« Le 31 janvier 2020, le Royaume-Uni a quitté l’Union européenne. Nous avons pris cette décision pour reprendre le contrôle, décider de nos propres lois et gérer nos finance de manière indépendante. » Tels sont les mots du Premier ministre Boris Johnson qui ouvrent le rapport “Les avantages du Brexit”. Publié en début d’année, ce document long de 101 pages énumère les opportunités que présente ce divorce politique et économique. De la campagne menée par le camp Leave au départ officiel du Royaume-Uni de l’Union en janvier 2021, les gouvernements successifs britanniques ont en effet toujours promis des changements rendus possibles par l’indépendance politique et économique du pays. Un an plus tard, une question se pose. Le Brexit présente-t-il des avantages tangibles ?
Pour Philippe Chalon, secrétaire général du groupe de réflexion Le Cercle d’Outre-Manche, les premières lignes du rapport trahissent les failles des arguments présentés par le gouvernement de Boris Johnson. « Les points d’entrée du rapport sont sujets à caution. La souveraineté de la livre sterling était déjà bien affirmée alors que le pays était membre de l’Union européenne », observe-t-il. Il rappelle alors que lors de la crise économique de 2008, Londres a librement dévalué sa monnaie pour faire face à la récession imminente.
Par ailleurs, la rhétorique anti-immigration utilisée par Nigel Farage, anciennement à la tête du UK Independent Party (UKIP) et du Brexit Party, était un des moteurs de la campagne en faveur du départ de l’Union européenne. Dr. David Lutton, directeur des affaires externes de la Chambre de commerce franco-britannique à Londres, explique que si 67 % des entreprises britanniques ont réduit leur proportion de recrutement de stagiaires et de contrats VIE en 2021 originaires de l’Union européenne, le gouvernement britannique a mis en place de nombreuses avenues pour encourager l’arrivée légale de travailleurs internationaux. « Si le gouvernement britannique a supprimé la libre circulation des individus, des systèmes ont été mis en place pour les travailleurs étrangers. » Le graduate visa scheme permet par exemple aux étudiants ayant obtenu leur diplôme au sein d’une université britannique de rester au Royaume-Uni pour une période maximale de deux ans. Le high potential visa, prévu pour les diplômés d’universités prestigieuses, représente une autre avenue pour les européens souhaitant s’établir au Royaume-Uni.
Pour faire face au départ du Royaume-Uni du marché commun, le gouvernement prévoit l’investissement de 180 millions de livre sterling dans l’objectif de réduire les frictions d’import et d’export de marchandise d’ici à 2025. Comme le souligne Dr. David Lutton, « il est très positif de savoir que des financements seront investis dans la coopération entre les pays, le partage des données et une plus grande automatisation des contrôles pour réduire les frictions dans les échanges commerciaux ». Malgré ces annonces d’importants financements, l’élaboration d’une stratégie efficace permettant au Royaume-Uni de se positionner en tête des échanges commerciaux européens se fait toujours attendre.
La feuille de route annonce « un monde d’opportunités à venir », pour faire du Royaume-Uni « l’économie la mieux régulée au monde », notamment grâce à son leadership dans des domaines tels que la science, la technologie, l’entrepreneuriat et le climat. Le gouvernement prévoit une nouvelle stratégie permettant de favoriser l’innovation et la technologie avec l’investissement de « financements inédits » dans la recherche et le développement. Les dépenses publiques destinées à la science devraient atteindre les 20 milliards de livres sterling d’ici 2025. En attendant cette échéance, les scientifiques britanniques peuvent bénéficier du programme européen Horizon Europe. Financé à hauteur de 95.5 milliards d’euros par l’Union européenne, le programme reste ouvert au Royaume-Uni après l’annonce d’un partenariat entre le gouvernement britannique et la Commission européenne en janvier 2022. En somme, la ressemblance entre les avantages du Brexit et ceux offerts par l’adhésion à l’Union européenne reste frappante.