En Angleterre, le déconfinement continue avec la réouverture progressive des commerces. Début juin, les marchés extérieurs et les concessionnaires auto recevaient le feu vert du gouvernement pour rouvrir leurs portes. A partir du 15, c’est au tour des magasins de vêtements, de chaussures, de jouets, des librairies, entre autres, d’accueillir à nouveau des clients. A condition, bien sûr, de respecter certaines mesures d’hygiène et de sécurité liées au contexte sanitaire actuel. Des enseignes françaises reviennent sur ce qu’elles ont imaginé pour leurs boutiques.
A la Librairie La Page, l’activité n’a jamais cessé depuis le début du confinement. Isabelle Lemarchand, propriétaire des lieux, et ses employés ont pu satisfaire les commandes de leurs clients, passées entre autres en ligne ou par téléphone. “On a eu de la chance, car nous proposions déjà une boutique en ligne, explique la Française. On s’est aussi très bien organisés pour honorer toutes les commandes et livrer.” Il a fallu également juguler le fait qu’il y a eu peu de livraisons depuis la France pour diversifier et mettre à jour l’offre littéraire dans cette librairie de l’ouest de Londres. “Mais on a réussi à vendre ce que nous avions déjà, on a eu de très bons retours de la communauté francophone et francophile, tout s’est passé de manière très agréable.”
Isabelle Lemarchand se dit cependant très contente de la réouverture complète de sa boutique de South Kensington et n’est pas inquiète concernant l’accueil des clients. “Cela a été facile à organiser, reconnaît-elle. On va faire en sorte qu’il n’y ait pas trop de gens.” Les horaires d’ouverture ne changeant pas, elle pense que le roulement se fera très naturellement. “Les gens ne vont pas rester 25 minutes dans les rayons, ils vont moins flâner en raison du contexte et feront, j’en suis sûre, preuve de coopération.”
Un sens de circulation sera mis en place pour maintenir la distanciation sociale entre les personnes. La librairie sera également nettoyée toutes les heures. “Tout le monde portera des masques et des gants pour conseiller et servir les clients.” Isabelle Lemarchand tient beaucoup à ce que ses employés se sentent aussi à l’aise que les acheteurs. “C’est très important pour moi”, confirme la libraire. Elle espère que, dès l’ouverture lundi 15 juin, les clients répondront aussi présents que pendant le confinement. “On s’est aperçus avec cette situation que le contact humain était essentiel, c’est pourquoi il faut préserver le commerce de proximité. La Librairie La Page a fêté ses 40 ans l’an dernier, elle en a vu passer pendant ces quatre décennies. Si elle est toujours là, c’est qu’il y a une raison et que les gens l’ont toujours soutenue.”
La marque française de bijoux Claire Naa dispose de deux établissements dans la capitale britannique : l’un à Covent Garden, l’autre à Notting Hill. Des boutiques qui devraient toutes les deux faire leur réouverture lundi 15 juin, conformément aux préconisations des autorités anglaises. Bien sûr, des précautions ont été prises. Ainsi, pour protéger au mieux les clients susceptibles de vouloir examiner d’un peu plus près bagues, colliers et autres boucles d’oreilles, l’enseigne prévoit d’inviter sa clientèle à se laver les mains à l’aide d’un produit désinfectant dès l’entrée des magasins. Nettoyés avant la réouverture, les bijoux seront désinfectés à nouveau à chaque manipulation. “Chaque fois qu’un bijou aura été touché, on le nettoie”, confirme la fondatrice Claire Naa.
Des masques seront également portés par le personnel. Le nombre de clients dans les boutiques sera limité et un marquage au sol mis en place pour encourager les visiteurs à conserver les 2 mètres de distance. Le dispositif est désormais bien rodé, l’enseigne ayant eu le temps d’acquérir de l’expérience avec la réouverture, quelques semaines auparavant, de ses boutiques en France et en Italie. Sa clientèle habituelle étant en grande partie composée de touristes – et ces derniers étant actuellement en difficulté pour se rendre au Royaume-Uni –, Claire Naa espère pouvoir compter sur les Londoniens pour acheter ses bijoux. En France, en tout cas, “la clientèle locale est revenue.”
Du côté d’Agnès b., célèbre maison de prêt-à-porter française qui compte trois boutiques – à Covent Garden, Marelybone et New Bond street – à Londres, le nombre de pièces que la clientèle pourra essayer à chaque fois sera “limité”. “Le client devra laisser les vêtements dans la cabine après l’essayage. Ceux-ci seront placés en ‘quarantaine’ pendant 4 heures, passés à la vapeur puis rapportés au niveau des rayons. Naturellement, les cabines d’essayage seront nettoyées après chaque client”, précise l’enseigne qui indique suivre les recommandations officielles. Pour ce qui est des chaussures, que la marque propose également dans une moindre mesure, des “chaussettes à usage unique” seront proposées à la clientèle lors des essayages. “Les chaussures seront ensuite mises en quarantaine pendant 72 heures.”
A côté de ces mesures directement liées aux essayages, l’enseigne cherchera aussi bien sûr à limiter le nombre de personnes dans ses boutiques, lesquelles auront par ailleurs tendance à réduire leurs horaires d’ouverture afin d’éviter à leurs employés de se déplacer aux heures de pointe, principalement. “Nous surveillerons tout cela au fur et à mesure et lorsque les gens commenceront à se sentir en sécurité pour faire du shopping, nous tenterons de revenir à la normale.”
Le personnel devrait aussi être muni de masques – lesquels seront également à disposition des clients – et de gants. Des vitres protectrices seront placées au niveau des caisses, l’accent mis sur le paiement sans contact (très utilisé, de toute façon, dans ces magasins) et du produit pour se laver les mains proposé au public. Bien sûr, tout cela aura demandé un peu de préparation et les boutiques n’ouvriront pas toutes en même temps. Celle de Marelybone devrait être la première à faire sa rentrée lundi 15 juin. Suivie par le magasin de Covent Garden mercredi 17. La date de réouverture de la boutique de New Bond street n’a pas encore été confirmée.
Certains gros noms du “homeware” comme Ikea avaient déjà fait leur rentrée il y a quelques jours. Magasin de meubles et d’accessoires pour la maison “made in France” (ainsi que de petits accessoires de mode tels des sacs ou des écharpes), situé au nord de Londres, Little Paris Store s’apprête lui à rouvrir mardi 16 juin. Un certain nombre de précautions ont donc été prises pour l’occasion, comme le fait de mettre à disposition des clients du gel hydroalcoolique à l’entrée de la boutique et au niveau du comptoir. Pour Nicolas Peponnet, propriétaire de l’enseigne, il paraît compliqué de se passer complètement du toucher dans la pratique commerciale. “C’est vraiment pour ça qu’on mettra le gel à disposition à l’entrée du magasin”, explique-t-il. Mais pense que les gens auront de toute façon tendance à jouer le jeu. “C’est rentré dans nos habitudes, maintenant, cette distanciation.”
“On prévoit aussi de nettoyer plus souvent notamment le comptoir, la machine à carte.” Quant aux employés, ils devraient porter des masques – en tissu, pour des raisons écologiques – “s’ils doivent s’approcher de la clientèle et leur faire voir des choses, leur expliquer les produits.” Là encore, le nombre de clients dans l’établissement devrait être limité. “A 5 personnes”, précise Nicolas Peponnet. Pour le responsable de Little Paris, la semaine qui s’annonce sera une semaine “test”. “On va voir comment les gens vont se comporter, les retours qu’on a aura des clients par rapport à ça, si c’est ‘too much’ ou pas.” L’idée étant bien sûr de s’adapter au mieux pour le confort des uns et des autres. Quelque peu inquiet de l’impact de tout ce contexte sur sa clientèle, Nicolas Peponnet insiste : “Il faut vraiment que les gens se sentent bien en entrant dans le magasin.”
Londres devrait donc s’animer encore un peu plus cette semaine. Mais les commerces sont encore loin d’avoir tous fait leur rentrée : pubs, restaurants ou coiffeurs n’ont toujours pas rouvert. Et devront probablement attendre juillet avant de pouvoir recevoir à nouveau des clients.