“J’avais déjà pensé à présenter mes produits à un concours, mais je n’avais pas imaginé le faire aussi rapidement. Et encore moins commencer par un concours londonien !”, s’exclame Camille Héroult, qui a découvert le monde des spiritueux il y a seulement 5 ans. Il est vrai que sa première recette de gin, “Avis de tempête”, est toute récente : il ne la produit que depuis novembre 2019 et ce, dans son garage. Sa production a pourtant réussi à séduire en août dernier le palais des juges de la London Spirit Competition en décrochant la médaille d’argent. Fort de ce résultat, le Finistérien se met à rêver plus grand et espère à terme pouvoir exporter ses produits dans la capitale européenne du gin.
“Quand les organisateurs m’ont contacté pour participer, je leur ai dit que je n’étais pas prêt, que j’étais une toute petite distillerie et que j’étais tout nouveau dans le milieu”, se souvient-il. Mais ce concours londonien juge seulement le produit : sa qualité, son emballage et le rapport qualité-prix. La taille de la distillerie, sa longévité ou encore sa popularité, ne les intéressent pas. “Je me suis finalement dit que cela pourrait me servir, notamment pour connaître les défauts éventuels de mon produit.”
Puis, comme l’explique le nouvel artisan, quoi de plus logique que de présenter ses produits lors d’un concours au Royaume-Uni, et plus spécialement à Londres, considérée comme la capitale européenne du gin ? “Les premiers fabricants et consommateurs de gin sont les Anglais, ce sont donc eux les plus à même de juger la qualité de nouveaux produits”.
Résultat de sa participation : une médaille d’argent. “C’est vraiment très encourageant, se félicite Camille Héroult. J’ai obtenu 85 points, le seuil pour la médaille d’or se situant à 90.” Si “Avis de tempête” n’a pas décroché le Graal, c’est parce que le jury a estimé que le produit était un peu cher par rapport à sa qualité et à son emballage. “C’est quelque chose que j’entends, mais aujourd’hui mon gin me coûte relativement cher à fabriquer : je suis en phase de lancement, j’achète donc la botanique et l’alcool en petite quantité. Je ne peux pas me permettre pour le moment de diminuer le prix”, se justifie le médaillé.
Camille Héroult n’est pas encore distillateur de métier. Ce n’est pour le moment qu’une passion, qu’il allie avec un travail à plein temps dans une industrie finistérienne. Mais une reconversion à plein-temps dans le milieu du spiritueux ne déplairait pas à ce Français qui n’a mis les pieds dans ce monde que depuis quelques années. “J’avais, jusqu’à il y a 5-6 ans, un a priori négatif sur le whisky. Mais un ami m’a un jour amené à une dégustation et m’a fait comprendre que comme pour le vin, il y avait aussi des petits et des grands spiritueux”, explique-t-il.
Et la drôle de personnalité du Breton a fait le reste. “Quand j’apprécie quelque chose, je souhaite toujours en apprendre davantage. C’est ce que j’ai fait avec l’univers des spiritueux : j’ai fait des recherches, des formations, puis j’ai essayé d’en faire un par moi-même. Croyez-moi, mon épouse s’en est arraché les cheveux !”, rigole-t-il. Après une formation à Cognac qui lui a permis d’apprendre à monter une micro-distillerie, Camille Héroult s’est jeté à l’eau.
La naissance d’“Avis de tempête” en novembre 2019 a été la consécration de ce projet fou et la médaille d’argent à la London Spirit Competition, une première victoire personnelle. Mais aussi un très bon vecteur de communication. “Il y a clairement un avant et un après la médaille. Mon résultat est passé dans les journaux locaux en France, ce qui a créé une émulation. Ça a clairement attisé la curiosité de locaux, de touristes, de cavistes, qui sont venus me voir”, explique l’artisan. Cette récompense a donc été un réel booster de ventes, même si ces dernières restent principalement réalisées en France. “Je m’attendais à être contacté par des Britanniques ou des Européens, mais l’effet médaille n’a pas été jusque-là”.
Camille Héroult pense savoir pourquoi. “Je produis mon gin tout seul dans mon garage, en petit volume. Ça freine donc nécessairement les importateurs.” Contrairement aux grosses distilleries, le Breton ne peut en effet produire qu’environ 500 bouteilles par mois. “Mes produits restent pour le moment très exclusifs. Je pense que c’est aussi le côté artisanal qui veut cela.”
Pour autant, le Finistérien ne cache pas son désir d’exporter à terme ses produits. “Une des raisons pour laquelle j’ai décidé de participer à la London Spirit Competition c’est que le Royaume-Uni est un potentiel marché”, souligne-t-il. De plus, exporter ses créations serait pour le distillateur une importante reconnaissance des produits du terroir breton. “Je viens de créer un partenariat avec une herboriste dans la volonté d’utiliser dans mes recettes le plus possible de produits issus de la culture locale, comme la coriandre, le fenouil…”
Suite à sa participation au concours londonien, Camille Héroult a donné naissance à deux autres recettes. “J’ai déjà repris contact avec les organisateurs du concours pour présenter l’ensemble de ma gamme.” Car contrairement à beaucoup de distilleries, il ne souhaite pas s’arrêter à une seule production. Il veut en effet diversifier ses créations, à l’image d’”Ephémère”, gin qualifié par le finistérien “de saisonnier”. “Il y aura quatre éditions différentes d’Ephémère dans l’année, en fonction des saisons et des produits locaux à disposition.” Les Britanniques verront donc peut-être bientôt arriver un gin breton dans leur verre…