Le pain perdu, on connaît tous. Cette délicieuse recette qui permet de transformer du pain rassis immangeable en un mets onctueux et savoureux grâce à un simple mélange d’œufs, de lait et de sucre. Au Royaume-Uni, le pain perdu est connu sous le nom de French toast. Alors pourquoi est-il lui aussi (aux côtés des frites et autres bulldogs …) considéré comme français ?
Dans l’imaginaire collectif, le pain perdu provient de la nécessité de ne pas perdre de nourriture, simplement par économie mais aussi parce que jeter du pain, avec ses connotations religieuses, était socialement inacceptable. Les experts s’accordent à dire que le pain perdu remonte à la Rome antique. On trouve une recette similaire dans le livre d’Apicius datant du Ve siècle avant Jésus Christ. Les romains trempaient des tranches de pain dans du lait (et parfois des œufs) avant de les faire frire: c’est ce qu’on appelait le “Pan Dulcis”.
On retrouve la trace d’une même recette au XVe siècle à la cour d’Henri V où le “lost bread”, comme il est appelé alors, fait un tabac. Ce n’est qu’à partir du XVIIe siècle que le terme French Toast apparaît en Angleterre (en 1660 précisément dans un livre intitulé The Accomplisht Cook, selon The Oxford English Dictionary). Ce qui rejoindrait une des théories développées, ici même, au sujet des frites et selon laquelle l’appellation French ne viendrait pas de l’origine du plat mais du verbe “to french” qui signifie “trancher” en vieil irlandais. D’où les toasts…
Après la Grande Famine (1845-1851), les colons irlandais se rendant aux Etats-Unis et au Canada emportèrent le terme dans leurs valises. En effet, la phrase French toast apparaît pour la première fois dans l’Encyclopedia of American Food and Drink en 1871, même si des recettes semblables ont pris d’autres noms : “Egg toast“, “Spanish toast” et même “German toast”. Cette explication viendrait alors contredire la légende selon laquelle les French toasts auraient été inventés en 1724 par un certain Joseph French à Albany, New York, et dont la grammaire approximative lui aurait fait oublier le “s” apostrophe.
Pour les Britanniques, un “French toast” peut aussi s’appeler “Eggy toast” (à cause des oeufs utilisés dans la recette) et contrairement à la tradition française, qui veut qu’on les serve sucrés, au Royaume-Uni, ils les préfèreraient salés, comme le précise le site The Breakfast Shoppe : “En Ecosse, le pain perdu français est traditionnellement servi avec de la saucisse entre deux tranches et est mangé comme un sandwich. Dans le reste de la Grande-Bretagne, on le mange aussi parfois avec du ketchup”.
Mais reste que le nom French Toast est le plus souvent utilisé par les Anglais. Selon The Townsends Blog, il semble être utilisé depuis de nombreuses années dans le vocabulaire culinaire anglais. Pour preuve : “Dans un vieux livre de cuisine anglais sans nom de 1430, plus tard compilé et publié sous le nom “Two 15th Century Cookery Books”, nous avons pu trouvé une recette de pain trempé dans des jaunes d’œufs, frits dans du beurre et saupoudrés de sucre. Le nom de cette recette était “payn perdu”, un mot français qui signifie “pain gaspillé”, suggérant que cette recette était destinée à utiliser le pain rassis”.
En tout cas la popularité du pain perdu est maintenant bien plus grande au Royaume-Uni qu’en France (allez en trouver dans un café en France !). Les French toasts ont même droit à leur journée nationale, le 28 novembre.