Installée en Angleterre depuis 26 ans, Élisabeth Lecourt vit aujourd’hui de et pour son art. Elle qui s’est dérobée au moment d’obtenir le diplôme des Beaux-Arts a finalement trouvé son bonheur outre-Manche en peignant et en confectionnant des robes à partir d’objets du quotidien. Six d’entre elles seront d’ailleurs exposées à la Kahn gallery dans le cadre de Affordable Art Fair Battersea, qui se tiendra du jeudi 17 au dimanche 20 octobre.
L’art contemporain, voilà la tasse de thé d’Élisabeth Lecourt. Il faut dire que la native d’Oloron-Sainte-Marie (Pyrénées Atlantiques) aime s’attarder sur l’humanité, sa vulnérabilité, son mode de vie et sa liberté… conditionnelle. Autant de questions éminemment d’actualité. Au gré de son inspiration, elle se lance aussi bien dans un portrait spontané, peint sans modèle et quasiment d’une traite, que dans des toiles suggérant des individus anonymes de profil. Un point de vue qui “a l’avantage de ne montrer que la moitié des personnages”, explique-t-elle. Une manière implicite de replacer l’Homme dans sa complexité “avec du positif et aussi du négatif”, précise-t-elle.
Voir cette publication sur Instagram
Une publication partagée par Fresh Art Fair (@freshartfair) le 6 Mai 2017 à 1 :30 PDT
Néanmoins, le travail d’Élisabeth Lecourt tourne principalement autour de la création de vêtements, le plus souvent des robes, conçus à partir d’objets aussi insolites qu’une carte du métro londonien. Loin de chercher à devenir l’égérie de la prochaine fashion week, l’artiste de 47 ans cherche là aussi à interpeller le regard du spectateur. “J’aime l’idée que, par le dessin, l’Homme a voulu savoir où il est et surtout où il va”, lâche-t-elle avant d’ajouter “qu’avec toutes ses couleurs, la carte du métro londonien rappelle tous les vaisseaux sanguins qui nous donnent vie, d’où le nom de cette robe ‘Goutte à goutte du cœur’”.
Plusieurs de ses réalisations évoquent quant à elles l’enfermement et la détention, comme la robe imaginée pour être celle d’Anne Frank ou bien celle dédiée à la fille d’un prisonnier dont elle a découvert l’histoire au détour d’une coupure de presse. Plus largement, ces robes incarnent une certaine vision de la féminité. “La robe colle avec l’image la petite fille sage, qui se tient bien, comme une poupée dont on fait ce que l’on veut”, confie-t-elle. Pour autant, ce vêtement, selon l’artiste, aurait tout intérêt à être regardé comme une affirmation de la féminité et une “revendication de la liberté d’être qui on est et de faire ce que l’on veut, hors de tout jugement”.
Rien ne présageait Élisabeth Lecourt à poser ses bagages outre-Manche. Elle qui a toujours eu un penchant pour l’art avait en effet réussi à intégrer les Beaux-Arts de Pau, à seulement quelques encablures de sa ville natale. Après deux années passées dans l’institution dans laquelle elle ne s’épanouit pas, la jeune femme de 20 ans décide finalement de se retirer quelques semaines avant l’examen final. Elle s’expatrie alors, poussée par sa mère qui se dit “qu’au moins (elle) parlera anglais”. Malheureusement, elle peine à trouver sa place dans sa nouvelle école située à Hereford, au milieu d’adolescents bien plus jeunes qu’elle.
C’est à cette période que surgit véritablement son âme d’artiste. Dans sa chambre, elle fume en secret et commence à écrire en se prenant à rêver d’un avenir d’écrivaine. En parallèle, elle lit et écoute énormément la radio. Si bien qu’elle se plaît à dire que “France culture et France inter (l’ont) beaucoup élevée”. Élisabeth Lecourt rejoint finalement la capitale anglaise en intégrant le Kingston College où elle renoue avec les études d’art, avant d’enchaîner deux maîtrises prestigieuses, à Central Saint Martins puis au Royal College.
Au sortir des études en 2002, la Londonienne d’adoption parvient enfin à vivre de son art en commençant à présenter et vendre ses premières robes. Elle expose aujourd’hui aux quatre coins de la planète et figure dans les pages de nombreux magazines sensibles à l’art et à la mode. Son avenir, la Française l’imagine dans la capitale anglaise, sans exclure qu’un jour, elle pourrait revenir s’installer dans l’Hexagone.