Ce n’était pas prévu au programme des vacances, mais c’est arrivé. Le séjour en France s’entache d’un accident de voiture avec un véhicule assuré en Grande-Bretagne. Comment réagir, qui contacter, qu’anticiper en amont ?
Alors qu’elle roule sur le périphérique parisien en direction de Calais pour un retour en Grande-Bretagne, Charlotte est percutée par un deux-roues. « Une voiture a changé de file devant moi et j’ai dû freiner. Une mobylette qui se faufilait entre les voitures m’a alors percutée ». Par chance, aucun blessé. Les deux conducteurs font un constat à l’amiable, détaillant les dommages causés à la carrosserie et au rétroviseur de Charlotte. « L’après-midi même, en arrivant chez moi, j’ai appelé mon assurance anglaise pour expliquer ce qui s’était passé ». Compliquée par le fait que le conducteur de la mobylette, fautif mais considéré comme vulnérable du fait de type de son véhicule, l’affaire n’était pas encore réglée deux mois plus tard.
« Avant de partir en France, vérifier sa couverture dans la police d’assurance », indique Maud Lepez, avocate chez Pierre Thomas Law, cabinet spécialisé dans les dommages corporels avec une composante internationale. « Si au Royaume-Uni une police d’assurance est ‘comprehensive’ (‘tous risques’ en français), elle ne l’est pas forcement au-delà de la frontière et peut être alors limitée au tiers ». C’est-à-dire qu’elle ne couvrira que les dommages causés aux autres.
On peut cependant demander une extension tous risques pour la durée des vacances. Quel que soit le niveau de couverture choisi, « bien lire toutes les petites lignes du contrat », conseille Hélène, Française de Londres. En pleines vacances d’été en France, une voiture recule malencontreusement dans la sienne, la direction est faussée. L’assurance se montre réactive au début, et finance un véhicule de remplacement, ce qui permet à la famille de poursuivre ses vacances. Trois semaines plus tard, le véhicule accidenté n’a pas été réparé et l’assurance ne prend plus en charge le véhicule de courtoisie. La rentrée des classes approchant, la famille doit rentrer en Angleterre et se voit contrainte d’acheter des billets de train au prix fort. « L’assurance a payé les réparations, mais qu’une partie du rapatriement. Je conseille aussi de bien documenter les conversations ».
Avant toute chose, il convient d’établir un constat à l’amiable, chose qui n’existe pas en Grande-Bretagne. Ensuite déclarer l’accident à son assurance. Si la voiture n’est pas en état de rouler pour rentrer en Grande-Bretagne, l’assurance organisera l’expertise et les travaux. « Parfois c’est une total loss : le véhicule n’est pas économiquement réparable. L’assurance remboursera alors le prix de l’épave », indique l’avocate Maud Lepez.
En cas de responsabilité, « l’autre partie (par son assurance ou par un avocat) va faire un recours contre votre propre assurance. Les parties détermineront les responsabilités et les préjudices. Il y aura un rapport d’experts automobiles sur les voitures et une expertise médicale en cas de dommages corporels. Ensuite les montants sont discutés », poursuit l’avocate. L’assurance du responsable s’occupe de tout. Des discussions à l’amiable ou au tribunal auront lieu en cas de contestation des responsabilités, et vous pouvez être amené à témoignager.
En cas de non responsabilité, pour ce qui concerne les dommages matériels, il faut tout de suite appeler son assurance pour organiser les éventuels remorquage, réparations, expertises. En cas de dommage corporels pour soi, il est très important de documenter. Dans les cas graves, il y aura hospitalisation et donc documentation. « Si ce n’est pas très grave, il vaut mieux tout de même obtenir un certificat médical. Cela facilite les preuves et permet d’éviter les contestations, conseille Maud Lepez. Car parfois le mal de dos ou de cou, ce qu’on appelle un ‘whiplash’, se développe seulement quelques jours après l’accident », d’où risque de contestation du lien entre les deux évènements. L’évaluation des dommages corporels menant à une indemnisation peut être longue à obtenir. « En cas de blessures graves, il faut un certain temps pour connaitre le stade guérison maximal afin de pouvoir évaluer les préjudices ».
S’il faut aller en justice, un certain flou juridique règne depuis le Brexit. Auparavant, la victime pouvait s’adresser tant aux tribunaux français (lieu de l’accident) que britanniques (lieu de résidence de la victime). Si une contestation devant tribunaux français est toujours possible, pour ce qui est des tribunaux anglais, « on attend que la jurisprudence se développe, ce n‘est plus un droit automatique comme avant le Brexit. C’est parfois plus avantageux de le faire en Angleterre, notamment avec les conventions d’honoraires ‘no win no fee’. En tant qu’avocate dans les deux juridictions, j’essaie de faire la réclamation en Angleterre ».