Le gouvernement français est aux avant-postes et a depuis quelques mois déjà préparé activement le scénario d’une sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne sans accord. Nathalie Loiseau l’a répété au micro de France Inter mercredi 16 janvier, au lendemain du rejet de la proposition sur le Brexit soumise par la Première ministre britannique devant son Parlement.
La ministre française des Affaires européennes a rappelé que l’Hexagone avait déjà anticipé l’hypothèse d’un Brexit dur. Le Sénat avait déjà voté un projet de loi en novembre dernier pour protéger les intérêts économiques du pays, de ses entreprises des deux côtés de la Manche mais aussi des ressortissants français établis au Royaume-Uni et souhaitant rentrer au pays. “Demain (jeudi 17 janvier, ndlr), une réunion est prévue entre le Premier ministre et les autres ministres pour voir si tout est bien prêt pour ne pas être dans le chaos le 29 mars (date pour le moment officielle de la sortie de la Grande-Bretagne, ndlr)”, a expliqué Nathalie Loiseau.
Le projet de loi devrait être également voté par l’Assemblée nationale d’ici les prochains jours. S’il n’y a pas d’accord sur le Brexit, la ministre a expliqué qu’il y aurait immédiatement un retour des frontières. Des nouveaux fonctionnaires ont déjà été recrutés notamment pour assurer les contrôles du côté de Calais, port de passage des marchandises venant du Royaume-Uni.
Quand la radio lui a demandé pourquoi le divorce était si long entre les deux parties, Nathalie Loiseau a répondu qu’“un certain nombre de Britanniques n’ont pas mesuré ce que voulait dire appartenir à l’Union européenne, comme être intégré dans un marché unique”, soulignant qu’une renégociation de l’accord est impossible. “Le texte ne peut pas être rouvert, on a eu 17 mois avec des va-et-vient. Le Brexit a représenté un tiers de mon travail, ce qui est excessif car j’ai autre chose à faire que de m’occuper d’un divorce. Si le Royaume-Uni veut une séparation ordonnée, alors ce sera avec ce texte. Les autres options, c’est soit pas d’accord, soit pas de Brexit”.
Et celle d’un nouveau référendum, comme l’ancien leader du parti d’extrême-droite Skip, Nigel Farage, l’a proposé juste après les résultats du vote ? “Nigel Farage s’est fait élire député européen pour cracher sur l’Union européenne, et maintenant il voudrait un second référendum? En tous les cas, la demande n’a été faite ni par Theresa May ni par Jeremy Corbyn (chef du parti travailliste, ndlr), donc cela ne reste qu’une hypothèse. Et puis, il faudrait aussi savoir quel référendum ?”.
Pas question également de repousser la date de sortie, qui demeure là aussi une simple hypothèse, même si cela serait “techniquement possible, mais il faudrait l’unanimité des membres des 27. La France de son côté dit : pour combien de temps et pourquoi faire ? En tous les cas, ce ne sera pas pour permettre des négociations supplémentaires”. En cas de report de la date de sortie, cela signifierait que les Britanniques seraient appelés, comme les reste des électeurs européens, à voter pour les élections de mai pour l’assemblée parlementaire de l’UE. Une situation incongrue, alors qu’une majorité de la population du pays a demandé à partir du bloc.
Les patrons français aussi se préparent au pire. Le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, a expliqué que “le résultat (du vote) rend aujourd’hui malheureusement possible une sortie du Royaume-Uni sans accord le 29 mars prochain. En tout état de cause, le Medef appelle toutes les entreprises à se préparer au pire scénario, c’est-à-dire un non-accord”. Le syndicat patronal a rappelé que dans cette hypothèse, les personnes, les biens, les services et les capitaux ne pourraient plus circuler librement entre l’Europe et le Royaume-Uni. 300.000 Français travaillent outre-Manche, 30.000 entreprises françaises exportent en Grande-Bretagne et plus de 3.000 d’entre elles y sont installées.