Le milieu de la technologie est un des secteurs où l’écart entre les genres se resserre. Dans son dernier rapport intitulé « Les femmes gagnent du terrain dans l’industrie de la technologie mais rencontrent de nouveaux obstacles », le cabinet Deloitte met en évidence le proportion grandissante des femmes dans le secteur. Les femmes étaient près de 23 % en 2020 dans le milieu de la technologie et passeront la barre des 25 % en 2022 contre 33 % des hommes selon les prédictions de l’agence de conseil. Comme le montrent de nombreuses études, la récente crise sanitaire a accentué les disparités dans les secteurs traditionnellement plus occupés par les hommes.
Si la finance et la technologie arrivent en tête de liste, la pandémie a présenté des opportunités favorables pour les entrepreneuses Véronique Trang, fondatrice de Telmi by Storyskimo et Émilie Spire, créatrice de Noala. Ces deux Françaises font en effet la différence sur le marché de la tech londonienne avec leur plateforme numérique à l’écoute des enfants et au service du langage et de la communication.
Inspirée par sa fille Anouk et son expérience de l’enseignement à distance, Véronique Trang a lancé Telmi by Storyskimo une plateforme de création de podcasts par et pour les enfants. « Aujourd’hui, les applications de création de podcasts disponibles ne sont pas adaptés aux plus petits », explique-t-elle avant de préciser, « ce sont des outils pour des adultes pour des objectifs marketing, non pas des objectifs éducatifs. Il y avait un manque important dans le marché des applications, j’ai alors construit une plateforme pour enregistrer des mini-podcasts ».
Véronique Trang n’est pas la seule à avoir fait du confinement une période riche en innovations. Émilie Spire a travaillé d’arrache-pied au lancement de son projet digital ces deux dernières années. Riche de dix ans d’expérience dans le conseil et l’investissement dans les plateforme numérique, l’ancienne de chez Blablacar et Felix Venture Capital a développé une idée inspirée de sa nièce Ambre, née avec des troubles de l’acquisition du langage. Dans l’objectif de faciliter l’accès aux soins tout en supprimant la barrière géographique, Émilie Spire a mis en place une plateforme, Noala, mettant en lien orthophonistes et patients. « Il y a un nombre restreint d’orthophonistes, ils sont près de 180,000 au Royaume-Uni et aux États-Unis au total, et chaque professionnel voit près de 40 patients par semaine », annonce-t-elle avant de poursuivre, « nous pensons pouvoir aider cette communauté en utilisant les outils digitaux de manière intelligente ».
De toute évidence, les bonnes idées ne peuvent mûrir qu’au soleil de financements suffisants. Véronique Trang, anciennement consultante chez Ford et Unilever, explique que les problématiques rencontrées par les entrepreneuses résident principalement la levée de fonds. La fondatrice de Telmi, qui sera lancée auprès du grand public sur les plateformes de téléchargement cet été (mais les inscriptions sur sa liste de distribution sont déjà ouvertes), observe une tendance plus importante au « bootstrapping » ou « amorçage » chez les femmes dans le numérique. « À mon sens, les jeunes pousses fondées par les femmes survivent plus longtemps grâce au financement à partir de fonds personnels », estime Véronique Trang. Émilie Spire revient elle aussi sur la genèse du financement de Noala. « Au début et comme de nombreux entrepreneurs, j’ai auto-financé mon projet. En plus des montants investis pour arriver jusqu’à la phase bêta-test fermée, je n’ai pas perçu de revenus pendant cinq mois. Il faut prévoir ces choses-là. »
De manière unanime, les deux entrepreneuses encouragent la création de réseaux forts entre créateurs numériques. Même sans échange de financements, le gain d’expérience et de visibilité occupe une place capitale dans le lancement de jeunes pousses. L’histoire d’Émilie Spire et de Noala le confirme. « J’ai eu la chance d’avoir été exposée à de nombreux entrepreneurs talentueux, tels que Nicolas Brusson de Blablacar ou encore Cyril Chemla de ProcessOut pour ne citer qu’eux », souligne la jeune femme. Véronique Trang la rejoint et mentionne le rôle clé de French Tech London, réseau d’entrepreneurs lui ayant permis d’obtenir des opportunités de présentation de projets, l’obtention de conseils au sein de la communauté des entrepreneurs français à Londres ainsi l’acquisition de précieux contacts. La créatrice de Noala conclut en confiant son mantra, hérité de son expérience chez Blablacar : « Sharing is caring. Share more, learn more »*.
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