Il nous a donné rendez-vous à Mayfair, au sein même du tout premier établissement qu’il ouvre à Londres, signant ainsi ses premiers pas à l’international. . Arrivé avec quelques minutes de retard, Cyril Lignac s’excuse immédiatement. “Je suis désolé, mais je n’ai pas dormi de la nuit”, lance de but en blanc Cyril Lignac. Cela fait même plusieurs nuits qu’il ne trouve pas le sommeil. “J’ai un peu peur”, confesse-t-il. Car si à Paris, il est en terrain conquis, à Londres il a tout à prouver. “Ici ça ne pardonne pas, il y a les plus grands restaurants, c’est la Ligue des Champions”, estime Cyril Lignac. Ce n’est donc “pas en conquérant” que le Français débarque de ce côté de la Manche, mais avec une certaine appréhension. Car pour lui, c’est le public qui aura le mot final sur la légitimité de sa présence ou non.
Mais n’est-ce pas un pari risqué d’ouvrir un nouvel établissement en pleine pandémie ? “On ne pouvait plus repousser. Ici c’est très différent de la France, où les restaurateurs ont eu de la chance car il y a eu des aides”, explique Cyril Lignac. Il était donc plus que temps de commencer à amortir le coût de l’achat du lieu et des travaux engagés.
Et puis, comme pour de nombreux chefs, ouvrir un restaurant à Londres représente pour lui “le symbole de la réussite”. “Mais il y a beaucoup de concurrence, il faut arriver à faire sa place, être carré, concentré et précis dans ce que l’on fait”, explique-t-il, “je vais faire comme quand j’ai ouvert à Paris, c’est-à-dire arriver sur la pointe des pieds”. S’il reste si humble, c’est qu’il en a vu des collègues tomber de haut. “Mayfair n’a pas attendu après moi”, avance Cyril Lignac, estimant qu’être à Londres est déjà un “beau cadeau de la vie”. “Je suis tellement heureux. Je suis venu ici tellement de fois, j’y ai mangé. J’ai hâte de voir ce que les Anglais vont dire de ma cuisine”.
L’ouverture du Bar des Prés Londres, prévu samedi 22 mai, arrive au moment où l’Angleterre commence la deuxième phase de son déconfinement, avec la possibilité de manger en intérieur. Un timing parfait.
Mais surtout ce projet était dans le carton depuis bien longtemps et n’attendait qu’à devenir réalité. C’est au détour d’un déjeuner avec son ami Jean-François Casanova, responsable chez Dogus International, que l’idée d’ouvrir dans la capitale anglaise s’est invitée au menu. “Il est venu manger dans mon restaurant à Paris et on a commencé à discuter. Il m’a dit : ‘pourquoi ne pas développer la marque à Londres?’”. Le projet séduit immédiatement Cyril Lignac, qui avait déjà cette envie de Londres depuis très longtemps.
Cependant, entre vouloir et pouvoir, reconnaît le chef français, il y a parfois plus qu’un pas. “Il faut trouver le bon chemin”, explique-t-il, “on est si proche et si loin en même temps. Nos univers sont différents”. Pour concrétiser l’ouverture de son premier restaurant de ce côté de la Manche, Cyril Lignac a donc trouvé un associé, avec qui il a monté une société. “On a fallu ensuite trouver le bon emplacement et constituer la bonne équipe”, complète le Français, qui a investi ses fonds propres dans ce restaurant londonien. “Je n’ai fait appel à aucun investisseur”, confirme-t-il. Cette volonté d’indépendance était d’ailleurs primordiale pour lui.
Côté menu, Bar des Prés Londres est le copier-coller de son grand frère parisien. “A la différence qu’ on va aussi proposer ici quelques plats chauds”, détaille Cyril Lignac, “l’espace était suffisant grand avec le sous-sol pour y installer une cuisine. On a donc voulu en profiter”. Les produits cuisinés seront évidemment locaux. “On doit travailler avec ce qu’offre le pays”, estime Cyril Lignac, “surtout quand ils sont bons”. Le chef espère que sa cuisine séduira le palais des Anglais. “Je sais qu’il y a beaucoup de Français à Londres, c’est un socle sur lequel je peux peut-être compter. Mais j’ai aussi envie d’attirer les Anglais et plus largement une clientèle internationale”.
Plus encore, le chef a cette envie de s’intégrer complètement dans le paysage anglais. “J’aime ce pays, j’aime sa culture”. Au point de d’animer un jour une émission culinaire comme il le fait en France ? “J’en rêverai, mais pour ça il faudrait que je sois à l’aise avec la langue”, avoue Cyril Lignac. Mais il n’a pas attendu pour prendre contact avec un chef britannique qu’il admire et qui est lui aussi une star de la télé : Gordon Ramsay. “Je lui ai envoyé un message sur Instagram et il m’a répondu qu’on se verrait dès qu’il rentrerait en Angleterre”.
En attendant cette rencontre de haute gastronomie, le Français, qui reste jusqu’à début juin à Londres avant de rentrer à Paris pour justement enregistrer une émission mais aussi pour assurer l’ouverture de son établissement Ischia, se concentre sur celle de Bar des Près dans la capitale anglaise. A la question de savoir s’il a déjà des idées de développement futur à Londres ou même au Royaume-Uni, le chef se veut très “terre à terre”. “Je préfère y aller pas après pas. Je travaille selon les rencontres que je fais, les propositions que l’on me fait. Je n’ai pas de plan d’actions, je vais au gré des opportunités car la vie a souvent plus d’imagination que nous”.