Birmingham, deuxième plus grande ville du Royaume-Uni, ne fait pas l’unanimité dans l’opinion populaire des Britanniques. Des propos virulents au désintéressement total pour cette ancienne cité industrielle, les facteurs de ce clivage sont multiples selon l’historien Carl Chinn, auteur de plus d’une trentaine d’ouvrages sur la ville. Se décrivant comme un “fier Brummie” (habitant de Birmingham, ndlr), le spécialiste pointe l’arrogance de la classe moyenne supérieure du Sud de l’Angleterre.
“La plupart d’entre eux ne sont jamais venus à Birmingham”, commence-t-il par souligner. S’exprimant avec le fameux accent des “Peaky Blinders” (nom d’un gang qui a agi entre la fin du 19ème siècle jusqu’aux années 20), Carl Chinn dénonce les préjugés auxquels il a dû faire face et qui sont pour lui le résultat de l’ignorance. L’accent “brummie” serait perçu comme “mal élevé” pour reprendre les mots de l’historien, un stéréotype traduisant une “rivalité de classe” au sein des Britanniques moyens.
“La classe ouvrière est liée, peu importe le lieu où elle se trouve, ce qui n’est pas le cas de la classe moyenne supérieure”, affirme t-il, mettant en avant une compétition entre Londres et Birmingham. Il élargit d’ailleurs son analyse à d’autres villes au passé industriel comme Glasgow ou Liverpool. Connaissant également la diversité linguistique française, il compare l’exemple britannique à l’Hexagone, opposant Paris et les différents patois tels que le Basque ou le Provençal.
De plus, il ne s’agirait pas que d’une question d’accent. L’indignation de Carl Chinn se fait aussi sentir lorsqu’il évoque certains discours médiatiques. En effet, il qualifie de “pathétique” le débat opposant Manchester à Birmingham, pour la place de deuxième ville du Royaume-Uni. “Cela n’a aucune importance !”, s’exclame-t-il.
L’historien fait référence également à des enquêtes sur les “Brummies” publiées dans la presse écrite il y a une trentaine d’années, dénonçant qu’elles n’auraient pas été fondées sur des faits sociaux scientifiquement prouvés. Les médias alimenteraient donc certains préjugés.
Cependant, remontant plus loin dans le temps, Carl Chinn rappelle que cette mauvaise réputation n’a pas toujours été ainsi. En effet, avant la centralisation de la gouvernance économique à Londres au début du XXème siècle, Birmingham figurait parmi les villes les mieux gouvernées du monde.
Cependant, sous Margaret Thatcher, la politique de privatisation des industries telles que celle du gaz ou de l’eau, qualifiée de “cupide” par le spécialiste, a changé la donne au profit de Londres.
Enfin, Carl Chinn ne peut mentionner Birmingham sans parler des Peaky Blinders. Ce gang de criminels de la fin du XIXème siècle est aujourd’hui principalement connu par le grand public à travers la série diffusée sur la BBC et Netflix du même nom. L’historien, dont l’arrière-grand-père était un Peaky Blinders, juge bon de rappeler qu’ils ne furent rien d’autres que des gens “mauvais”. “Il n’y a aucun aspect glamour dans ce genre de gang comme pourrait le laisser penser la série”, insiste-t-il.
Malgré cet épisode, le spécialiste précise que la chronologie de la série ne correspond pas à la réalité. En effet, en 1910, les journaux parlaient déjà de ce gang au passé. Ainsi, il réhabilite l’image de Birmingham que dans les années 1920 comme étant une ville paisible.