Le “zéro déchet” c’est, comme son nom l’indique, vivre en ne produisant aucun ou très peu de déchets. Et c’est assez difficile d’appliquer ce principe de vie à Londres, avec ses grands supermarchés où tout est emballé avec du plastique non-recyclable. C’est justement pour répondre à ce challenge que la Française Alicia Bulbeck, 27 ans, a décidé de créer ‘Zéro’ à Wimbledon, une boutique qui vend tout ce qu’il vous faut pour changer vos habitudes de consommation.
Pour elle, la transition ne s’est pas faite du jour au lendemain, puisqu’elle a toujours été intéressée par la question environnementale. Originaire de Biarritz, elle fait ses études à Nantes et part en Erasmus en Italie, où elle rencontre son mari anglais Josh Bulbeck. “J’avais pris l’habitude de faire mes courses dans les petits marchés locaux, et puis il y avait déjà des magasins zéro déchet comme ça. C’était pareil en Italie, avec cette culture d’aller chez le boucher pour la viande, le fromager pour le fromage, etc.”
Alicia Bulbeck rejoint son mari à Londres en 2015 et trouve un emploi dans la finance. Très vite, ils se rendent compte que les choses sont très différentes ici : “On a eu un peu de mal quand on est arrivés à Londres, il y a beaucoup de sur-emballages au supermarché, comme pour le concombre qui est emballé dans du plastique. On suffoquait !” Le couple décide de passer au zéro déchet en juillet 2018, à l’occasion du “plastic-free July”, mais ils constatent que c’est impossible de le faire tous les jours, et c’est ce qui les a motivé à imaginer Zéro. “On voulait créer un endroit où nous on aimerait faire nos courses.”
Ils en parlent autour d’eux, dans leur quartier à Wimbledon. À l’époque, les boutiques zéro déchet à Londres sont rares, même si, reconnaît Alicia Bulbeck, les mentalités commencent aujourd’hui à changer. “En France on a pas mal de magasins zéro déchet. À Londres, au moment où on s’est lancé, il n’y avait que 6 boutiques zéro déchet. Ce n’est pas beaucoup par rapport au nombre de supermarchés Tesco par exemple. Mais je pense que justement il y a vraiment une opportunité.”
Le couple franco-anglais ouvre Zéro en mars 2019 avec l’aide d’une campagne de crowdfunding et a pu récolter environ £2.800. Étonnamment, le concept marche plutôt bien. “Il y a des gens qui viennent par curiosité et qui se rendent compte que c’est pas si compliqué ça, et que ça a du sens au final de faire ses courses comme ça.”
La gamme de produits est très large : de la nourriture en vrac, des produits ménagers et même des produits de beauté, avec du dentifrice en tablette par exemple. De plus, les prix sont les mêmes qu’en supermarché. “On n’a pas voulu être un magasin ‘bobo’, on voulait vraiment être accessible à tout le monde. On a essayé d’avoir le plus de produits possibles.” Pour les adeptes du zéro déchet, il faudra évidemment amener vos propres contenants pour pouvoir vous servir. Et les débutants pourront en acheter directement à la boutique.
C’est aussi compliqué de ne pas produire de déchets à l’échelle de la boutique, avance Alicia Bulbeck. “L’objectif principal, c’est d’éviter le plastique. On essaye quand on peut de s’arranger avec les fournisseurs, même si c’est plus facile avec les petits fournisseurs.” Par exemple, pour les œufs, la boutique se fait livrer une fois toutes les deux semaines et rend les boîtes la semaine suivante, “comme ça il n’y a vraiment aucune perte d’emballage !” Le reste, comme les pâtes, le riz et la farine, leur sont livrés dans des sacs en papier qu’ils recyclent. Cependant, certaines choses sont encore livrées dans des bidons en plastique, qu’ils essayent de réutiliser autant qu’ils peuvent.
Zéro propose de nouveaux produits tous les mois environ, au gré des fournisseurs et des demandes des clients, qui viennent parfois leur faire des suggestions. Prochaine étape, “les fruits et légumes et le frais. On voudrait aussi faire des livraisons, c’est vrai qu’à Londres les gens sont super occupés, ils se font livrer très souvent. Après ça demande un petit peu de logistique, c’est pas facile de livrer sans emballage !” Elle pense déjà à ouvrir une deuxième boutique “d’ici 1 ou 2 ans.”
Ses conseils pour passer au zéro déchet à Londres : “Venez chez Zéro ! Je pense que ça commence par se poser les bonnes questions, juste d’ouvrir son placard dans la cuisine et se dire ‘qu’est-ce que je peux remplacer’, etc. À la maison, on n’est pas encore 100% zéro déchet, mais on y arrive. En un an déjà, on a réduit de moitié nos déchets”, explique la Française très optimiste, “on se rend compte que tout le monde commence à faire attention à tous les petits trucs. Il faut faire un peu de dépoussiérage ! Il ne faut pas lâcher tout son confort non plus, l’idée n’est pas de vivre comme des hippies !”