“Après toutes ces années, j’avais envie de raconter comment fonctionne Westminster mais de manière ‘fun’, à travers les potins et les rumeurs qui entourent les députés, les conseillers, les journalistes, les lobbyistes. C’est vraiment un ouvrage accessible à tous, avec beaucoup d’anecdotes, qui permet de comprendre l’éco-système de cette bulle politique”. Marie Le Conte aura mis six mois pour écrire Haven’t you heard, sorti jeudi 5 septembre. La Française de 27 ans a puisé dans son vécu de journaliste politique, qu’elle exerce depuis 6 ans à Londres.
“Le Parlement, c’est Poudlard”, résume la jeune femme, en référence à l’école du célèbre Harry Potter. Justement c’est le personnage littéraire de la Britannique J.K. Rowling qui lui a donné des envies de Royaume-Uni. Mieux, c’est le jeune sorcier qui lui aura permis de devenir bilingue. “Je lisais tous les livres en version originale”, se souvient-elle. Fascinée par la culture outre-Manche, elle se dit donc qu’elle ira vivre un jour en Angleterre. Marie Le Conte est aussi convaincue d’une chose : elle veut devenir journaliste. “J’ai fait mon stage de 4ème pendant une semaine au sein de la rédaction de Ouest France, et j’avais adoré”, confie la Nantaise d’origine. L’écriture l’a toujours accompagnée. A 13 ans, elle tenait déjà un blog avant d’en lancer un autre entre 15 et 18 ans sur la musique indépendante, où elle publie des interviews de groupes… britanniques.
Petit problème : Marie Le Conte n’aime pas les études. “Je n’y voyais pas d’intérêt”. Mais elle sait qu’elle n’aura pas le choix si elle veut devenir journaliste. En cachette de ses parents, elle postule à différentes universités britanniques, celle de Westminster accepte sa candidature. A 17 ans, elle débarque donc dans la capitale anglaise. Sa vie est rythmée par les cours mais aussi et surtout par les sorties, ce qui ne l’empêche pas de décrocher son diplôme après quatre ans sur les bancs de l’école de journalisme. La Française fera son stage de fin d’études au sein de la rédaction de New Statesman avant qu’une amie qui travaillait au Telegraph lui propose de la remplacer deux semaines, le temps de ses congés, au poste d’iconographe.
Finalement, le quotidien lui propose un mi-temps à la fin de ce remplacement. En janvier 2014, elle se lance en freelance. Elle travaille notamment pour le Mirror, qui souhaitait lancer une version calquée sur BuzzFeed. Marie Le Conte y restera jusqu’en 2015, année où elle commence à travailler pour l’Evening Standard où elle tient une colonne, dont ses textes se veulent être “un mix entre Gala et le Canard Enchaîné”. Elle y parle des politiques mais sous un angle quelque peu mondain. La Française, qui a “adoré ce poste”, y développe d’ailleurs un intérêt certain pour le monde politique. Son écriture, son style, son panache sont appréciés. À l’été 2015, elle décroche un poste permanent pendant un an.
Le résultat du référendum sur le Brexit l’année suivante lui met un coup. “Cela a été un choc complet, je ne m’y attendais pas. Cela nous a tous pris par surprise. Cela a été dur émotionnellement”. Marie Le Conte quitte alors The Evening Standard pour devenir correspondante politique pour le site BuzzFeed, mais au bout d’une année, la jeune femme décroche. “Cela ne m’a pas vraiment plu”. En 2017, elle redevient freelance avec une prédilection pour la politique à 95% britannique et à 5% française. Les médias savent qu’ils peuvent la contacter quand il s’agit de faire des commentaires sur la politique française. “Quand Emmanuel Macron dit quelque chose, je suis invitée partout pour commenter, car même si je suis journaliste pour des titres britanniques, je n’en reste pas moins française dans leur esprit”, rit-elle. Sur son CV, elle aligne des grandes publications comme The Guardian, The Daily Telegraph, The Daily Mirror, The Sunday Time, Tatler, GQ, Glamour, mais aussi le magazine interne du Parlement. “Ce qui me plaît et me motive, ce sont les articles de fond, où j’aborde toujours le monde politique avec une dimension humaine”.
La journaliste avait envie d’écrire quelque chose depuis longtemps, mais sur quoi ? C’est lors d’une insomnie que l’idée de son livre lui viendra au printemps 2018. Le pitch de Haven’t you heard : quel rôle jouent les indiscrétions et rumeurs en politique, elle qui connaît les couloirs du Parlement par cœur et à qui de grandes personnalités politiques britanniques confient leurs secrets d’alcôve ? Elle en sait des choses, et ce grâce à son carnet d’adresses qu’elle s’est constituée depuis ses premiers pas dans le journalisme.
Le sujet plaît tout de suite et une maison d’éditions décide de lui offrir un contrat. Pendant six mois, de juillet à décembre, Marie Le Conte écrit ce qui va donc être son tout premier ouvrage. Une expérience stressante, mais aussi le plaisir de voir se concrétiser à nouveau un de ses rêves, après celui de s’être imposée comme une des journalistes les plus influentes de Londres. “J’ai été chanceuse. Les contacts que j’ai pu me créer au fil des années m’ont beaucoup aidée, mais je pense que Twitter a été une mini-révolution pour moi, cela m’a fait connaître”.
Si elle est reconnue par ses pairs, la Française l’a aussi été par un grand magazine : Forbes, qui a classé la jeune femme de 27 ans parmi les 30 personnes de moins de 30 ans les plus influentes d’Europe dans la catégorie Média et Marketing en 2018. Une fierté pour elle mais aussi et surtout pour ses parents, qui ne doivent donc pas regretter le choix de l’avoir laissée partir étudier de l’autre côté de la Manche il y a 10 ans.
Marie Le Conte, qui part en tournée promotionnelle en septembre et en plein Brexit, a encore beaucoup d’autres rêves qu’elle aimerait réaliser. “J’aimerais beaucoup écrire un roman, et pourquoi pas aussi une pièce de théâtre”.