débatteront lundi 13 juin à 6pm à l’Institut français du Royaume-Uni à Londres, situé au 17 Queensberry Place, London SW7 2DT.
Le public peut y assister et l’évènement sera également retransmis en direct sur les réseaux sociaux.
Inscriptions : ici
Pour en savoir plus sur leur programme :
Le vote
Le vote en ligne se déroulera entre le vendredi 10 juin à 11am (heure de Londres) et le mercredi 15 juin 11am (heure de Londres)
Le vote à l’urne se déroulera dimanche 19 juin.