Rentreront ou ne rentreront pas… telle est la question. De nombreux Français de Londres se posent la question d’annuler leurs billets prévus pour leur retour au pays lors des fêtes de fin d’année. En cause, les nouvelles mesures prises, suite à la découverte de cas du variant Omicron, par le gouvernement britannique et restreignant les conditions d’entrée au Royaume-Uni. Sans compter celles prises par l’Etat français et qui ont été annoncées mercredi 1er décembre.
Laurianne* est inquiète. “La nuit dernière, j’ai même très mal dormi”, reconnaît-elle. Elles redoutent que les dispositions britanniques puissent évoluer dans le mauvais sens, et que les autorités bloquent davantage le retour depuis la France. Le pire scénario : que le pays soit classé en liste rouge avec comme conséquence une quarantaine obligatoire dans un hôtel et aux frais du voyageur. “Et puis, même au-delà de ça, les tests PCR à nouveau imposés c’est un vrai coût, surtout quand on est une famille”. Le problème reste aussi que d’attendre les résultats peut poser un problème pour les enfants, qui pourraient alors manquer l’école et rester à la maison, ce qui peut raviver les vieux souvenirs du premier confinement.
La Française installée à Londres ne cesse donc de regarder chaque jour si les mesures ne changent pas non plus du côté français, “comme cela a été le cas l’an dernier”. Car elle redoute que la France prenne elle aussi des dispositions, comme ce fut le cas lors du Noël 2020 et qu’elle a décidé alors de fermer ses frontières du jour au lendemain. “L’an dernier, c’était la déprime profonde. Même si j’étais avec mon mari et mes enfants, il n’y avait que nous à la maison, on ne pouvait même pas recevoir des amis”. Seule consolation à l’époque, elle avait organisé avec les voisins un barbecue, dans le froid, et chacun de son côté.
Syrine*, elle, a paniqué à l’annonce des nouvelles mesures, “car les règles sont changées à la dernière minute et on n’a pas forcément le temps de s’y retrouver. D’autant plus que les règles n’ont pas été mises à jour directement sur le site du gouvernement”. La panique a ensuite laissé place à l’indécision, ajoute la jeune femme, “car le climat actuel fait penser à celui de l’année dernière où les règles avaient été changées en dernière minute juste avant Noël”.
Si elle comprend que “des décisions sont prises en amont pour essayer de contenir l’épidémie et nous éviter des mesures trop drastiques”, ces changements ont poussé la Française de Londres à réfléchir à annuler son retour en France, qui était prévu mi-décembre. “Je suis très déçue de la mesure concernant l’isolement”, confie celle qui est vaccinée, “on a l’impression de ne plus pouvoir circuler librement d’autant plus que les résultats des tests peuvent mettre une semaine à arriver selon le laboratoire”. Malgré tout, elle préfère pour l’heure maintenir ses billets. “Je prendrai probablement une décision quelques jours avant mon départ pour voir comment la situation évolue. Pour l’instant je penche pour rentrer malgré les restrictions”.
Le test PCR à faire au retour, Syrine le comprend. “Étant donné que l’on voyage pendant une pandémie, il faut s’attendre à des mesures et par conséquent des coûts supplémentaires”, reconnaît-elle, “je suis habituée à payer davantage pour des tests désormais, bien que je pense qu’ils devraient être gratuits pour tous ou bien fixer une somme à un prix assez bas”. Une réflexion que partage d’ailleurs Laurianne. “Les résidents ou citoyens britanniques devraient avoir accès à la gratuité de ces tests PCR ou au moins une certaine prise en charge”, estime-t-elle, “on paye des taxes au Royaume-Uni et nous ne sommes pas des touristes, et puis si on fait le test localement on est plus sûr d’avoir le résultat à temps”.
La mère de famille regrette d’ailleurs que les Français du Royaume-Uni ou les Britanniques de France soient vus avant tout comme “des vacanciers”. “Ce qui m’agace c’est qu’on ne prend pas en compte qu’on ne rentre pas en France pour se dorer la pilule, mais pour aller voir nos familles. Mes parents et ceux de mon mari ont failli ne pas voir leurs petits-enfants pendant près de deux ans”.
Revoir sa famille, c’est aussi ce qu’espère faire Keisuke* à Noël. Le jeune homme, qui travaille dans un grand magasin de Londres, doit rentrer le 23 décembre, pour trois jours seulement. Sauf que l’isolement imposé le temps d’obtenir le résultat du test n’est pas compatible avec son emploi. “Deux jours c’est déjà contraignant, mais si en plus je dois attendre plus longtemps pour savoir si je suis négatif ou pas, mon employeur ne sera pas d’accord”. Le Français pense donc davantage à annuler son retour, même s’il lui reste un dernier espoir. “J’essaie de voir avec un de mes collègues s’il peut me remplacer au cas où”. La situation, Keisuke, la trouve “déprimante”. “Déjà, je sais que je ne vais pas non plus pouvoir aller voir la partie de ma famille qui est au Japon. J’avais prévu de partir en mars, mais le pays vient juste de fermer ses frontières et je ne sais pas pour combien de temps”, se désole-t-il.
Globalement, ce qui inquiète aussi ces trois Français, c’est qu’une nouvelle donnée s’est ajoutée cette année : les tensions diplomatiques entre la France et le Royaume-Uni. Un “combat politique”, qui impacterait, selon eux, fortement les citoyens des deux côtés de la Manche. “C’est nous qui souffrons, qui sommes perdus et anxieux”, lance Laurianne, qui regrette le manque de communication et d’harmonie entre les deux pays. “On se souvient encore de l’histoire du pass sanitaire de cet été”, se désole-t-elle, “l’humain n’est jamais pris en compte, les gouvernements devraient nous consulter, car nous ne sommes pas que des données d’un côté comme de l’autre. On en vient à se demander si tout cela n’est pas que le résultat du Brexit et des tensions actuelles”. Cela étant dit, la Française explique préférer de toute façon se concentrer sur comment résoudre le casse-tête des fêtes. “Je pense que si on rentre, on prendra la voiture, ça évitera les trains annulés ou retardés à cause des changements de dernière minute”.
*Les personnes interviewées n’ont pas souhaité que leur nom de famille apparaisse dans l’article.