Le ministre de l’Economie et des Finances s’est rendu à Londres pour deux jours, lundi 5 et mardi 6 mars. “Ce déplacement fait suite à celui du Président de la République (jeudi 18 janvier, NDLR), je n’avais pas pu venir à ce moment-là pour l’accompagner, mais je m’étais engagé à venir voir Philip Hammond (son homologue britannique, NDLR)”, a confié Bruno Le Maire lors d’une conférence de presse, mardi 6 mars à la Résidence de France, en présence de l’Ambassadeur Jean-Pierre Jouyet.
Pour le ministre, ce rendez-vous a permis de faire le point sur le sujet très brûlant du Brexit, mais aussi des relations économiques franco-britanniques, ainsi que de l’avenir de l’Europe. “Les négociations sont en cours, des deadlines ont été fixées par les Etats membres, et c’est Michel Barnier qui est en charge des discussions”. Bruno Le Maire a donc été clair : il n’était pas question pour lui, lors de ces échanges avec Philip Hammond, de faire de l’ingérence dans ce dossier.
Cependant, Bruno Le Maire a rappelé la position de la France – et plus largement de l’Union Européenne -, notamment sur un point très particulier : les services financiers. “Je souhaite que le libre-échange soit maintenu, le Royaume-Uni est un partenaire commercial essentiel et important pour la France. On doit préserver et développer cette relation. Mais les services financiers ne sont pas des biens comme les autres, ils ont un impact sur la stabilité de l’Europe toute entière. Ils ne peuvent donc pas être inclus dans l’accord de libre-échange”.
Theresa May a en effet reconnu vendredi 2 mars, lors d’un discours très attendu, que le pays ne pouvait plus prétendre au passeport financier une fois la sortie effective. Ce passeport concède un droit pour des entreprises au sein de l’Espace économique européen (EEE) de vendre leurs produits et leurs services à l’intérieur du bloc. Conséquence de cette perte : les banques avec leur siège européen à Londres seraient contraintes de délocaliser des milliers de salariés dans des bureaux dans l’UE.
Une bonne nouvelle pour l’Europe, et la France en particulier, qui espère ainsi attirer ces entreprises et donc des emplois. D’ailleurs, Bruno Le Maire a confirmé la relocalisation de milliers d’emplois dans l’Hexagone. “Cela se fera progressivement”, a-t-il déclaré, avant d’ajouter, “les grandes institutions financières installées au Royaume-Uni ne pourront plus travailler avec l’Europe sans un système d’équivalence ou d’autorisations. Cela change tout. La perte de ce passeport financier va inciter ces entreprises à s’installer à Paris pour exercer leur activité”. A noter que la capitale française va accueillir, du fait du Brexit, l’Agence bancaire européenne – jusque-là installée à Londres – dans les prochains mois.
D’ailleurs, le ministre de l’Economie a souligné les mesures fiscales prises par le gouvernement, ayant ont pour objectif de “transformer le modèle économique en profondeur”. De quoi, selon lui, donner davantage envie aux Français expatriés, mais aussi aux entreprises établies au Royaume-Uni de venir s’installer de l’autre côté de la Manche. “Nous n’avons rien contre les Britanniques. “We have nothing against you” comme je l’ai dit à Philip Hammond, mais il est logique que la France veuille développer son attractivité, qu’elle se donne les moyens d’être une grande place financière européenne et mondiale”.
Bruno Le Maire a conclu en expliquant qu’il était essentiel de “ne pas détériorer la relation toujours compliquée, mélange d’admiration et de suspicion” que les deux pays entretiennent depuis toujours. “Je suis un anglophile, j’aime la culture britannique qui est pour moi unique. Une décision politique a été prise de quitter l’Union Européenne, c’est un choix que l’on doit respecter, même si bien sûr je la regrette. Maintenant, il faut travailler à conserver cette relation importante entre nos deux pays”.