Près de dix ans après avoir créé la première école “Les Petites Etoiles” du côté de Tufnell Park, Olivier Bertin ouvre un deuxième établissement pour cette rentrée de septembre 2019 à Crouch Hill. Un choix judicieux, puisque le quartier est très familial et encore accessible financièrement sur le plan immobilier. Cette ouverture fait suite aux nombreuses demandes des familles, alors même que certaines écoles sont en pleine crise d’effectifs, avec en toile de fond le Brexit. Le succès des Petites Etoiles s’explique notamment par “la qualité de l’enseignement”.
La nouvelle école a une capacité d’accueil de 40 élèves et s’il reste encore quelques places, le succès est déjà au rendez-vous pour ce deuxième établissement, qui a ouvert officiellement ses portes mercredi 4 septembre. Olivier Bertin n’est pas peu fier, car cela faisait 6 ans qu’avec ses associés, ils cherchaient un nouveau bâtiment pour faire grandir Les Petites Etoiles. “On voulait un lieu pas trop grand, mais avec une cour de récréation, c’était très important pour nous, car à Londres, peu d’écoles en ont”, souligne le co-fondateur.
Le choix de la localisation a été aussi essentielle. “Crounch Hill est un quartier où il y a beaucoup d’écoles primaires et secondaires de qualité, ce qui permet aux familles d’avoir une continuité dans la scolarité de leurs enfants. En plus, on reste dans le Nord (la première école étant située à Tufnell Park, ndlr), donc pas très loin du Collège Français Bilingue de Londres”, avance Olivier Bertin, “et puis, il y a encore des maisons “abordables””. Un plus non négligeable dans une capitale où le foncier est hors de prix.
L’envie d’ouvrir un second établissement s’est imposée d’elle-même. Le nombre de demandes d’inscription dans la première école était déjà très important. Cet engouement pour Les Petites Etoiles, Olivier Bertin l’explique par la qualité de l’enseignement qui y est dispensé. La crèche-maternelle a d’ailleurs obtenu le label “Outstanding” en 2017, récompense ultime pour tous les établissements scolaires au Royaume-Uni. “On travaille beaucoup pour proposer une offre scolaire intéressante, on a aussi fait le choix d’avoir une cantine servant des produits bio et de sensibiliser les enfants à l’environnement avec par exemple une sortie en forêt une fois par semaine”. Les parents ont alors été très sensibles à cette distinction, la preuve étant qu’une fois certifiée, l’école Les Petites Etoiles de Tufnell Park a vu sa liste d’attente doubler. Pour la nouvelle structure, la capacité sera un peu moindre que la première, qui compte 53 places pour des enfants âgés de 1 an à 5 ans. “Pour Crouch Hill, on a décidé de baisser l’âge d’entrée à 6 mois”, détaille le Français. Une mesure pour répondre aux demandes croissantes d’accueil de plus jeunes enfants.
“Les familles intéressées par nos écoles sont mixtes et internationales”, souligne Olivier Bertin. Les élèves sont d’ailleurs acceptés qu’importe leur langue maternelle. En revanche, l’équipe est pour moitié francophone et l’autre anglophone. “Chaque adulte est ainsi associé à une langue” pour ne pas créer la confusion ni au sein du personnel ni pour les parents et enfants. L’école propose même une initiation au mandarin. Une évidence pour le Français, qui rappelle que cette langue reste la plus parlée au monde. “Sans oublier qu’elle comporte beaucoup de nuances de sons. Il est donc important de l’apprendre dès le plus jeune âge. Même si les enfants ne s’en serviront pas plus tard, cela va les aider à développer davantage leur oreille”, pense Olivier Bertin. Pour dispenser ces cours, deux nouveaux enseignants arriveront de Chine en octobre.
Cela aurait pu être un risque d’ouvrir une nouvelle école, certains établissements traversent une crise d’effectifs alors même que le Brexit n’a pas encore eu lieu. “On n’a jamais craint la sortie du Royaume-Uni, car les parents continuent à penser que le bilinguisme est une chance, ils voyagent et se rendent compte de l’intérêt de parler d’autres langues. D’ailleurs, après le référendum de 2016, il y a une vague forte d’inscriptions dans l’école de Tufnell Park. Les familles ne veulent pas être coupées de l’Europe, sans compter que l’Etat britannique s’est totalement désengagé dans l’apprentissage des langues étrangères. On voit aussi des universités fermer des départements de langues”, analyse Olivier Bertin.
Le taux de remplissage de la nouvelle école est plus que satisfaisant pour Olivier Bertin, qui continue de recevoir des demandes d’inscription. Alors pourrait-on imaginer une troisième ouverture dans les mois à venir ? “On hésite, car on ne veut pas devenir le Mc Donald’s de l’éducation. On préfère faire moins pour privilégier la qualité. C’est d’ailleurs le seul moyen de résister au Brexit”, juge-t-il, avant d’ajouter, “si on propose une nouvelle école, ce ne sera pas avant un an, le temps de trouver les bons locaux”.
A son arrivée à Londres en 1992, le Français, natif de Besançon, n’aurait certainement pas pensé que près de 20 ans plus tard il serait à la tête de deux établissements, bien qu’il mettra le pied dans le monde scolaire dès ses premiers pas dans la capitale anglaise. “Quand je suis venu pour une année de césure pendant mes études d’économie et gestion, j’avais emmené toutes mes économies, mais au bout de deux mois, j’avais tout dépensé”, rit-il.
Le jeune homme, âgé de 25 ans, décroche alors un emploi comme surveillant au Lycée français Charles de Gaulle. Au bout de quelques années, l’établissement lui propose un poste de professeur de sports au sein d’une de ses écoles primaires. Il y restera au total 16 ans. “Cela m’a beaucoup plu, mais j’ai voulu arrêté, j’avais envie d’autre chose”, reconnaît Olivier Bertin. Cela tombe bien puisque parallèlement à ses années au Lycée français, il avait géré une agence de cours particuliers, où il devait recruter des professeurs. “J’avais aussi donné des cours de maths au lycée pour arrondir mes fins de mois”, se souvient-il.
Après toutes ces expériences, il reprend contact avec Amandine Alys, une ancienne élève de Charles de Gaulle. Ensemble, ils ont l’idée de créer une école maternelle. “Philippe Fraser nous a aussi rejoints”, complète le Français. En avril 2010 et après un an de travail sur le projet, Les Petites Etoiles ouvrent leurs portes à Tufnell Park. Les trois associés se répartissent chacun les tâches : Olivier Bertin sera en charge des inscriptions, Amandine Alys du recrutement et Philippe Fraser de l’aspect pédagogique. “On se complète très bien”, assure le co-fondateur.
26 ans après son arrivée à Londres, il est plutôt content de son parcours, lui qui jure qu’il n’avait jamais eu de plans de carrière. “Je crois simplement que j’ai toujours eu une attitude d’ouverture aux opportunités”, lance-t-il. Et il en a saisi d’autres d’ailleurs, comme celle d’être un des représentants des Français au Royaume-Uni auprès du Consulat depuis 2001, lui qui a toujours été intéressé par la politique. “Ce sont des amis qui m’ont proposé d’être sur la liste”. Il a même été candidat aux législatives de 2012, sous l’étiquette Europe Ecologie-Les Verts et même aux élections locales du borough de Lambeth. Et comme cela ne lui suffit pas, il a aussi créé un club de randonnées pour les francophones de Londres.