Carré 644 est sa sixième réalisation et il a tenu à venir la présenter à Londres, sur l’invitation de Marie-Laurence Hagopian, fondatrice de French Touch by Marie qui organise des événements culturels dans la capitale anglaise. A travers son film, qui sera projeté samedi 19 janvier au club Library, Azize Kabouche aborde un sujet universel mais tout en gardant un regard très personnel : comment faire face à la fin de vie des parents, surtout quand cela implique des questions que l’on n’aura jamais soupçonnées.
Le point de départ de ses réalisations est toujours lié à une dimension personnelle. Alors quand il a écrit Carré 644, il a mis un peu de lui dans le personnage principal (qu’il interprète par ailleurs), Wassim. Azize Kabouche signe sa sixième réalisation et voulait aborder un sujet qui parlera à tout le monde et qui n’avait pas encore été traité dans le cinéma.
So histoire est celle de Wassim, la cinquantaine passée. Ce sportif doit passer un scanner du cerveau. Un peu plus tard, il apprend que l’état de santé de sa vieille mère décline et que ses jours sont comptés. L’angoisse de la mort le saisit : la sienne incertaine, celle de sa mère inéluctable. Wassim réalise alors qu’il ne lui a jamais posé la question : “Où aimerait-elle reposer ?” – “En Algérie ? Ou en France ?” – Ces évènements amèneront alors Wassim à s’interroger sur ses origines, la religion et les traditions…
“J’ai mis de moi pour commencer cette histoire, comme je le fais à chaque fois, mais l’écriture transforme le personnel en fictionnel”, confie Azize Kabouche. Pour lui, le travail d’un réalisateur se dirige souvent vers une problématique liée à ses origines. Le concernant, ce sont celles d’un enfant d’immigré qu’il revendique et sur lesquelles il s’appuie alors pour raconter des histoires. “Je suis acteur depuis 30 ans et je n’ai jamais été catalogué au théâtre comme étant l’Arabe de service. Mais le travail à mener pour montrer plus de diversité dans le monde du cinéma est encore long”, poursuit le Français.
Du retard sur la représentation des minorités ethniques en France, il y en a, reconnaît-il donc, que cela concerne les Arabes, les Asiatiques ou encore les Noirs. “Peut-être qu’il y a quelques artistes connus, mais il y a un manque alors que la France est diverse. Il est évident qu’il reste encore beaucoup à faire, qu’il demeure encore beaucoup de clichés mais des progrès ont été faits”, se félicite Azize Kabouche.
Avec Carré 644, il a voulu parler des musulmans, de l’heure de leur mort et de la question de leur enterrement. Doivent-ils se faire enterrer sur leurs terres natales ou en France ? Cela ne concernant pas seulement les anciennes générations, mais aussi celles qui sont nées sur le sol français. “Le problème est qu’il existe peu de carrés musulmans dans les grandes villes”, analyse le cinéaste, “si c’est le cas, c’est dans les banlieues, toujours à l’écart”. Mais avec ce film, Azize Kabouche voulait aussi transcender la question de la religion, qui n’est qu’un prisme pour appuyer son propos. Son discours sur la question de la fin de vie des parents veut toucher tout le monde. “Quand je parle d’origines, elles peuvent être de différentes natures”.
Lors du tournage de son film, le réalisateur a donc également endossé le costume d’acteur. De quoi devenir quelque peu schizophrène. “Quand on réalise et on joue à la fois, c’est un double travail. Celui de réalisateur prend beaucoup de temps, c’est même la partie la plus sportive dans le cinéma, mais heureusement j’ai eu beaucoup de soutien”. Et notamment de la co-auteure de Carré 644, Karina Beuthe Orr. “Elle joue aussi dans le film, du coup on pouvait faire le point ensemble à toutes les étapes”.
Londres est une première pour lui. “Quand Marie-Laurence m’a appelé il y a 6-8 mois pour intervenir lors d’une de ses soirées, on a convenu que je vienne présenter le film, car je travaillais encore dessus”, explique Azize Kabouche. Venir dans la capitale anglaise est important pour lui, car exporter de tels sujets lui semble essentiel. “J’ai travaillé pendant quatre ans sur Carré 644, on l’a soumis à différents grands festivals de cinéma et on attend avec impatience les sélections”. En attendant, le public est invité à voir ce film “en avant-première” et échanger avec le réalisateur et une partie du casting pour encore mieux comprendre le travail du cinéaste.