L’affaire avait fait grand bruit il y a près de deux ans : l’Ofsted, organisme de contrôle et de notation des écoles indépendantes du Royaume-Uni, avait “déclassé” le Lycée français Charles de Gaulle de Londres. De “good”, la note générale de l’établissement avait été rétrogradée à “inadequate”. A l’époque, l’organisme avait justifié sa décision par des manquements dans plusieurs domaines, notamment en formulant des inquiétudes sur la sécurité des élèves.
Lors de ses inspections, l’organisme juge en effet six points différents : la qualité de l’éducation, le comportement et l’attitude des enfants, l’enseignement pour les petits, l’enseignement des 16-19 ans, le développement personnel des enfants et le leadership et management. Si le lycée avait obtenu “good” sur les quatre premiers, ce ne fut pas le cas pour les deux derniers. Pour l’Ofsted, la partie développement personnel “nécessit(ait) des améliorations” tandis que celle du leadership et management était qualifiée d’”inadequate”. Sauf qu’il suffit d’un “inadequate” dans le rapport pour que la note globale dégringole.
Si le Lycée français avait été surpris et secoué par les conclusions du rapport, des mesures avaient été prises dans la foulée pour pouvoir se conformer aux standards exigés. Début septembre 2023, l’Ofsted avait effectué une visite de contrôle. L’organisme avait alors estimé que le Lycée français répondait désormais à “tous les standards des écoles indépendantes”. Mais la note globale était restée inchangée.
Il aura donc fallu attendre une année supplémentaire pour que tout le travail effectué soit récompensé avec une nouvelle inspection, réalisée début octobre, et dont le résultat s’est conclu par une note générale réévaluée à “Good”. Cette inspection s’est déroulée sur trois jours, du 1er au 3 octobre dernier. “Environ huit inspecteurs étaient présents, c’était très intense”, commente la proviseure de l’établissement, Catherine Bellus-Ferreira.
Avant de se déplacer, l’Ofsted s’est entretenue avec elle et ses équipes pour planifier cette visite et “décortiquer” tout ce qui allait être inspecté. “Après chaque journée de visite, il y avait un débrief et la préparation de la journée suivante”. La capacité d’adaptation du lycée a donc été mise à rude épreuve. Cette inspection était d’autant plus importante pour Catherine Bellus-Ferreira, qui avait pris le dossier en cours de route, à son arrivée en septembre 2023. “J’ai vu ce sentiment d’humiliation et de trahison que les équipes avaient ressenti après la publication du précédent rapport”, se souvient-elle, “il a fallu comprendre, se former, déployer un dispositif collectif pour aller au bout de notre action”.
Le travail s’est porté, avance Catherine Bellus-Ferreira, à la fois sur le contenu, la sécurité, la formation sur la santé, les règlements, mais aussi sur la forme. “La culture professionnelle britannique est différente de celle de la France. Il a fallu travailler sur comment rassurer les autorités britanniques sur les choses que l’établissement avait déjà mais qu’il ne savait pas montrer”. C’est pourquoi, la proviseure s’est entourée de spécialistes britanniques et s’est appuyée sur les collègues londoniens. “Il a fallu aller chercher l’information partout”. Un an et demi après, le travail a porté ses fruits. “Nous sommes passés de 30 évaluations des risques à 200. On peine à imaginer la somme de travail que cela peut constituer pour les collègues”, lance la proviseure, “mais le plus important, c’est que nous avons un peu changé les mentalités”.
En 2022, l’Ofsted avait jugé “inadequate” le critère “Leadership and management” et demandait des améliorations sur la partie “Personal development”. Dans le nouveau rapport, ces deux points sont passés à “good”. Tandis que la qualité de l’enseignement et la “early years provision” concernant la partie petite enfance de l’établissement sont passées de “good” à “outstanding”.
La conclusion du rapport a ainsi été vécue comme un grand soulagement. “Nous avons su répondre avec succès aux standards. Dans son rapport, l’Ofsted ne formule aucune nouvelle demande d’amélioration”, se félicite-t-elle, “sur l’ensemble des domaines notés, nous sommes soit “good” soit “outstanding”. Ce qui prouve que ce ‘gros’ établissement qu’est le Lycée Charles de Gaulles a élevé le niveau”. Catherine Bellus-Ferreira se réjouit aussi de la mobilisation de la communauté de l’établissement pour arriver à ce nouveau résultat. “C’est vraiment réjouissant, cela prouve que nous avons su produire quelque chose d’extraordinaire”.
Elle rappelle aussi que le Lycée français a réussi à faire taire toutes les critiques après le rapport de 2022. “C’est une institution historique de près de 110 ans. Historique ne veut pas dire vieillissant, difficile à bouger. Certains pensaient que nous n’y arriverions pas. Mais nous avons su montrer que nous sommes des gens modernes, capables de s’adapter rapidement au monde actuel, à bouger de nos certitudes. On a enfin retrouvé notre fierté et prouvé que nous sommes encore à la page”.
Pour Catherine Bellus-Ferreira, c’est “un signal fort” pour la communauté française, mais aussi pour les familles. “On a su recréer la confiance, la redonner aux parents qui souhaitent un enseignement français non pas poussiéreux mais plutôt avec un regard vers le monde d’aujourd’hui. Notre établissement est capable de s’adapter aux exigences qui n’étaient pas forcément les nôtres”.
Mais le Lycée français ne devra pas pour autant baisser la garde pour maintenir les standards. La proviseure en a pleinement conscience. “Je suis contente de cette expérience professionnelle, cela a été une opportunité de faire des choses nouvelles. Le bilan est que cela n’a pas apporté que des contraintes, mais a permis de s’imprégner de ce que les Britanniques font de bien”.