Dans un couple, une expatriation, pas toujours choisie selon les cas, est signe de renoncement professionnel pour l’un ou pour l’autre. Une situation génératrice de tensions pour le conjoint qui suit mais qui pourtant pourrait être évitée. Car rien n’oblige celles et ceux qui le souhaitent à continuer à avoir une activité bénévole ou salariée lors d’un changement de pays.
“C’est vrai : une expatriation peut engendrer beaucoup de problèmes de couple”, confirme Françoise Carbonnel du cabinet Harmony & Mobility Consulting, “quand son conjoint doit beaucoup travailler parce que le siège de l’entreprise a des attentes importantes, ou simplement parce que la pression est forte selon le pays où l’on se trouve, la réalité fait que l’autre se retrouve à ne rien faire et attendre, et parfois même à se sentir inutile”. L’impression de faire un sacrifice dans sa carrière professionnelle peut s’avérer donc violente, surtout quand l’expatriation n’est pas un choix fait à deux. “Quand le conjoint est une femme, notamment en ce qui concerne cette génération qui a aujourd’hui près de la cinquantaine, elle ne se sent pas forcément le pouvoir ou le devoir de dire non à cette opportunité professionnelle pour son époux”, complète Françoise Carbonnel.
La Française, qui a ouvert il y a 10 ans à Pékin ce cabinet de consulting qui aide à la transition de carrière, sait de quoi elle parle puisqu’elle a vécu cette situation. “Quand les enfants sont petits, la parenthèse professionnelle est plus facile, car il y a de quoi s’occuper. Et puis quand c’est la première expatriation, on arrive à gérer. Cependant, au bout de la deuxième ou de la troisième, on en vient à se remettre en question”, avance la consultante. Pour elle, la solution, lors de la deuxième expatriation de son époux en Roumanie, a été de s’investir dans une association, d’inscrire à son agenda nombre d’activités caritatives ou scolaires pour remplir ses journées.
S’il y a quelques années, la question du travail ou non du conjoint se posait moins, “aujourd’hui en France, il est très rare de voir une femme qui ne travaille pas. C’est pourquoi pour les nouvelles générations, l’attention est portée sur la double carrière”. Autrement dit, les deux conjoints essaient de trouver une expatriation où les deux peuvent avoir une activité professionnelle. Si cela n’est vraiment pas possible, le conjoint sans travail peut saisir l’opportunité d’un changement de pays pour réfléchir à une nouvelle direction de carrière.
Dans son cabinet de consulting à Londres, elle et ses associées, Alice Lantieri et Bénédicte Gariel, s’occupent de ces conjoints d’expat en pleine reconversion. “La moyenne d’âge est plutôt autour de 40 ans et il est vrai que ce sont à majorité des femmes”, lance Françoise Carbonnel. Elle conseille souvent de s’orienter vers les métiers de coaching, qui permet de travailler partout “avec le potentiel d’un marché mondial avec internet”. Autre reconversion possible : l’entreprenariat avec des services en entreprises, de la vente en B to C, de l’artisanat… “L’expatriation, c’est aussi un moment exceptionnel pour rencontrer une nouvelle culture, apprendre à se connaître, développer de nouvelles compétences, se former. Et ce, à n’importe quel âge”. A Londres et plus largement au Royaume-Uni, la reprise d’études n’est absolument pas mal perçue, comme elle le souligne.
Mais pour Emilie Moussin, coach française dans la capitale anglaise, il est important de s’interroger pour savoir ce qui pousse le conjoint à vouloir travailler. “Recherche-t-on un emploi pour des raisons financières, pour soi, pour être actif ou active ?”, questionne l’ancienne chef d’entreprise parisienne. Une fois la réponse apportée, la personne peut enfin se projeter. “Ecrire un livre, créer des événements pour des enfants, lancer son entreprise… Tout est possible surtout à Londres. Finalement, les limites ne sont que mentales”.
Pour Emilie Moussin, il faut avant tout que le conjoint travaille sur l’estime de soi. “Sortir de sa zone de confort n’est pas simple mais réalisable. Je conseille souvent à mes clients de faire une liste de ce qu’ils aimeraient faire, des compétences possibles à acquérir, de prendre conscience qu’il faudra certainement apprendre de nouvelles choses, puis une fois prêts, ils peuvent passer à l’action. Mais cela, seulement et seulement si, ils se sont fixés un objectif motivé par un désir clair et précis. Ensuite, les portes s’ouvriront plus facilement”.